"Si tu romps cet accord, tu porteras la responsabilité": vers une guerre des chefs à droite entre Wauquiez et Retailleau?

Les bons films ont - en règle générale - droit à leur remake. Il en va ainsi de la guerre des droites, qui pourrait connaître un nouvel épisode, avec Laurent Wauquiez et Bruno Retailleau dans le rôle des belligérants.
Les deux hommes ont dîné ensemble mardi 4 février dernier. L’occasion pour le président du groupe Droite Républicaine à l’Assemblée nationale de mettre en garde le ministre de l’Intérieur: "Il y a avait un accord entre nous, à toi d'incarner la droite au gouvernement, à moi de reconstruire notre famille politique."
Et le même de poursuivre, selon son entourage à BFMTV: "Si tu romps cet accord, tu porteras la responsabilité d'allumer une guerre des chefs qui sera dévastatrice." Derrière cette rivalité confirmée par plusieurs de nos interlocuteurs, l’enjeu de la prise de contrôle du parti... et d’une candidature pour la présidentielle de 2027.
"Retailleau est devenu incontournable"
À ce stade, ni l’un ni l’autre n'a fait acte candidature. Mais pour un ministre de droite, cela ne fait aucun doute: "Prendre le parti? Il le souhaite. Il est assez populaire auprès des militants."
Principal défaut: cette popularité ne dépasse pas le cadre des adhérents - toujours moins nombreux - aux Républicains. "Wauquiez n’a pas tellement prospéré depuis son retour à l’Assemblée, ni en influence, ni en popularité", note un membre du gouvernement.
"Laurent Wauquiez a certainement à trouver le lien avec les Français. C’est son principal défi", reconnaît un cadre du parti, qui entretient de bonnes relations avec lui, mais pour qui "Retailleau est devenu incontournable."
Vers un duel "d'une violence inouïe"?
"Les militants ont trouvé un héros, un poulain, un challenger… C’est Fillon sans l’argent", s’amuse un centriste. Confirmation du côté d’un ministre de droite: "Auprès des adhérents qui étaient partis, et qui regardaient côté RN, Bruno peut faire revenir des gens !"
"Il a intérêt à prendre le gain tout de suite, lui conseille un autre membre du gouvernement. Dans six mois, il ne sera peut-être plus ministre !", ajoute-t-il.
Prendra-t-il le risque de se lancer dans une guerre des chefs? "Ce peut être un match d'une violence inouïe", observe un conseiller. "Au moment où justement, la Droite reprenait des couleurs."
Pour l’instant, Bruno Retailleau ne dit mot de ses intentions. "Quand on lui en parle, il lève les yeux au ciel", relate l’un de ses interlocuteurs réguliers, pour qui il ne fait aucun doute qu'"à la fin, ça se terminera par une élection avec Retailleau-Wauquiez."
Un possible deal entre Retailleau et Gérard Larcher?
Si une telle affiche se confirmait, nombre d’observateurs parient sur une victoire éclatante du ministre de l’Intérieur. "Il a l’effet booster du gouvernement, avance un sénateur. Quand tu n’y es pas, tu dégringoles dans les sondages et c’est l’erreur qu’a commise Wauquiez. À force de tout refuser, il végète dans son merdier."
En coulisses, certains évoquent un deal entre le ministre de l’Intérieur et Gérard Larcher, président du Sénat, pour barrer la route, à tout prix, à Laurent Wauquiez. "Larcher sait que si Wauquiez prend le parti, il va en faire un numéro de claquettes", confie un sénateur éminent.
D'autres imaginent même une alliance plus large derrière le locataire de Beauvau : "Il peut réunir beaucoup d'anti-Wauquiez", juge un observateur au groupe DR à l'Assemblée. "De Pradié à Pécresse, ils vont vouloir écarter Wauquiez".
La date du Congrès des LR toujours pas connue
Le match serait donc joué d’avance? "Wauquiez, faut pas l’enterrer, il a un porte-voix en présidant le groupe", met en garde un ministre. "Il mettra toutes ses forces dans la bataille, pense un fin connaisseur de LR. Il y joue sa survie politique." La date du Congrès n’est toujours pas connue.
"Je pense qu’il va essayer de gagner du temps", parie un autre membre du gouvernement.
Un temps précieux pour tenter de plier le match... ou, à défaut, convaincre Bruno Retailleau de ne pas se lancer dans la course. "Il y en a qui gigote un peu, c’est Michel Barnier, confie-t-on du côté du Sénat. Il peut être le tiers de confiance: on ne s’écharpe pas entre Wauquiez et Retailleau." L'organisation du Congrès pourrait être détaillée à l'occasion d'un nouveau bureau politique, prévu d'ici fin février.