Meurtre de Laetitia: le procès en appel de Tony Meilhon renvoyé

Dessin d'audience représentant Tony Meilhon à son procès devant les assises de Loire-Atlantique à Nantes. - AFP
MISE A JOUR: Une heure après le début des débats, le tribunal de Rennes a décidé de renvoyer à une date ultérieure le procès de Tony Meilhon, qui comparaît en appel pour le meurtre de Laëtitia Perrais. Les défenseurs de Meilhon demandaient ce renvoi en raison de la" grève totale" des avocats votée lundi par le barreau de Nantes pour protester contre la réforme Macron.
Etranglée, poignardée puis démembrée. C’est le sort qu’a subi Laëtitia Perrais, à peine majeure, en janvier 2011 près de Pornic, en Loire-Atlantique. A partir de mardi, et pour trois semaines, s’ouvre le procès en appel de Tony Meilhon, reconnu coupable en juin 2013 du rapt et du meurtre de la jeune femme.
L'affaire avait marqué les esprits, en raison de la cruauté des actes commis, et de la personnalité hors norme de l’accusé. Mais aussi parce que Nicolas Sarkozy, à l'époque au pouvoir, avait directement mis en cause des défaillances dans le suivi de Tony Meilhon par les conseillers d'insertion à la sortie de son précédent séjour en prison, ce qui avait déclenché une grève des tribunaux français.
Le procès qui s’est tenu en première instance devant les assises de Nantes ne laissait guère de doutes autour du verdict, tant les preuves se sont accumulées contre l’accusé. Dès lors, pourquoi Tony Meilhon a-t-il jugé utile de faire appel?
Peine maximale et rétention de sûreté
Le 5 juin 2013, Tony Meilhon a été condamné à la peine la plus lourde prévue par le droit français: réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période incompressible de vingt-deux ans et d'une mesure de rétention de sûreté.
Ce dispositif pour les criminels les plus dangereux - créé en 2007 par Nicolas Sarkozy, que François Hollande avait promis d’abroger - prévoit que toute demande de remise en liberté sera soumise à un collège d'experts s'ils présentent des risques de récidive. En d’autres termes, il est presque impossible pour Tony Meilhon de sortir un jour de prison.
"Il veut enfin être entendu"
"Il estime qu’il n’a pas été entendu sur sa version des faits, explique son avocat Me Fathi Benbrahim, joint par BFMTV.com. L’organisation judiciaire ne lui a pas permis de s’exprimer, il veut enfin être entendu". Et de menacer de ne pas s'arrêter là. "Si la décision n'était pas juste, que la rétention de sûreté était de nouveau prononcée, avec l'accord de mon client, je me pourvoirais en cassation", a déclaré dimanche l’avocat de l’accusé à l’AFP.
Lors du premier procès, pourtant, l'avocate de la sœur de Laëtitia s’était effondrée en larmes, à l’issue du verdict: "Des peines aussi lourdes sont difficilement compatibles avec l'idée que je me fais de la capacité de chacun à changer, avait-elle alors déclaré, comme le rapporte Libération. S'il avait lâché, s'il avait cessé de raconter une version scénarisée, il n'aurait pas eu une peine comme celle-là."
Il faut dire que les faits sont très lourds. Le 18 janvier 2011, sortant de son travail dans un hôtel-restaurant de la Bernerie-en-Retz, où elle était apprentie, Laetitia Perrais, 18 ans, rejoint Tony Meilhon, alors âgé de 31 ans et sorti de prison un an plus tôt. Le lendemain matin, sa soeur jumelle Jessica découvre le scooter de Laetitia, renversé près de la maison où elles vivent, dans la famille de Gilles Patron, chez qui elles ont été placées par les services sociaux en 2005.
Tony Meilhon est interpellé le surlendemain dans une maison d'une commune voisine, où les gendarmes saisissent une voiture avec des traces du sang de Laetitia. Son corps démembré ne sera retrouvé qu'en deux fois, le 1er février 2011 dans un étang, à Lavau-sur-Loire, et le 9 avril 2011 dans une autre pièce d'eau, à Port-Saint-Père. Laetitia Perrais a été étranglée et poignardée plus d'une quarantaine de fois. En revanche, l'autopsie n'a pas permis de déterminer s'il y avait eu agression sexuelle.
Versions à tiroir
Après avoir refusé de coopérer pour aider les enquêteurs à retrouver le corps, puis tenté de jouer la carte de la folie pour échapper à la justice, Tony Meilhon avait livré lors de son premier procès une version des faits qui n'a pas convaincu. Sans jamais en démordre, il avait assuré avoir poignardé sa victime alors qu'il la croyait déjà décédée après sa chute de scooter.
Puis, racontait Le Monde, Tony Meihlon avait essayé d’impliquer ses meilleurs amis pour tenter de négocier une peine plus basse. Il avait aussi regretté la peine de mort. "Je la mérite", assurait-il.
Devant les jurés, relatait également Libération, il avait reconnu les coups de couteau dans la poitrine de Laetitia, pas ceux plantés dans son dos; le meurtre, mais pas le démembrement; une tentative d'étranglement, mais pas le viol.
"Jessica n’attend rien de la part de Tony Meilhon"
Pour finir, il avait affirmé, sans jamais le prouver, qu'il avait bénéficié de l'aide d'un "Monsieur X..." pour démembrer le corps et en dissimuler une partie. "La justice a entre les mains le nom de M. X, assure Me Fathi Benbrahim à BFMTV.com. En prison, mon client a tenté d’envoyer une lettre à M. X, qui a été saisie. Reste à savoir ce que la justice va en faire..."
"La lueur d'espoir serait venue d'un repenti sincère, avait regretté l'avocate générale, Florence Lecoq, lors du procès à Nantes selon Libération. Tony Meilhon s'est retranché derrière des faux-semblants et des regrets d'opérette pour conserver la satisfaction perverse d'avoir le dernier mot sur son crime."
Jointe par BFMTV.com, Cécile De Oliveira, l'avocate de la soeur de Laetitia, ne se fait aucune illusion. "Jessica n’attend rien de la part de Tony Meilhon. Elle se prépare simplement à faire face à ses habituelles provocations. C’est très angoissant et douloureux pour elle," conclut-elle sobrement.