Aux urgences, plus de communication pour moins d'erreurs médicales

Communiquer afin d'éviter au maximum les erreurs médicales: c'est le parti qu'ont pris six services d'accueil des urgences en France, dans le cadre d'une étude parue dans la revue américaine JAMA Internal Medicine. Environ 40% des erreurs médicales pourraient ainsi être évitées, grâce à la systématisation de réunions permettant aux urgentistes d'échanger sur les cas de leurs patients.
"Là, ça a duré 15 minutes, on a présenté une vingtaine de malades. Et chaque médecin déroule le plan de prise en charge de son malade, ce qu'on attend et ce qu'on va faire, ça permet de resynthétiser et d'avoir éventuellement le retour de ses collègues", explique à BFMTV le Dr Yonathan Freund, après une de ces réunions aux urgences de la Pitié-Salpêtrière à Paris.
Lors de ces échanges, sur le modèle des transmissions de fin de garde, les médecins se retrouvent deux par deux, voire plus, au moins deux fois par jour pendant une dizaine de minutes.
L'étude, pilotée par le Dr Freund, a été menée dans six services d'accueil des urgences en France, cinq de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (Avicenne, Lariboisière, Hôpital européen Georges-Pompidou, Saint-Antoine et Tenon) et celui du CHU de Grenoble.
1 680 dossiers examinés
1 680 dossiers de patients ont été examinés. Le taux d'erreurs médicales était de 6,4% (54 sur 840 cas) dans le groupe de patients pour lesquels ces réunions de vérifications croisées systématiques et régulières avaient lieu, contre 10,7% (90 sur 840 cas) quand elles n'avaient pas lieu.
Plus de la moitié de ces erreurs étaient ce qu'on appelle des "near miss": des événements indésirables qui auraient potentiellement pu créer un danger mais sont finalement restés sans conséquence pour les patients.
"Le type d'erreurs est très varié: une fracture mal vue à la radio, un malade à qui on met trop de temps à donner des antibiotiques car on n'a pas décelé une infection, une ponction lombaire effectuée alors qu'elle n'était pas justifiée", détaille le docteur Freund à l'AFP.
Auparavant, seuls les cas compliqués étaient étudiés collectivement.
"On parlait aux collègues si seulement on avait l'impression d'avoir un problème, mais là est tout le coeur du problème dans les erreurs médicales: on ne se rend pas compte qu'on va faire l'erreur", expose à BFMTV le Dr Anne-Laure Philippon, médecin urgentiste à la Pitié-Salpêtrière.
Quelques réticences au départ
"Pendant longtemps, on pensait que quand on transmettait un malade à un autre médecin, il y avait un risque de perte d'information", complète pour l'AFP le Dr Freund. En outre, la systématisation de ces réunions peut "entraîner des réticences au départ" dans des services d'urgence déjà saturés de travail.
"Certains urgentistes se demandent s'ils auront le temps. Mais une fois mises en place, les médecins apprécient ces réunions car ils se rendent compte qu'elles améliorent la gestion des urgences, plus efficaces et productives", selon le docteur Freund. Il assure que ces réunions ont perduré dans "la plupart des services" où elles ont été instaurées dans le cadre de l'étude, et plaide pour qu'elles soient systématisées partout.