"Des conditions très défavorables": après la canicule, faut-il craindre un été difficile sur le front des incendies?

Un incendie, débuté dimanche, a parcouru 400 hectares dans l'Aude, entraînant notamment l'évacuation d'un camping et d'habitations. Après de fortes chaleurs, les services météorologiques et de secours craignent de prochaines semaines à risques avec de nouveaux départs de feux.

Un été à risque sur le front des incendies? Après plusieurs jours de canicule sur une large partie de l'Hexagone, 10 départements sont placés par Météo France au niveau dit "élevé" de danger aux feux de forêt ce samedi 5 juillet, tandis que 10 départements sont toujours en vigilance orange canicule. La chaleur de ces derniers jours crée de fait des conditions propices aux feux de forêt, sans que le scénario de l'été ne soit encore écrit.

"On est bien en avance sur la sensibilité (de la végétation) aux feux par rapport à 2023 et 2024", indique à BFMTV.com Guillaume Trichaud, responsable à Météo-France Sud-Est de l'assistance à la prévention et à la lutte des feux de végétations et de forêts.

"La sécheresse et la sensibilité de la végétation aux feux sont élevées autour de la Méditerranée et dans l'Ouest", détaille le prévisionniste, assurant que "pour un mois de juin, les conditions étaient très défavorables" il y a quelques jours.

10 départements au niveau "élevé" de départs de feux

En clair, les conditions sont actuellement propices au départ et au développement de feux de végétation et de forêt. Plusieurs éléments font même que la situation actuelle "ressemble pas mal" à celle de 2022 à la même période, lorsque l'Hexagone avait connu d'importants incendies qui avaient notamment détruit 30.000 hectares de forêts en Gironde.

Parmi les 10 départements classés ce samedi au niveau "élevé" de danger de feux de forêt, on compte 5 départements situés dans la région du Bassin méditerranéen et 5 dans l'ouest du pays, autour de la Loire.

Or, "pour un début de saison, avoir des départements de l'ouest (à ce niveau d'alerte), c'est remarquable", note Guillaume Trichaud.

"Les départs de feux se sont multipliés et notamment les feux de cultures dans le centre-ouest où les moissons ont démarré avec un blé arrivé à maturité qui a séché", indique le responsable chez Météo-France.

Il y a déjà eu un premier feu important dimanche 29 juin dans l'Aude. L'incendie est parti d'un barbecue mal éteint que transportait un commerçant, selon les premiers éléments de l'enquête. Ce commerçant a été mis en examen "principalement pour des faits d'incendie involontaire ayant détruit le massif forestier", a indiqué le procureur de la République de Narbonne Éric Camous, et placé en détention.

Des "conditions très sensibles" aux départs de feux

Globalement, Guillaume Trichaud souligne que "les conditions sont très sensibles" au départ et au développement de feux de végétation ou de forêts en raison "d'une ambiance très chaude et d'une chaleur durable dans le sud et jusque dans la moitié nord".

Et cela en raison des fortes chaleurs qui ont touché la quasi-totalité du pays la semaine passée notamment. Car "à la sortie du printemps, les niveaux des nappes phréatiques n'étaient pas forcément mauvais", note le responsable à Météo-France qui rappelle qu'on sortait de plusieurs mois "pluvieux" d'hiver.

Ces mois d'averses ont cependant conduit à une "recrudescence de la végétation" à certains endroits, "ce qui n'est pas forcément bon, car ensuite on a eu un mois de juin chaud et sec donc avec un assèchement très rapide des sols superficiels".

Un été plus chaud et plus sec que la normale à venir?

Ces éléments étant établis, "les conditions (météo) de ces prochains jours vont accentuer ou pas le danger" de feux, indique Guillaume Trichaud.

À court terme, "il y a une perturbation à venir donc la sécheresse devrait rester dans la dynamique d'accentuation, notamment au sud de la Loire et dans les zones de plaines", indique-t-il.

A quoi sert la météo des forêts?

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S'ajoute à cela qu'"on va avoir la fin de la canicule dans le sud-est après dimanche, mais que les températures vont ensuite remonter" et qu'"en début de semaine prochaine, s'annonce un scénario venté dans le sud donc avec des conditions défavorables pour le développement des feux".

Selon les prévisions à 3 mois, Météo-France établit qu'il y a "60% de chances qu'un scénario plus chaud que la normale se produise" et "50% de chances qu'il soit plus sec que les normales de saison". "Ce sont deux tendances défavorables au contexte des feux", souligne Guillaume Trichaud.

Les pompiers en alerte

Les pompiers sont d'ailleurs en alerte dans plusieurs régions. Pour Éric Brocardi, porte-parole de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France, "le cadre méditerranéen est actuellement très sensible et très disponible à tout embrasement dès lors qu'il y a une flammèche ou un point chaud qui peut se déclencher au bord d'une route", disait-il sur BFMTV le 30 juin dernier.

"Tout le pourtour méditerranéen, depuis maintenant quelques semaines, est sous vigilance extrême de la part des pompiers, des services de l'État au niveau de l'ONF (Office national des forêts NDLR) et de l'ensemble des acteurs de la météo", affirmait-il.

Afin d'éviter des mégafeux comme ceux connus en 2022, les pompiers se préparent, notamment en Gironde, avec désormais une organisation en partie revue. Des groupes d'intervention feux de forêt (GIFF) ont notamment été créés afin "d'intervenir rapidement et de frapper vite et fort", comme l'expliquait dimanche à BFMTV le lieutenant Yann Salmon, chef du GIFF en Gironde.

Un camion des sapeurs-pompiers du GIFF, en Gironde, en juillet 2025. © BFMTV

Certaines communes prennent déjà des mesures. Plusieurs ont ainsi interdit les feux d'artifice par arrêté afin de prévenir le risque d'incendies, notamment en Loire-Atlantique ou en Charente-Maritime, tandis que certains massifs forestiers sont fermés et les travaux interdits, notamment dans les Bouches-du-Rhône, afin d'éviter les départs de feu accidentels.

Des feux largement d'origine humaine

"Cela n'augure pas de la suite", nuance cependant Guillaume Trichaud, qui martèle que "tout n'est pas écrit".

De fait, "9 incendies sur 10 sont d'origine humaine" rappelle le prévisionniste. "Dans la plupart des cas, il survient par imprudence ou par méconnaissance du danger", avec un mégot de cigarette jeté dans la nature ou un feu de camp abandonné mal éteint.

La tendance est toutefois à la hausse du danger de feux de forêts sur le long terme. "En 2022, les feux de forêt avaient touché 90 départements, allant au-delà des régions historiques", rappelle ainsi le prévisionniste à Météo-France.

"Ce n'est pas encore annuel dans certaines régions, mais le risque d'incendie va s'étendre et devenir plus fréquent", estime Guillaume Trichaud, qui souligne que si les relevés météorologiques réalisés "au jour le jour" par l'institut Météo-France varient selon les années, ils "s'inscrivent dans un contexte de changement climatique".

Juliette Desmonceaux