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Viols, pillages, torture... Comment expliquer la violence dont fait preuve l'armée russe?

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Plusieurs éléments historiques et sociétaux peuvent expliquer les exactions et les crimes de guerre dont se rend coupable l'armée de Moscou depuis plusieurs jours.

A mesure que progresse le conflit ukrainien, qui ce mercredi entame son 42e jour, les témoignages des exactions de l'armée russe se multiplient. Exemple le plus marquant, celui de Boutcha, ville située à proximité de la capitale Kiev, où plusieurs centaines de cadavres de civils ont été retrouvés, parfois à même le trottoir, depuis le départ de l'armée de Moscou qui s'est repliée vers l'est du pays. A cela, il faut ajouter les différents témoignages de femmes qui affirment avoir été violées et agressées.

"Les témoignages, s’ils sont avérés, font état de ce qu’on peut appeler des crimes de guerre selon le droit international puisqu’on parle de viols, tortures, homicides volontaires contre des civils", indique sur notre antenne Cécile Coudriou, présidente d'Amnesty International France.

Armée "brutale"

Sur le terrain, les découvertes se succèdent. Auprès de la caméra de BFMTV, un soldat ukrainien ouvre les affaires abandonnées à la hâte par des soldats de Vladimir Poutine, chassés d'une ville située autour de Kiev.

"Probablement qu’on ne les paie pas assez, ils ont pillé des magasins locaux", estime-t-il, arborant des jouets pour enfants dérobés.

Dernièrement, une vidéo montrant un bureau de poste biélorusse, dans lequel les soldats russes envoyaient des colis d'objets pillés, venait corroborer cette accusation. Comment expliquer cette violence au sein de l'armée russe? Michel Goya, consultant défense de BFMTV, rappelle à notre antenne que celle-ci est "brutale" et extrêmement difficile à encadrer.

"C’est une armée brutale. Dans cette armée, il n’y a pas de corps des vieux sous-officiers qui encadrent les choses et qui évitent un certain nombre de conneries. Il y a aussi quelque chose qui s’appelle la Dedovchtchina, la 'loi des anciens'. Les jeunes qui font leur service sont brimés et subissent des bizutages violents de la part de leurs anciens", détaille-t-il.

Des bizutages qui, dans certains cas, ont pu entraîner la mort de soldats russes.

ADN militaire russe

Dans les colonnes de Parisien, Pierre Servent, consultant défense du quotidien francilien, estime que cette violence est une "résultante de cercles de violence inhérents au système russe" qui tiennent, entre autres, au régime même du pays.

"Quand Vladimir Poutine a pris le pouvoir, on a d’abord désigné la Russie comme une démocrature, puis une dictature. Elle devient aujourd’hui un régime totalitaire, créant autour de sa population et plus encore de son armée et sa police un espace mental de violence", estime-t-il.

Selon lui, cette violence de l'armée russe est également une conséquence de l'histoire récente du pays. "C’est l’héritage d’une tradition militaire, soviétique notamment, de violence absolue. Lorsque l’Allemagne nazie et l’URSS se partagent l’est de l’Europe par le pacte Ribbentrop-Molotov en 1939, coupant la Pologne en deux, le NKVD ordonne l’exécution de 22.000 officiers polonais d’active et de réserve", estime-t-il, soulignant que "la violence aveugle est dans l’ADN militaire russe."

Vers d'autres violences?

Que peut-on attendre dans les jours à venir? Selon plusieurs observateurs, de nombreuses scènes comme celle de Boutcha pourraient être découvertes à mesure que les Russes se déplacent vers l'est et le Donbass. D'autant que, pour l'heure, l'invasion de l'Ukraine se transforme en Bérézina pour le Kremlin.

"Ils savent qu’ils ont eu une défaite à Kiev, ils partent avec l’idée de se venger, d’essayer de vaincre. Ils vont sûrement tenter de contourner Kharkiv et ont envie d’en découdre avec le gros des troupes ukrainiennes, les troupes d’élite prises en tenaille autour de Dnipro", affirme, sur notre antenne, Patrick Sauce, spécialiste des questions internationales auprès de BFMTV.

Cette hypothèse est reprise par Pierre Servent, pour qui il convient de rajouter un sentiment de revanche. "Les combats ont été extrêmement âpres, près de l’aéroport d’Hostomel, avec des pertes considérables chez les parachutistes russes. Il a pu y avoir une volonté de vengeance sur les civils, peut-être de la part de mercenaires de Wagner", ajoute-t-il encore. "On peut s’attendre à la découverte d’autres massacres dans d’autres zones", conclut-il.

https://twitter.com/Hugo_Septier Hugo Septier Journaliste BFMTV