TOUT COMPRENDRE - La grogne des habitants de Shanghaï contre le confinement strict en cours

Shanghai a allégé lundi les restrictions anti-Covid-19 dans certains quartiers, après deux semaines de confinement dans la plus grande ville de Chine. Cet allègement intervient à la suite d'un mécontentement croissant face aux restrictions très strictes qui ont enfermé chez eux 25 millions d'habitants, causé des pénuries alimentaires et contraint des milliers de personnes à l'isolement dans des centres spécialisés.
Les autorités ont annoncé lundi qu'elles autoriseraient progressivement les habitants des zones comptant le moins de contaminations à se déplacer en dehors de leur quartier, bien que l'on ne sache pas exactement combien de personnes pourront sortir de chez elles ni quand.
· Pourquoi ce confinement a-t-il été mis en place?
Un premier confinement par secteurs a été mis en place à la fin du mois de mars à Shanghaï, en raison d'une augmentation des cas dans cette ville. Le nombre de nouvelles contaminations par jour était alors compris entre 3000 et 4000, un chiffre élevé pour la Chine qui pratique la stratégie du Zéro Covid. Il est actuellement de plus de 20.000.
La partie est de la ville était alors confinée pour cinq jours afin de permettre le dépistage de sa population, suivie par la partie ouest pour la même durée. Mais devant la hausse continue du nombre d'infections, un confinement plus strict a été mis en place dès le 1er avril, avec une interdiction de sortir pour tous les habitants, sauf pour se faire dépister.
"Cette stratégie zéro Covid vise évidemment à empêcher toute circulation" de la maladie, explique à BFMTV Antoine Bondaz, chercheur à la fondation pour la recherche stratégique et enseignant à Sciences Po. "Aujourd'hui on est à peu près à 25.000 cas par jour à Shanghaï, c'est énorme selon les standards chinois, même si selon les standards français cela reste extrêmement limité".
· En quoi ces confinements posent-ils problème?
Outre l'agacement face à la répétition des restrictions strictes en Chine ces deux dernières années, les habitants de Shanghaï ont manifesté leur désaccord face au manque de ravitaillement en nourriture ou face à l'accès difficile aux soins. Plusieurs images partagées sur les réseaux sociaux montrent ainsi des quartiers entiers dans lesquels les habitants crient leur colère à la fenêtre, ou vont manifester à l'extérieur en appelant à être fournis en nourriture. Les livreurs sont en effet débordés par les millions de demandes et certains ont du mal à obtenir de quoi manger.
Des vidéos de personnes emmenées de force dans de gigantesques centres d'isolement circulent également, et plusieurs autres scandales sont venus alimenter la colère.
Les autorités de Shanghaï ont ainsi défendu pendant plusieurs jours - avant d'assouplir cette mesure face aux critiques - une politique controversée consistant à séparer les enfants positifs au coronavirus de leurs parents, et de les mettre seuls à l'isolement.
Dans une vidéo vérifiée par l'AFP, on peut aussi voir un fonctionnaire en combinaison intégrale matraquer à mort un chien en pleine rue. Un média local a rapporté jeudi que le comité de quartier avait avoué avoir éliminé l'animal de "peur d'être infecté", admettant qu'il s'agissait d'un acte "irréfléchi". La vidéo a fait le tour des réseaux sociaux, malgré la stricte censure de l'internet en Chine.
Les Français vivant à Shanghaï n'ont, de leur côté, pas obtenu d'autorisation pour sortir aller voter au premier tour de l'élection présidentielle dimanche. Les États-Unis ont, eux, ordonné aux employés non-essentiels de leur consulat sur place de quitter la ville, en raison de l'épidémie en cours, mais aussi de "préoccupations concernant la sécurité et le bien-être des citoyens américains" dans la ville.
· Comment ont réagi les autorités chinoises?
Confronté à la grogne générale de la population, un haut responsable de la mairie, Ma Chunlei, avait concédé dès le renforcement du confinement que les préparatifs étaient "insuffisants".
En quelques jours, plusieurs parcs d'exposition de la ville ont été convertis en centres de quarantaine, des vidéos diffusées par les médias officiels montrent d'innombrables rangées de lits et de cloisons installées dans de grands halls.
Après deux semaines de confinement strict, les premiers allègements ont été annoncés ce lundi. Les autorités ont annoncé qu'elles autoriseraient progressivement les habitants des zones comptant le moins de contaminations à se déplacer en dehors de leur quartier. Des mesures "différenciées de prévention et de contrôle" reflèteront la situation "réelle" sur le terrain, a déclaré lundi un responsable municipal, Gu Honghui.
"La politique chinoise de contrôle des épidémies est scientifique et efficace", a assuré le porte-parole du ministère, Zhao Lijian ce week-end, après l'annonce des États-Unis du départ de ses diplomates. "Nous avons toute confiance dans le fait que Shanghaï et d'autres endroits surmonteront ce cycle de l'épidémie", a-t-il ajouté.
