Covid-19: une cinquième vague est-elle inévitable, malgré la vaccination?
Moins de gestes barrières, immunité vaccinale en baisse, retour du froid… Depuis plusieurs jours, le taux d'incidence du Covid-19 en France accuse une légère hausse qui inquiète les spécialistes. Comment éviter une 5e vague?
Le taux de reproduction est repassé au-dessus de 1, signe que le virus circule à nouveau. Le taux d'incidence est lui repassé au-dessus de 50 au niveau national. "On assiste à une petite poussée du Covid-19", confirmait le ministre de la Santé, Olivier Véran sur notre antenne vendredi, avant de nuancer: "Il n'y a pas d'augmentation des hospitalisations comme à l'automne dernier." Et donc pas d'impact sanitaire à ce stade.
"Il y a beaucoup d'éléments d'inquiétudes", explique cependant Gilles Pialoux, infectiologue, sur BFMTV ce lundi. "Quand vous regardez ce qu'il se passe en Europe, notamment en Europe de l'Est, c'est un élement d'inquiétude."
"Maintenir les gestes barrières"
Car en effet, la situation s'est encore dégradée en Europe, avec plus de 16% des cas de Covid-19 répertoriés la semaine dernière. Afin d'éviter de se retrouver dans la situation dramatique de nos voisins, le professeur Pialoux rappelle la nécessité de "maintenir les gestes barrières". "On n'y arrivera pas s'il y a un abandon des gestes barrières avant l'hiver", martèle le chef du service des maladies infectieuses à l'hôpital Tenon (Paris).
Il est essentiel de continuer à "porter le masque et continuer les précautions d'usage", abonde le microbiologiste Patrick Berche qui voit dans la situation du Royaume-Uni, qui a supprimé toutes les restrictions au début de l'été, un avertissement.
Avec l'abandon du masque et des précautions sanitaires ainsi qu'une campagne vaccinale précoce (dont les effets s'érodent aujourd'hui), les britanniques recensent chaque jour dix fois plus de nouveaux cas de Covid-19 que nous. Malgré une couverture vaccinale équivalente à celle de l'hexagone, 130 personnes sont mortes par jour en moyenne mi-octobre.
La troisième dose, une partie de la solution
Car six mois après l'inoculation de la deuxième dose, "l'immunité baisse, surtout chez les personnes fragiles et les personnes de plus de 65 ans", rappelle l'ancien directeur général de l'institut Pasteur sur notre antenne. C'est pour cette raison que Patrick Berche incite la population fragile concernée à bénéficier d'une troisième dose au plus vite.
"Il faut booster le rappel de vaccination des personnes âgées et fragiles, ça avance mais pas suffisamment vite", a déclaré le ministre de la Santé vendredi dernier alors qu'un peu plus de 2 millions de personnes en ont déjà bénéficié. "On est monté en cadence puisqu'on approche les 100.000 troisièmes injections par jour, on est au-dessus en termes de dynamique que la plupart de nos voisins mais ça ne suffit pas", a ajouté Olivier Véran, lançant un appel aux Français concernés.
"La troisième dose est une partie de la solution", acquiesce Gilles Pialoux qui se félicite de l'engouement vaccinal. Pour l'instant, un rappel pour toute la population n'est cependant pas nécessaire, d'après le professeur Berche qui note: "On a la chance d'avoir une population vaccinée à 85%, les 15% qui restent, il faut les convaincre."
Vacciner les plus de 80 ans
À ce sujet, le membre de l'académie de médecine précise que beaucoup de plus de 80 ans "n'ont pas accès à la vaccination". "Il faut aller au-devant de ces personnes avec leur médecin traitant voire faire de la vaccination à domicile", conseille Patrick Berche qui ne voit cependant pas d'urgence à faire vacciner les enfants de moins de 12 ans.
En revanche, d'autres facteurs risquent d'accentuer la reprise épidémique comme l'arrivée du froid, que nos voisins allemands ont subi de plein de fouet, mais aussi le retour des autres virus de l'hiver.
"Contrairement à l'hiver dernier, les autres pathologies hivernales arrivent", s'alarme Gilles Pialoux qui estime qu'aujourd'hui "on a plus un problème de vague, mais plutôt un problème de digue: est-ce que l'hôpital public va tenir?"
L'épidémiologiste Arnaud Fontanet se veut cependant rassurant. L'efficacité vaccinale contre les formes graves "se maintient à 90%" avec "six à huit de mois de recul", ce qui devrait fortement décharger les hôpitaux. Grâce aux doses de rappel qui divisent "par dix le risque d'infection et par vingt le risque d'hospitalisation", la France va "pouvoir échapper" à une saturation des hôpitaux cet hiver, malgré la légère reprise de l'épidémie, assure-t-il.