BFMTV
Politique

"Notre maison brûle": comment Jacques Chirac a participé à la prise de conscience écologique

Jacques Chirac le 3 février 2007, lors d'une conférence pour une "gouvernance écologique mondiale"

Jacques Chirac le 3 février 2007, lors d'une conférence pour une "gouvernance écologique mondiale" - Patrick Kovarik - AFP POOL - AFP

À une époque où la crise écologique n'était pas au centre des préoccupations, Jacques Chirac, mort ce jeudi, a fait plusieurs déclarations fortes sur le sujet, notamment son cri d'alarme - "Notre maison brûle" - face à la dégradation de l'environnement.

"Notre maison brûle et nous regardons ailleurs". Le 2 septembre 2002, Jacques Chirac marquait l'assemblée plénière du IVe Sommet de la Terre à Johannesburg (Afrique du Sud), en se lançant dans une vive critique de l'indifférence des habitants de la planète face aux problèmes environnementaux.

"Notre maison brûle, et nous regardons ailleurs. La nature, mutilée, surexploitée, ne parvient plus à se reconstituer, et nous refusons de l'admettre", avait-il alors lancé. "L'humanité souffre. Elle souffre de mal-développement, au Nord comme au Sud, et nous sommes indifférents. La Terre et l'humanité sont en péril, et nous en sommes tous responsables".

Cette "phrase au sommet de Johannesburg a quand même quelque part provoqué un électrochoc mondial", rappelle sur BFMTV Nicolas Hulot, ex-ministre de l'Environnement, qui était présent à cet événement en Afrique du Sud. C'est "un point de référence" dans l'histoire selon lui.

Dans le domaine de l'écologie "il faut reconnaître quand même que [Jacques Chirac] a été, notamment à l'international, un éveilleur", continue Nicolas Hulot, qui fut le conseiller environnement du président Chirac.

La Charte de l'environnement en 2005

Au niveau national, le président de la Fondation Hulot rappelle également que Jacques Chirac est à l'origine de la Charte de l'environnement. Ce texte a été intégré en 2005 à la Constitution française et impose "que la préservation de l'environnement doit être recherchée au même titre que les autres intérêts fondamentaux de la Nation".

Il impose notamment un "principe de précaution" en matière d'environnement. Cela signifie que "lorsque la réalisation d'un dommage pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement", les responsables locaux doivent agir pour parer à de potentiels dégâts écologiques.

Il s'agit d'une des seules avancées nationales de Jacques Chirac en matière d'Écologie. Pour rappel, en 1995, à peine élu, Jacques Chirac avait provoqué une onde de choc et fait hurler les écologistes de l'époque en annonçant la reprise des essais nucléaires français dans le Pacifique, auxquels François Mitterrand avait mis fin en 1992.

Mais "compte tenu de l'époque, où les sujets [écologiques] étaient encore à la marge de notre conscience - la science ne les avait pas encore validés, les faits n'étaient pas là, sa culture politique probablement l'éloignait de ces sujets - il a fait un grand pas", fait valoir Nicolas Hulot.

La crise écologique, le "défi majeur du XXIe siècle"

"Ces premières étapes étaient essentielles parce qu'il fallait bien qu'une dynamique diplomatique démarre", abonde Nicolas Hulot, pour qui Jacques Chirac a franchi des "étapes significatives" dans le domaine de l'environnement.

Dès 2001, le président français avait plaidé pour la création d'une Organisation des Nations unies pour l'environnement, dans un discours sur l'écologie à Orléans, dans lequel il demandait par exemple à ce que soit appliqué le principe de précaution avec les OGM (Organismes génétiquement modifiés). Il avait réitéré cette demande, aux côtés d'une quarantaine de pays en 2007, lors de "l'appel de Paris".

Quelques semaines plus tard, dans son discours d'adieu aux Français en mars 2007, alors qu'il annonce qu'il ne se présentera pas pour un troisième mandat à l'Élysée, Jacques Chirac rappelle encore une fois la nécessité de se préoccuper de l'environnement en alertant sur la crise écologique, qu'il qualifie de "défi majeur du XXIe siècle".

"Si nous ne parvenons pas à concilier les besoins de croissance de l'humanité et la souffrance d'une planète à bout de souffle, nous courrons à la catastrophe", déclare-t-il. "C'est une révolution dans nos esprits, tout autant qu'à l'échelle mondiale qu'il faut mener pour concevoir un nouveau mode de relation avec la nature et inventer une autre croissance".

Salomé Vincendon