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Covid-19: faut-il craindre l'arrivée de nouveaux variants avec l'explosion des cas en Chine?

Test de dépistage anti-Covid dans le district de Huangpu à Shanghai, le 19 décembre 2022.

Test de dépistage anti-Covid dans le district de Huangpu à Shanghai, le 19 décembre 2022. - Hector RETAMAL / AFP

Plusieurs pays et experts craignent que la Chine ne devienne un terrain fertile pour l'émergence de nouveaux variants, alors que Pékin ne communique plus de chiffres ou d'informations sur la situation épidémique dans le pays.

Plusieurs pays ont décidé de mettre en place des restrictions pour les voyageurs venant de Chine, notamment en leur imposant des tests de dépistage. "Cette mesure s’avère indispensable pour garantir la surveillance et l’individualisation d’éventuels variants du virus dans le but de protéger la population italienne", a déclaré le ministre italien de la Santé Orazio Schillaci dans un communiqué.

En effet, la Chine connait une flambée épidémique inédite depuis que Pékin a mis fin à sa politique "zéro-Covid" et cette situation fait craindre l'émergence de nouveaux variants pouvant entraîner de nouvelles vagues épidémiques.

1,4 milliard de personnes soudainement exposées au virus

Selon le Global Virus Network, depuis la levée des restrictions début décembre, au moins 250 millions de personnes ont été infectées par le Covid-19 en Chine. Jusqu'à récemment, ce sont 660 millions d'individus dans le monde qui avaient contracté le virus depuis le début de la pandémie. La circulation actuelle du virus en Chine est extrêmement rapide.

Une situation favorable à l'émergence de variants. Comme le rappelle sur BFMTV Antoine Flahault, épidémiologiste et professeur de santé publique à l'université de Genève, depuis le début de la pandémie, à chaque fois que le virus se réplique de manière virulente dans une population, cela entraîne des mutations et la sélection de variants lorsque ceux-ci sont plus transmissibles. Ils peuvent ensuite s'imposer comme le variant dominant.

"Ça s'est passé en Angleterre, dans le Kent où il y a eu le variant Alpha, en Inde où il y a eu Delta ou en Afrique du Sud avec Omicron", détaille-t-il.

En somme, chaque nouvelle infection augmente les chances que le virus mute. "Le fait que 1,4 milliard de personnes soient soudainement exposées au SARS-CoV-2 crée évidemment des conditions propices à l'émergence de variants", ajoute Antoine Flahault.

Faible immunité en Chine

Toutefois, selon Marion Koopmans, virologue au centre médical Érasme, aux Pays-Bas, l'absence d'immunité collective en Chine pourrait y faire obstacle. En effet, les Chinois sont très peu vaccinés et ont peu été en contact avec le virus,en raison des mesures de restriction drastiques dans le pays depuis 2020.

Or, l'un des principaux déclencheurs de l'évolution virale est la nécessité pour le virus d'échapper à l'immunité humaine. C'est cette pression immunitaire qui pousse un virus à évoluer afin d'échapper aux anticorps. En Chine, il n'y a quasiment pas d'immunité.

"Si l'immunité n'est pas très étendue, la pression de sélection (sur le virus) n'est pas très forte", explique Marion Koopmans à STAT. "Cela pourrait donc jouer contre la sélection de nouveaux variants".

Le virus évolue surtout pour maintenir sa capacité de transmission. En Chine, elle est encore très forte à cause à cause du faible taux de vaccination, notamment chez les plus âgés.

Les Occidentaux protégés contre les sous-variants d'Omicron

Malgré cette configuration singulière, de nouveaux sous-lignages du variant Omicron ont été détectés récemment en Chine. C'est notamment le cas du BF.7, sous-lignée de BA.5 qui est devenue majoritaire à Pékin au début du mois et qui porte une forte contagiosité.

"Mais on peut tout à fait imaginer que le bouclier immunitaire qu'on a actuellement en France permettra de nous protéger quand même, au moins des formes graves", explique sur BFMTV Philippe Amouyel, épidémiologiste et professeur de santé publique.

En effet, aujourd'hui, des vaccins bivalents, c'est-à-dire mis à jour pour cibler la souche initiale du virus mais également Omicron, sont utilisés pour les rappels de vaccination anti-Covid. "Ils ont une grande efficacité sur les sous-variants d'Omicron", explique Benjamin Davido, infectiologue à l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches.

Ainsi, les dérivés d'Omicron qui pourraient émerger de Chine pourraient venir s'ajouter à ceux qui sont déjà existants et ne représenteraient pas un fort danger pour la population occidentale bien immunisée.

Déficit d'information de la Chine

Le risque demeure si un variant échappant à cette immunité se développait et aurait ainsi le potentiel pour devenir dominant et donc provoquer de nouvelles vagues de contamination.

En outre, cela pourrait se produire sur un temps plus long, une fois que la population chinoise aura développé une certaine immunité. C'est notamment face à cette éventualité que plusieurs pays et experts appellent à des tests de dépistage à tous les passagers en provenance de Chine.

"L'intérêt premier c'est de palier le déficit d'information qu'on a au niveau de la Chine, qui ne communique plus ses chiffres", explique Philippe Amouyel.

Tester et faire du séquençage permettraient ainsi de contourner tout retard dans les informations venant de Pékin et donc d'identifier rapidement si un nouveau variant émerge.

Le 26 décembre, les 120 passagers d’un vol Pékin-Milan se sont soumis à des tests anti-Covid mis à disposition par la région Lombardie, épicentre des contagions en Europe début 2020: plus de la moitié se sont révélés positifs.

Salomé Robles