Stéphane Hessel, mort d’un humaniste "indigné"

Stéphane Hessel, militant humaniste, est mort à l'âge de 95 ans. - -
Un humaniste convaincu, militant acharné des droits de l’homme, passionné de politique et de poésie… Les adjectifs et les compliments ne manquent pas pour qualifier Stéphane Hessel, et dont les proches et les personnalités politiques sont nombreux à lui rendre hommage, mercredi. Mort à l’âge de 95 ans, Stéphane Hessel a traversé le chaos du XXe siècle avec une obsession : l'engagement. Une voie qu'il suivra tout au long de ses multiples vie et qui lui ouvrira les portes de la consécration au début du XXIe. Portrait d'un homme jamais résigné.
Un Allemand fasciné par la France
Né à Berlin le 20 octobre 1917, Stéphane Hessel entend parler de la France dès son enfance. Ses parents se sont rencontrés à Paris, son père est écrivain et traducteur de l’allemand vers le français. "Dès le début de ma vie, j’ai été intéressé par la France", explique-t-il sur France Info. Il y arrive en 1925.
Naturalisé français en 1937, il est l’incarnation de l’intellectuel européen : il est reçu à Normale Sup en 1939, il parle français, allemand et anglais. Il est mobilisé en 1939, et rejoint les Forces françaises libres en 1941 à Londres. On l’envoie en France en tant que résistant en 1944. Il y est arrêté et, déporté à Buchenwald puis à Dora, dont il arrive à s’évader. Il débarque en tant que résistant à Paris le 8 mai 1945.
A la Libération, il entre au quai d'Orsay et devient diplomate. Il rejoint le secrétariat général de l’ONU, et participe en tant que secrétaire à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l’Homme.
"Indignez-vous !", un succès devenu mondial
Les droits de l'Homme seront son combat tout au long de sa vie. Au début du XXIe siècle, Hessel prend position publiquement sur des sujets de société. Désormais ambassadeur de France (il est nommé par François Mitterrand en 1981), il milite aux côtés des sans-papiers et devient médiateur lors de l’occupation de l’église Saint-Bernard. Il s'engage aussi politiquement : il est proche de Pierre Mendès-France et de Michel Rocard, qu’il soutient en 1985. Plus tard, il apparaît comme non-éligible sur une liste d’Europe-Ecologie en 2010, et soutient la candidature de François Hollande en 2012.
Son engagement, mais aussi son humanisme, se traduiront dans un livre, devenu best-seller mondial. En octobre 2010, Stéphane Hessel publie Indignez-vous!, un petit livre appelant à la résistance. L’ouvrage est traduit dans 35 langues et sera tiré à plus de 4 millions d’exemplaires. Il inspire le mouvement des Indignés en Espagne, et celui d’Occupy Wall Street aux Etats-Unis. Un succès que son auteur a toujours eu du mal à réaliser.
Les changements mondiaux le passionnent. Il suit avec grand intérêt le printemps arabe et la situation en Grèce, et rêve de voir de son vivant la fin du conflit israélo-palestinien. Il soutient d'ailleurs la cause palestinienne, ce qui lui attire les foudres de plusieurs associations juives. Lors des 50 ans du Traité franco-allemand, il pose un regard distancé sur l’amitié entre les deux pays, et ne manque pas de rappeller l’importance de l’Europe.
S'il est féru de politique, Stéphane Hessel ne cache pas non plus son amour pour la poésie et la philosophie. Il cite aisément Rilke, Spinoza, et prête sa voix à des lectures d'Appolinaire.
Fort de ce bagage, cet homme affable et courtois envisage la fin de sa vie avec une grande sérénité. En témoigne cette réflexion, confiée récemment sur un plateau de télévision : "de toutes les expériences que l’on fait dans une vie, la plus intéressante est la mort. La vie a été belle pour moi. La mort sera plus belle encore."
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