Robert Badinter au Panthéon: quels sont les critères pour y entrer?

Emmanuel Macron et Robert Badinter le 9 octobre 2021 au Panthéon, pour les 40 ans de l'abolition de la peine de mort. - Ian LANGSDON / POOL / AFP
"Aux grands Hommes, la patrie reconnaissante". Gravée sur le fronton du Panthéon, cette inscription honore les femmes et les hommes marqueurs de l'histoire de France que ce haut lieu de mémoire abrite.
Ce jeudi 9 octobre, jour d'anniversaire de l’abolition de la peine de mort, Robert Badinter, fervent porteur de cette loi promulguée en 1981, entrera au Panthéon. Il s'agira de la cinquième panthéonisation présidée par Emmanuel Macron, après celles de Simone Veil, Maurice Genevoix, Joséphine Baker et Missak Manouchian, accompagné de son épouse Mélinée et de ses camarades.
"Votre nom devra s’inscrire aux côtés de ceux qui ont tant fait pour le progrès humain et pour la France", avait déclaré le président de la République lors de l'hommage national rendu à l'ancien avocat, le 14 février 2024.
En fin d'après-midi, l'ancien ministre de la Justice sous François Mitterrand rejoindra à son tour les quelque 80 personnalités célébrées dans ce temple de l'histoire de France.
À qui revient la décision de panthéonisation?
Initialement, en 1791, "c'est l’Assemblée Constituante, à l’origine de la création du Panthéon, qui effectue le choix des personnalités dignes de recevoir les honneurs de la République", précise le site officiel du monument historique. Le processus de décision évolue quelques années plus tard, lorsque Napoléon Bonaparte s'octroie ce droit au cours du Premier Empire (1804-1815).
"À l’époque napoléonienne, la moitié des personnalités inhumées dans la crypte sont des dignitaires de l’Empire, aujourd’hui largement méconnus pour la plupart", explique le Panthéon.
Le Parlement et ses députés prendront à nouveau le relais pendant les IIIe et IVe Républiques, avant que la décision de panthéonisation ne relève du président français à partir de 1958, année du début de la Ve République.
Désormais, c'est au seul chef de l'État que revient la décision d'entrée au Panthéon. Avec cinq panthéonisations, en comptant celle de Robert Badinter, Emmanuel Macron se place juste derrière François Mitterrand, recordman de la Ve République avec sept cérémonies. Les deux hommes devancent très largement Georges Pompidou et Valéry Giscard d'Estaing, qui n'ont jamais usé de ce droit régalien.
Incarner "les valeurs de la République"
En tout premier lieu, pour qu'une personnalité soit panthéonisée, il faut qu'elle "ait incarné de manière exemplaire, par ses écrits, ses engagements ou ses actions, les valeurs de la République", précise le monument sur son site officiel.
De surcroît, il est obligatoire que la personnalité, à travers ses propos ou par l'intermédiaire de sa famille, approuve "le principe d’une entrée au Panthéon".
En 2009, par exemple, lorsque Nicolas Sarkozy a émis l'idée de transférer Albert Camus au Panthéon, le fils du philosophe, Jean Camus, s'y est opposé, craignant une "récupération politique". Pour Charles de Gaulle, la situation est encore différente, puisque c'est l'ancien chef de l'État lui-même qui a refusé d'entrer au Panthéon avant sa mort, son souhait étant de reposer à Colombey-les-Deux-Églises.
"Après l’annonce officielle d’une panthéonisation par le président de la République, la cérémonie d’entrée au Panthéon se prépare intensément, en trois mois environ", expose le site web du lieu de mémoire français.
En ce qui concerne le caractère purement administratif, la panthéonisation "n'est définie par aucun texte", est-il expliqué sur le site Internet du monument. C'est-à-dire que l'entrée d'une personnalité au sein du monument dépend quasi exclusivement de l'appréciation du président de la République.
La famille de Charb demande une panthéonisation
Alors que Robert Badinter fait son entrée dans le monument de la montagne Sainte-Geneviève, un autre nom émerge ces derniers jours. En début de semaine, la famille de Charb a demandé à ce que le dessinateur de Charlie Hebdo, tué dans les attentats terroristes contre la rédaction du journal satirique en 2015, entre au Panthéon.
Cette panthéonisation "graverait dans le marbre de notre République l’attachement viscéral du peuple français à la liberté d’expression", écrivait Riss, le directeur de la publication de l'hebdomadaire, dans son édito daté du mercredi 8 octobre. La décision en revient désormais au président Emmanuel Macron.