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Patrick Weil: "Nadine Morano est d'une grande ignorance"

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L'historien et politologue Patrick Weil était jeudi matin l'invité de Jean-Jacques Bourdin sur BFMTV et sur RMC. Spécialiste de l'histoire de l'immigration et de la nationalité, il publie Le sens de la République (Grasset).

Invité jeudi matin sur BFMTV et RMC, l'historien Patrick Weil, directeur de recherche au CNRS, se désole du "spectacle que nous donnons depuis janvier, ces divisions, ces affrontements, aussi bien au niveau des intellectuels que des politiques, qui ont perdu le sens de notre histoire. C'est là tout le sens de mon livre".

Qu'est-ce qui définit la République? "D'abord le principe d'égalité", commence Patrick Weil. "Ca fait partie de l'identité de la France: l'égalité devant la loi, sans distinction de race ou d'origine. Deuxième principe, la mémoire de la Révolution. On est connu dans le monde entier pour être des manifestants, on a gardé cette tradition. On a une mémoire positive de notre Révolution. (Troisième principe, Ndlr) La langue française. Enfin on a la laïcité. Tous ces quatre (principes, Ndlr) ensemble, ça nous fait reconnaître dans le monde, et ça nous unit".

L'immigration est-elle une chance ou un danger? "Ce n'est pas une chance, ça voudrait dire qu'on est des nuls, des bons à rien. Non, c'est un fait. Nous en avons eu besoin à la fin du 19e siècle, nous faisions beaucoup moins d'enfants que nos voisins européens. On a donc fait venir, pour faire l'industrialisation de la France, des immigrés qui sont venus de pays voisins. Et puis après la guerre, on a fait venir des migrants, plutôt de nos colonies, et bientôt de nos anciennes colonies". Patrick Weil rappelle que dans l'histoire de France, l'immigration "a toujours été décidée, elle a été choisie".

Nadine Morano est "d'une grande ignorance"

Quand Nadine Morano parle de "la France, pays de race blanche", Patrick Weil voit "le signe d'une grande ignorance de la part de madame Morano, elle ne connaît pas l'histoire de France". L'historien regrette la méconnaissance de "cette part de notre histoire qui était l'empire": "Ceux qui venaient de Guadeloupe ou de Martinique, ce n'était pas des immigrés, ou d'Algérie avant 62, il étaient français! Et quand ils sont arrivés en métropole, ils se sont rendu compte que personne ne les reconnaissait comme français. Parce qu'on n'a pas appris dans nos livres d'histoire, en quoi ils ont fait partie de notre histoire".

Patrick Weil fait une différence entre réfugiés et migrants: "Quand on est réfugié, demandeur d'asile, on est parti pour ne pas mourir. On a fui son pays pour ne pas être tué. Ce n'est pas pareil que de dire 'je ne gagne pas assez, je m'en vais pour gagner plus d'argent', ce n'est pas la même motivation".

Entre intégration et assimilation, l'historien choisit l'assimilation, car "un étranger qui vient s'installer dans un pays d'immigration, il demande à être assimilé, c'est-à-dire traité en semblable". A propos de la théorie du "grand remplacement" de la population française, propagée par l'extrême droite, Patrick Weil rappelle qu'il "n'y a pas de naturalisation à grande échelle. C'est une petite échelle. Il y a des apports".