Virulence, contagiosité, échappement immunitaire... Ce que l'on sait du variant Omicron

Cliché du Sars-CoV-2 au microscope le 28 juin 2021 - Handout / National Institute of Allergy and Infectious Diseases / AFP
Le ministre de la Santé Olivier Véran a annoncé lundi que 25 cas du variant Omicron avaient jusque-là été détectés sur le territoire français. "Il y a plus de 400 cas confirmés à ce stade en Europe", a-t-il déclaré, mais "on considère qu'il y a sans doute plusieurs milliers de cas en circulation et qui sont en passe d'être diagnostiqués". Ce variant du Covid-19, aussi appelé B.1.1.529, inquiète depuis sa détection fin novembre en Afrique du Sud, en raison de sa capacité de diffusion rapide, mais aussi de ses nombreuses mutations.
Si encore beaucoup d'inconnues subsistent concernant le fonctionnement et la virulence de ce variant, de premières informations sont disponibles.
• D'où vient B.1.1.529?
Le variant Omicron "a été signalé pour la première fois à l’OMS en Afrique du Sud le 24 novembre 2021", explique l'Organisation Mondiale de la Santé. Mais, "le premier cas confirmé connu d’infection par le B.1.1.529 a été identifié sur un échantillon prélevé le 9 novembre 2021".
B.1.1.529 a depuis traversé les frontières et selon le dernier recensement de l'OMS, daté du 7 décembre, sa présence a été détectée dans 57 pays, notamment dans toute l'Europe de l'Ouest.

Difficile de savoir pour le moment comment il est apparu. Il pourrait s'être développé chez un patient immunodéprimé, "une infection qui a pu durer plusieurs mois et qui fait que le virus au sein d'un individu a muté jusqu'à accumuler ces trente mutations qui ont fait ce qu'il est aujourd'hui", expliquait mardi dernier sur France Inter l'épidémiologiste Arnaud Fontanet. Il pourrait sinon être passé de l'humain à l'animal, puis avoir fait le chemin inverse après avoir muté, dans un cas de "zoonose inversée".
Il a en tout cas été classé dans la catégorie des VOC - "variant of concern", en français "variant préoccupant" -, ce qui signifie qu'il présente soit une "augmentation de la transmissibilité", soit une "augmentation de la virulence" ou encore une "diminution de l’efficacité des mesures de santé publique et sociales ou des outils de diagnostic, des vaccins et des traitements disponibles".
La particularité de ce variant est qu'il possède beaucoup plus de mutations que les autres. "A ce jour, nous savons qu’il présente 32 mutations, insertions ou délétions de la protéine Spike dont notamment la mutation N501Y qui a été associée à l’augmentation de la transmissibilité des variants alpha, béta et gamma", explique ainsi Santé Publique France.
• Un variant "hautement transmissible"
L'apparition de ce variant a provoqué une certaine panique, notamment en Europe, déjà en proie à une cinquième vague massive de cas de Covid-19 provoqués par le variant Delta. "Le Omicron a l'air quand même plus contagieux que le Delta, en Afrique du Sud il a l'air de le remplacer", a expliqué sur notre antenne Frédéric Adnet, chef des urgences à l'hôpital Avicenne de Bobigny (Seine-Saint-Denis).
Omicron est "clairement hautement transmissible", probablement davantage que Delta, qui est actuellement quasi hégémonique dans le monde, a également déclaré mardi à l'AFP, Anthony Fauci, conseiller de la Maison Blanche sur la crise sanitaire. "Quand un nouveau variant apparaît, il a tendance à être plus transmissible, parce qu'il est en compétition avec les variants précédents", a abondé Michael Ryan, le responsable des urgences de l'OMS, dans un entretien avec l'AFP.
On peut ainsi imaginer qu'Omicron prenne le pas sur Delta, qui est responsable de l'essentiel des infections dans le monde depuis qu'il a été repéré en Inde, fin 2020. Le variant Omicron pourrait devenir majoritaire en Europe "dans les tout prochains mois", avançaient en ce sens des projections publiées la semaine dernière par l'agence de l'Union européenne chargée des maladies. Sur la base de ces modèles mathématiques, "Omicron pourrait causer plus de la moitié des infections provoquées par le virus SARS-CoV-2 dans l'Union européenne d'ici les tout prochains mois".
Mais cette transmission accrue - qui reste encore à prouver et évaluer - "n'a rien à voir avec le fait qu'[Omicron] peut être plus virulent, plus dangereux" souligne Frédéric Adnet.
• Une forme pas forcément plus virulente du Covid-19
"Actuellement, seules des données limitées sont disponibles, ce qui rend difficile l'évaluation de tout changement dans la gravité de la maladie avec le variant Omicron", écrit l'OMS.
Tout ce qui peut être dit jusque-là est qu'il n'a pas été observé d'augmentation de la virulence. "Force est de constater que pour l'instant on n'a pas eu de mortalité liée à cet Omicron et très très peu, voire pas, de patient en réanimation" en France souligne encore Frédéric Adnet. Ainsi, "au 6 décembre, les 212 cas confirmés identifiés dans 18 pays de l'Union européenne - pour lesquels des informations étaient disponibles sur la gravité - étaient asymptomatiques ou bénins", note l'OMS. Et "certains endroits en Afrique australe font état de symptômes plus légers", déclare de son côté Michael Ryan.
Angelique Coetzee, présidente de l'Association médicale sud-africaine, avait parlé fin novembre de "symptômes légers". Outre une "fatigue extrême", les patients atteints d'Omicron qu'elle avait reçus souffraient de courbatures, d'une toux sèche ou "d'une gorge qui gratte", a-t-elle détaillé. Seulement quelques-uns avaient une faible fièvre. "Je ne dis pas que qu'il n'y aura pas de maladies graves" mais "pour l'instant, même les patients que nous avons vus qui n'étaient pas vaccinés ont des symptômes légers", avait-elle déclaré.
"Ce que l'on peut dire c'est que d'un point de vue épidémiologique, ce variant n'a pas l'air plus agressif que les variants précédents", explique Frédéric Adnet, qui appelle toutefois à "beaucoup de prudence dans cette affirmation parce qu'on n'a pas encore de données consolidées".
• Une baisse de l'efficacité du vaccin?
Le seul moyen connu aujourd'hui pour limiter la virulence du Covid-19 sont les vaccins qui permettent de diminuer largement les cas graves en cas d'infection. Mais cette semaine, les résultats d'une pré-étude - encore non publiée - "montrent une fuite [immunitaire] beaucoup plus étendue" avec Omicron.
"Malheureusement, d'après les premières nouvelles qui nous arrivent d'Afrique du Sud, il y a une baisse de l'efficacité du vaccin qui a l'air importante" face au variant Omicron, a expliqué ce mardi sur FranceInfo l'infectiologue Anne-Claude Crémieux. Toutefois, "la baisse de protection est importante, mais elle est partielle. Aujourd'hui nous n'avons pas encore les résultats avec le rappel, il est possible que le rappel nous permette d'avoir une protection contre les formes sévères".
Michael Ryan s'est voulu rassurant sur ce sujet, estimant que les premières informations recueillies en Afrique du Sud "suggèrent que le vaccin semble tenir bon en termes de protection". Il a reconnu que les vaccins pourraient se révéler moins efficaces contre Omicron, mais "il est fort improbable", pour lui, que le variant puisse échapper totalement à la protection conférée par les vaccins.
"Les données préliminaires que nous avons d'Afrique du Sud ne montrent pas que nous avons une perte d'efficacité aux proportions catastrophiques", a-t-il indiqué, et "la meilleure arme que nous ayons actuellement c'est de se faire vacciner", a-t-il répété.
Ce mercredi, les entreprises Pfizer et BioNTech ont assuré que leur vaccin était "toujours efficace" après "trois doses" contre le variant Omicron du virus "s'il a été administré trois fois". Mais ce variant n'est "probablement pas suffisamment neutralisé après deux doses". "Nous allons poursuivre le développement d'un vaccin spécifique au variant Omicron et espérons le rendre disponible d'ici mars au cas où une adaptation serait nécessaire", ont-ils également indiqué.
Outre les vaccins, les scientifiques rappellent l'importance de respecter les gestes barrières, qui restent eux complètement efficaces pour limiter la circulation de ce variant.
