Paris convoque l'ambassadeur de Russie après un tweet présentant Boutcha comme un "plateau de tournage"
Dans la nuit de mercredi à jeudi, l'ambassade de Russie en France s'est fendue d'un nouveau tweet mensonger, depuis supprimée, à l'image de la communication déployée par les comptes Twitter officiels rattachés à la Fédération de Russie depuis le début de l'offensive en Ukraine. Le message évoque cette fois un "plateau de tournage" à Boutcha, ville où ont été découverts le week-end dernier des exactions commises sur des civils. À l'ONU, l'ambassadeur russe avait déjà évoqué une "mise en scène" des Ukrainiens pour évoquer les cadavres découverts dans les rues de cette ville de la banlieue de Kiev.
Le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a indiqué ce jeudi qu'il allait convoquer l'ambassadeur de Russie en France Alexeï Mechkov, en lien avec ce tweet.
"Face à l'indécence et la provocation de la communication de l'ambassade de Russie en France sur les exactions de Bucha, j'ai décidé la convocation au Quai d'Orsay ce matin de l'Ambassadeur de Russie. Nous continuerons à lutter contre toutes les manipulations russes de l'information sur la guerre en Ukraine", a tweeté le locataire du Quai d'Orsay.
"Tweet le plus déshonorant de l’année"
Après cette énième provocation de la part de la représentation russe en France, et que la véracité des tueries commises à Boutcha a été établie par une multitude d'organes de presse mondiaux, dont les envoyés spéciaux de BFMTV sur place, l'heure est une nouvelle fois à la condamnation sur le réseau social.
Le secrétaire d'État aux Affaires européennes Clément Beaune a ainsi répondu au tweet.
"Au-delà de la honte, stop".
Un message qui a été relayé sur les comptes Twitter d'Élisabeth Borne, ministre du Travail, ainsi que sur celui d'Aurore Bergé, vice-président du groupe LaREM à l'Assemblée nationale. L'eurodéputée Valérie Hayer, coprésidente du groupe Renaissance, a de son côté indiqué:
"Cette communication donne la nausée. La Russie répondra de ces crimes".
Parmi les autres réponses, la condamnation est là aussi quasi-unanime. "Tweet le plus déshonorant de l’année. Et pourtant il y avait des prétendants", évoque un utilisateur.
La photo partagée par l'ambassade russe, censée montrer un "plateau de tournage" à Boutcha, a bien été prise dans la ville. On y voit plusieurs journalistes, comme le témoigne le message "PRESS" écrit sur leur gilet pare-balles, dont certains prenant en photo un chat perdu au milieu des décombres, avec en arrière-plan la carcasse d'un blindé.
Mais comme l'a démontré le compte @GastonCremieux, la photo ne montre en rien un tournage, mais bien des journalistes documentant les horreurs commises dans la ville après le départ des troupes russes. La photo originale se trouve dans un reportage réalisé par le média ukrainien Vechirniy, accessible ici, et intitulé: "Ils l'ont rasée: à quoi ressemble la rue principale de Boutcha aujourd'hui après des batailles à grande échelle".
Dans l'article, on retrouve bien la photo qui a été relayée par l'ambassade de Russie, mais aussi d'autres prises de vue similaires. On retrouve ainsi sur certains clichés le chat roux, mais aussi d'autres photographies de la carcasse du blindé.
Désinformation à tout-va
Depuis le début de l'invasion russe de l'Ukraine, la Russie redouble d'efforts pour procéder à de la désinformation sur le conflit. Outre les accusations de "mises en scène" à Boutcha, les autorités russes répètent à qui veut bien l'entendre que ce sont les Ukrainiens qui tuent les civils à Marioupol, ou qu'ils utilisent des enfants comme des boucliers humains.
Lundi, la France a renvoyé 35 diplomates russes basés à Paris, "dont les activités sont contraires à nos intérêts de sécurité", comme l'avait indiqué le Quai d'Orsay. Parmi eux, certains ont pu participer à la désinformation commise par les comptes numériques de l'Ambassade, comme l'avait indiqué notre éditorialiste politique internationale Patrick Sauce.