"Submersion" migratoire: le PS suspend les négociations budgétaires après les propos de Bayrou

Des propos qui poussent le PS à arrêter net les discussions. Après une vive passe d'armes entre François Bayrou et le président des députés socialistes à l'Assemblée nationale sur "le sentiment de submersion" migratoire évoqué par le Premier ministre lors d'une interview, le parti à la rose a décidé de suspendre les négociations budgétaires avec le gouvernement.
Les socialistes étaient attendus ce mardi soir à Bercy pour finaliser un accord avec le ministre de l'Économie sur le budget de l'État.
Une remise en cause de l'accord avec Bercy
Ce retrait des discussions a des allures de très mauvaise nouvelle pour Matignon. Après des jours de négociations avec Éric Lombard, le ministre de l'Économie, les députés PS avaient accepté mi-janvier de ne pas censurer François Bayrou, au grand dam de La France insoumise.
Inquiets après le vote du budget de l'État au Sénat et la réduction de plusieurs lignes de crédit, du budget des Sports à celui de l'Enseignement supérieur, les socialistes avaient été rassurés par les propos de François Bayrou ce lundi soir sur LCI.
Il avait ainsi confirmé qu'il n'y aurait pas de suppression des 4.000 postes d'enseignants dans le budget 2025, "une décision définitive". De quoi rassurer le PS alors que les sénateurs avaient sanctuarisé la suppression de 2.000 postes.
Mais dans la même émission, le Premier ministre a évoqué un "sentiment de submersion" migratoire, provoquant un tollé à gauche.
Polémique à gauche sur "le sentiment de submersion" migratoire
Interpellé par les socialistes lors des questions d'actualité au gouvernement ce mardi, le centriste a persisté et signé, évoquant "des mots adaptés à la réalité".
Sous les applaudissements des députés RN, le patron du Modem a jugé que "toute une communauté de départements français" était "confrontée à des vagues d'immigration illégale telles qu'elles atteignent 25% de la population".
"Si vous gouvernez avec les préjugés de l'extrême droite, nous finirons gouvernés par l'extrême droite", lui a répondu Boris Vallaud.
Les propos du locataire de Matignon ont manifestement touché une ligne rouge pour les socialistes qui ont annoncé quelques dizaines de minutes plus tard leur réunion prévue cette après-midi à 16h avec Bercy.
Cet échange devait permettre au gouvernement de s'assurer que le PS soutiendrait un accord sur le budget de l'État jeudi à l'Assemblée au sein de la commission mixte paritaire, cet organe qui réunit sénateurs et députés.
Le spectre d'une motion de censure
En cas d'accord, ce budget, au point mort depuis la chute de Michel Barnier en décembre, devait arriver à l'Assemblée lundi et être adopté. Mais sans accord, le texte pourrait repartir de zéro - une catastrophe pour François Bayrou.
L'hypothèse est cependant peu probable. La commission mixte paritaire compte 4 parlementaires de gauche et 2 RN sur 14 élus. De quoi permettre au gouvernement sur le papier d'obtenir un accord.
C'est surtout lundi lors du vote dans l'hémicycle que François Bayrou risque de se retrouver sans les 288 voix nécessaires pour faire adopter son budget si les socialistes et le RN décident de voter contre. Les insoumis et les écologistes ont déjà fait savoir de leur côté leurs intentions de le rejeter.
"La porte reste toujours ouverte"
De quoi pousser François Bayrou à dégainer alors la cartouche du 49.3, cet article de la Constitution qui permet de faire adopter un texte sans vote.
La manœuvre permettrait ensuite aux oppositions de déposer une motion de censure. Si la gauche la votait dans son ensemble avec les députés RN, le Premier ministre tomberait dans la foulée et, avec lui, le budget de l'État.
"La porte reste toujours ouverte de notre côté. La décision est entre leurs mains", a défendu de son côté un proche de François Bayrou auprès de BFMTV.