Avancée des troupes russes, réactions et exode: le récit de la première journée de guerre en Ukraine

De l'annonce du début d'une invasion militaire en Ukraine au petit matin à la prise de la centrale de Tchernobyl par les troupes russes en fin de journée, tout est allé très vite en Ukraine ce jeudi. Retour sur les principaux faits du jour pour comprendre les avancées de la guerre à l'est de l'Europe.
• Vladimir Poutine lance une "opération militaire"
"J'ai pris la décision d'une opération militaire spéciale". L'Europe s'est réveillée ce jeudi avec la déclaration surprise du président russe. Vladimir Poutine s'est exprimé à la télévision aux alentours de 4 heures du matin (heure française) pour annoncer le lancement d'une "opération militaire" en Ukraine pour défendre les régions séparatistes de l'est du pays, dont il a reconnu l'indépendance lundi.
Il a dénoncé un "génocide" orchestré par l'Ukraine dans ces régions, arguant de l'appel à l'aide des séparatistes lancé dans la nuit. Il a également pointé du doigt la politique agressive de l'Otan à l'égard de la Russie, dont l'Ukraine serait l'outil. Le président russe a expliqué vouloir "arriver à une démilitarisation et une dénazification de l'Ukraine".
"Nous n'avons pas dans nos plans une occupation des territoires ukrainiens, nous ne comptons imposer rien par la force à personne", a-t-il également déclaré, sans toutefois donner de précision quant à l'ampleur de l'opération militaire.
Peu après cette annonce, plusieurs explosions ont été entendues dans les villes ukrainiennes de Kharkiv, Kramatorsk, Kiev ou encore Odessa.
• Un "succès" pour la Russie, des dizaines de morts en Ukraine
Au terme de cette première journée d'invasion, le porte-parole de la défense russe Igor Konachenkov a parlé "d'un succès".
"Toutes les tâches assignées aux groupes de militaires des forces armées de la Fédération de Russie pour la journée ont été remplies avec succès" a-t-il déclaré.
Les troupes russes positionnées dans les régions séparatistes et en Biélorussie ont avancé de plusieurs centaines de kilomètres au cours de la journée, jusqu'à s'approcher en fin de journée de la capitale Kiev, selon les autorités ukrainiennes. Ces dernières ont fait état de plusieurs dizaines de morts parmi lesquels des militaires ukrainiens et des civils, sans donner de bilan officiel à la fin de la journée.
Autre avancée majeure, un aéroport militaire proche de Kiev est tombé aux mains des troupes russes, tout comme la centrale de Tchernobyl, site du pire accident nucléaire de l'histoire en 1986.
• Les réactions des Ukrainiens, entre exode et ruée dans les supermarchés
Pour se protéger des bombardements, de nombreux ukrainiens, notamment à Kiev et à Kharkiv, ont trouvé refuge dans les bouches de métro, construites à plusieurs mètres de profondeur.
Comme lors de tout épisode de guerre, les Ukrainiens se sont aussi rués dans les supermarchés pour faire des réserves d'eau potable et de nourriture, aux abords des banques pour retirer de l'argent, et dans les pharmacies.
D'autres ont préféré faire le choix de l'exode. En témoignent les impressionnantes images d'embouteillages parvenues ce matin de Kiev, où des milliers de voitures étaient bloquées sur les routes aux abords de la capitale.
• De multiples réactions internationales
La journée a aussi été rythmée par les réactions internationales à l'offensive russe. Juste après la déclaration du président russe, son homologue ukrainien a publié un message vidéo sur Facebook dans lequel il a appelé ses ressortissants à ne pas paniquer, et assuré "nous sommes prêts pour tout, nous allons vaincre".
Par la suite, Kiev a décrété la loi martiale, a assuré que "des armes" seront données "à tous ceux qui veulent défendre le pays" et a demandé à la communauté internationale de former "une coalition anti-Poutine" afin de lui venir en aide.
Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, a imploré Vladimir Poutine de rappeler ses troupes "au nom de l'humanité" et la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen a déclaré qu'il sera demandé "au Kremlin de rendre des comptes". Pour le Premier ministre britannique, Vladimir Poutine est un "dictateur" qui "a choisi la voie de l'effusion de sang et de la destruction en lançant cette attaque".
Pour éviter une extension de ce conflit à d'"autres pays européens", contre laquelle a mis en garde le chancelier allemand Olaf Scholz, les forces militaires des Etats de l'Otan ont été placées en état d'alerte et certaines unités vont faire mouvement afin de renforcer les défenses des alliés sur le flanc Est.
Le président américain Joe Biden a affirmé ce soir que les États-Unis défendront "le moindre pouce de territoire de l'Otan", mais n'enverront pas de troupes en Ukraine. Son homologue russe, avec qui il n'a pas prévu de parler, va devenir "un paria sur la scène internationale" a-t-il prévenu avant d'annoncer de nouvelles sanctions économiques contre quatre banques russes.
De nouvelles décisions devraient être annoncées vendredi, à l'issue du sommet de l'Otan.
• "Un acte de guerre" pour Macron qui appelle "une réponse sans faiblesse"
Après avoir convoqué un Conseil de défense jeudi matin, Emmanuel Macron s'est aussi exprimé en début d'après-midi et qualifié l'invasion russe "d'acte de guerre". A cela, "nous répondrons sans faiblesse, avec sang-froid, détermination et unité" a-t-il prévenu, avant de préciser: "les sanctions portées à la Russie seront à la hauteur de l'agression dont elle se rend coupable".
Cet événement aura par ailleurs "des conséquences profondes, durables sur nos vies et la géopolitique de notre continent", a-t-il déclaré, évoquant "un tournant de l'histoire de l'Europe".
Le chef de l'Etat français a fait savoir qu'un message de sa part sera lu au Parlement vendredi et qu'il devrait de nouveau s'adresser aux Français "dans les heures qui viennent". Il recevra successivement vendredi ses prédécesseurs François Hollande et Nicolas Sarkozy pour s'entretenir avec eux de l'attaque russe en Ukraine, a indiqué en fin de journée l'Élysée.
• La Russie n'avait "pas d'autre moyen" pour se défendre, assure Poutine
En fin de journée, Vladimir Poutine a justifié sa décision d'envahir l'Ukraine en expliquant qu'il n'avait "pas d'autre moyen" pour se défendre.
"Ce qui se déroule actuellement relève de mesures contraintes car on ne nous a laissé aucun autre moyen de procéder autrement", a-t-il déclaré lors d'une réunion télévisée avec des hommes d'affaires à Moscou.
"Les risques de sécurité créés étaient tels qu'il était impossible de réagir autrement", a poursuivi Vladimir Poutine, mettant en cause l'intransigeance de Kiev et des Occidentaux sur les exigences de sécurité de la Russie. "Ils auraient pu nous faire courir de tels risques que nous n'aurions pas su comment le pays aurait survécu", a-t-il estimé.