"Nous n'avons pas été assez réactifs": la crise du carburant sème la zizanie au sein du gouvernement

Emmanuel Macron et les membres du gouvernement d'Elisabeth Borne, lors du conseil des ministres du mercredi 24 août 2022 - MOHAMMED BADRA / POOL / AFP
Un dossier qui met le gouvernement dans l'embarras. Le 5 octobre dernier, le porte-parole du gouvernement Olivier Véran assurait qu'"il n'y avait pas de pénurie de carburant, mais seulement des tensions temporaires d'approvisionnement". Le lendemain, la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier Runacher envisageait une sortie de crise "dans les 2 à 3 jours."
Or, une semaine plus tard, la situation s'est clairement empirée et les critiques fusent quant à l'inaction initiale du gouvernement. "Nous n'avons pas été assez réactifs, nous avons laissé les gens paniquer", reconnaît un ministre en coulisses auprès de BFMTV. Un proche du président abonde: "on aurait pu interdire les jerricans et débloquer les stocks stratégiques beaucoup plus vite".
À l'Élysée, Emmanuel Macron commence quant à lui à montrer son impatience, voire son agacement. "Il n'a pas apprécié la gestion du dossier", poursuit ce proche.
Un gouvernement divisé
Et le planning gouvernemental ne va pas faciliter la situation. Le dimanche suivant, la moitié de l'exécutif, dont Élisabeth Borne, s'envole pour l'Algérie en pensant que la situation s'améliorerait ou se stabiliserait dans les 24 heures.
C'est l'inverse qui se produit et la Première ministre doit convoquer une réunion à Matignon avec les 4 ministres concernés: Gérald Darmanin, Olivier Véran, Clément Beaune et Agnès Pannier-Runacher (en visio en raison de son Covid).
Dans ce huis-clos de la rue de Varenne, les avis divergent. D'un côté, le ministre de l'Intérieur et le porte-parole du gouvernement plaident pour aller vite et fort afin de débloquer la situation, notamment avec des réquisitions.
De son côté, la cheffe du gouvernement et le ministre des Transports plaident pour ne pas brusquer les choses. "Élisabeth Borne reste fidèle à sa méthode: le respect du dialogue social", rappelle son entourage.
"Nous avons beaucoup oeuvré en coulisses pour mettre la pression aux entreprises concernées, même si ça ne se voit pas forcément". Un ministre abonde: "C'est facile maintenant de refaire le film. Si on avait fait des réquisitions plus tôt, on nous aurait accusé de piétiner les syndicats".
Méthode Coué?
Le même jour, en déplacement à Mayenne, le chef de l'État reprend le dossier en main. "Le blocage n'est pas une façon de négocier", estime Emmanuel Macron. Le lendemain, Elisabeth Borne annonce les réquisitions de salariés grévistes pour débloquer des stocks de carburants et ravitailler des stations-service en carburant. Mais rien n'y fait, la situation s'enlise.
Résultat: l'opinion publique juge sévèrement cette séquence. Dans notre sondage Elabe publié ce mercredi, 79% des Français considèraient que le gouvernement n'était pas à la hauteur sur ce dossier.
Mercredi soir sur France 2, le président de la République a promis un retour à la normale "dans le courant de la semaine qui vient". Simple prédiction ou méthode Coué? Réponse d'un conseiller ministériel: "je ne vois pas comment on peut s'en sortir rapidement."