La mère voilée prise à partie par un élu RN sort du silence: "Ils ont détruit ma vie"

"Ils ont détruit ma vie." La mère de famille violemment prise à partie par un élu RN vendredi dernier lors d'une cette séance publique au conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté est sortie du silence. Dans une interview publiée mardi sur le site du Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF), Fatima E. raconte le "traumatisme" subi par son fils et revient sur la manière dont elle a vécue cette invective, désormais au cœur du débat public.
Les enfants "choqués et traumatisés"
Fatima E. précise d'emblée qu'elle ne devait pas participer à cette sortie scolaire au siège du conseil régional à Belfort, mais que son fils "a insisté" pour qu'elle les accompagne: "Tous ses copains attendaient ma venue", assure-t-elle.
Une fois installée, elle est attaquée verbalement par Julien Odoul, membre du bureau national du RN: "Nous sommes dans une enceinte démocratique. Madame a tout le loisir de garder son voile chez elle, dans la rue mais pas ici. Pas aujourd'hui." A ce moment-là, Fatima E. dit avoir avant tout pensé aux enfants:
"J’étais là sans être là. La seule chose que j’ai vue, c’était la détresse des enfants. Ils étaient vraiment choqués et traumatisés", se souvient-elle.
"J’ai peur de tout"
Tandis que des élus lui apportent son soutien, elle quitte la salle après avoir vu son fils "en train de craquer". La mère de famille affirme avoir subi ensuite une seconde invective, dans les escaliers, par Karine Champy, une ancienne membre du Front national depuis écartée.
"Elle commence à m’attaquer : 'Vous êtes contente ?! Vous avez réussi votre coup ?' Et elle commence à monter les escaliers en criant", relate Fatima E., avant d'ajouter que l'élue d'extrême droite lui aurait dit: "Vous allez voir, on va gagner. Les Russes vont arriver."
Depuis la diffusion de la vidéo sur les réseaux sociaux par Julien Odoul, la mère de famille déclare avoir "une boule au ventre": "J’ai peur de tout. Parfois le visage de cette dame me revient, j’ai des frissons et je tremble. Sincèrement, ils ont détruit ma vie." Son fils, suivi par un psychologue du CCIF, est également sous le choc:
"Par moments, il est là sans être là. Il fixe un point, et c’est comme si son esprit partait. Depuis vendredi, il le fait souvent… Ses nuits aussi sont très agitées."
Une "opinion négative" de la République
Réagissant aux déclarations de Jean-Michel Blanquer, qui a affirmé dimanche sur le plateau de BFMTV que "le voile n’est pas souhaitable dans notre société", Fatima E. estime ces propos "honteux". Elle affirme avoir désormais "une opinion négative de ce qu’on appelle la République."
Des propos qui ne devraient pas éteindre la polémique, alors qu'Emmanuel Macron doit tenir prochainement un discours sur "la lutte contre les communautarismes et la radicalisation", nous a indiqué mardi un proche de l'entourage présidentiel.