Mélenchon veut la tête du "prince" Macron

Jean-Luc Mélenchon - BORIS HORVAT / AFP
"Emmanuel Macron a dit qu'il était jupitérien. Il y a un vieil adage latin qui dit: Jupiter rend fou ceux qu'il veut perdre. Cet homme va finir par croire qu'il est capable de marcher sur les eaux." C'est pourtant ainsi que le représente le journal The Economist en Une ce vendredi, au grand dam de Jean-Luc Mélenchon, auteur de cette charge ironique sur notre antenne.
"Je refuse d'acclamer le nouveau prince", lance à longueur de campagne le tribun de gauche, qui se rêve, s'il est élu député dimanche à Marseille, en principal opposant au chef de l'Etat à l'Assemblée nationale. Pourfendeur d'une "Ve" dont la dimension personnelle contribue pourtant à son succès, Jean-Luc Mélenchon souhaite, comme François Mitterrand avant qu'il n'endosse l'habit de président, mettre à bas la "monarchie républicaine".
Mobiliser la gauche contre un pouvoir hégémonique
Si la dénonciation sur RTL d'un "culte de la personnalité" par Jean-Luc Mélenchon, dont le mouvement France insoumise transpose au sein de la gauche radicale l'idée gaullienne de "la rencontre d'un homme et d'un peuple", revêt un caractère ironique, le choix de cet angle d'attaque répond à un double impératif politique. D'une part, mobiliser l'électorat de gauche pour le second tour des législatives en agitant le spectre d'un pouvoir absolu, d'autre part, casser au plus vite la dynamique d'état de grâce du président de la République, néfaste pour le camp insoumis dans l'optique d'une guérilla contre la loi Travail et la "normalisation" de l'état d'urgence.
"Je dis aux gens qui m'écoute: 'permettez qu'il y ait une opposition humaniste, écologique et sociale'. La démocratie sociale va continuer. Si vous croyez que les travailleurs de ce pays et les salariés d'une manière générale vont se laisser tondre, simplement parce que tous les hebdomadaires du pays publient la photo souriante du jeune prince, vous rêvez!", lance l'ancien sénateur socialiste sur Europe 1 ce vendredi.
Attaquer la légitimité d'Emmanuel Macron
Avec ces attaques, Jean-Luc Mélenchon cherche d'abord à remettre en cause la légitimité politique du président de la République pour mener ses réformes. Interrogé sur les législatives, le quatrième de la présidentielle affirme ainsi :
"Le vrai problème, ce n'est pas le nombre d'élu qu'aura le Front national par rapport à la France insoumise, c'est de savoir comment quelqu'un, avec 14% des inscrits, peut avoir 70% des sièges, et comment il se fait que si nous étions à la proportionnelle, nous aurions eu 80 sièges, et que là nous sommes en train de ramer de toutes nos forces pour arriver à en avoir 15. Ça c'est le système d'institutions pyramidales, qui donne tous les pouvoirs à la monarchie présidentielle."
Au soir du premier tour des élections législatives, Jean-Luc Mélenchon estimait ainsi que "l'immensité de l'abstention montre qu’il n’y a pas de majorité pour détruire le code du travail, ni pour des lois liberticides, pour l’irresponsabilité écologique ou pour cajoler les riches, toutes choses qui apparaissent au programme du président".
Si Jean-Luc Mélenchon prédit que la vague "dégagiste" atteindra aussi Emmanuel Macron, le chef de l'Etat semble pour l'heure en passe de solidement s'amarrer au pouvoir. Dimanche soir, il pourrait disposer d'une Assemblée à la botte de son parti, La République en marche, sans même avoir besoin de l'allié centriste qu'est le MoDem. De sorte qu'il est peu probable qu'Emmanuel Macron rompe avec la pratique présidentielle adoptée depuis le début du quinquennat, fondée sur le contrôle et la rareté de la communication, pour descendre dans une arène où il n'a que des coups à prendre. Une leçon retenue d'un autre "Jupiter": un certain François Mitterrand.