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Vers une génération sans tabac?

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Le nombre de fumeurs a baissé chez les jeunes hommes, mais pas chez les jeunes femmes. Un phénomène que décryptent deux spécialistes pour BFMTV.

La cigarette recule chez les plus jeunes. Entre 2014 et 2017, les fumeurs âgés de moins de 17 ans ont diminué de 23%. "Des mesures de santé publique comme la hausse du prix du tabac, si elle est suffisamment importante, aident beaucoup de gens à se motiver à l'arrêt du tabac, explique à BFMTV Marion Adler, tabacologue et addictologue. Je vois beaucoup de gens en consultation qui me disent: 'vu le prix maintenant du paquet de cigarettes, je me suis décidé à arrêter de fumer'."

Les jeunes femmes arrêtent moins de fumer

Chez les jeunes hommes de 18 à 24 ans, la baisse du nombre de fumeurs est significative et a reculé de neuf points en un an. Mais un autre phénomène inquiète: les jeunes femmes arrêtent moins de fumer. "On le voit avec le cancer du poumon: les femmes ont rattrapé, voire doublé les hommes", regrette pour BFMTV Alain Ducardonnet, médecin et consultant santé pour BFMTV.

"Les jeunes filles utilisent en plus des contraceptifs oraux, ce qui est inquiétant pour la santé cardiovasculaire", remarque pour BFMTV Anne-Laurence Le Faou, responsable du centre d'addictologie de l'hôpital européen Georges-Pompidou à Paris. Selon cette professionnelle, la peur de la prise de poids est un des freins à l'arrêt du tabac. "Or, un traitement bien mené, adapté, permet d'éviter cette prise de poids."

En novembre 2020, le paquet de cigarettes aura grimpé à 10 euros. De quoi permettre de voir émerger une génération sans fumeur? Les hausses de prix y participer grandement, estime Anne-Laurence Le Faou. "Les jeunes ne perçoivent pas encore les conséquences du tabac sur la santé. Tandis que le budget, ils le ressentent au quotidien."

Pas qu'une seule façon de limiter le tabagisme

Une analyse que partage Alain Ducardonnet. "Les jeunes ont besoin d'arbitrer leur vie, notamment par l'argent." Mais selon lui, il n'y a pas qu'une seule façon de limiter le tabagisme.

"Ce qu'il ne faut pas, c'est commencer. On sait que 80% des fumeurs ont démarré avant l'âge de 18 ans. Cela signifie que l'éducation que l'on met en place dans les lycées est extrêmement importante mais aujourd'hui insuffisante." 

Une éducation à la prévention qui fait partie du plan de prévention d'Agnès Buzyn, la ministre de la Santé.

"On touche au porte-monnaie"

Autre priorité, selon Alain Ducardonnet: donner les moyens aux fumeurs d'arrêter. "Le fait de rembourser, comme un médicament, les substituts nicotiniques est un pas extrêmement important. On touche au porte-monnaie et on peut permettre ainsi un sevrage efficace."

C'est une des mesures du plan "Priorité prévention" de la ministre de la Santé. L'Assurance maladie rembourse depuis le 20 mai dernier certains patchs anti-tabac.

Quid de la cigarette électronique? "Elle est évidemment bien moins dangereuse que le tabac parce qu'il n'y a que la nicotine et pas toutes ces substances, comme le monoxyde de carbone, qui peuvent provoquer des maladies", poursuit Alain Ducardonnet.

Première cause de mortalité évitable

Un point de vue que nuance Anne-Laurence Le Faou. Selon cette addictologue, la cigarette électronique est loin d'être le meilleur substitut. Elle dénonce notamment le manque d'études scientifiques sur les composants des arômes et regrette qu'elle n'entretienne l'addiction.

"Ce qu'il faut, c'est arrêter complètement. Or, le message n'est pas encore bien passé. Beaucoup de personnes utilisent la cigarette électronique et fument en même temps. Très souvent, on doit ainsi ajouter un traitement comme les patchs pour éviter que des personnes tirent sans arrêt sur la cigarette électronique."

Le tabagisme reste aujourd'hui la première cause de mortalité évitable, représentant en moyenne 200 décès par jour. D'un point de vue global, le nombre de fumeurs baisse. En un an, la France compte un million de fumeurs en moins.

Céline Hussonnois-Alaya