François Fillon et le FN, une liaison dangereuse?

La déclaration de François Fillon sur les municipales gêne à l'UMP. - -
Les élections municipales approchent, et avec elles de potentielles alliances. Alors que les sondages prédisent près de 100 triangulaires en France, se pose également la question de duels peu habituels, comme ceux opposant un candidat PS à un candidat FN.
La question ne semble pas provoquer d'état d'âmes chez François Fillon. L'ancien Premier ministre, qui affirmait en octobre dernier ne pas mettre les deux partis sur le même plan, a déclaré dimanche sur Europe 1 qu'il appellerait à voter pour "le moins sectaire des deux". Un non-choix en forme d'aveu: pour François Fillon, une alliance FN-UMP n'est pas à exclure dans certaines villes en 2014.
Le PS indigné
Il n’en fallait pas plus pour faire bondir les cadres du Parti socialiste. Sur BFMTV, le ministre de l'Education nationale Vincent Peillon évoque un "dérapage": "A laisser entendre qu'il y aurait une équivalence entre le Front national, qui est un parti xénophobe, qui assume des valeurs qui sont souvent antirépublicaines, et le Parti socialiste, je pense que monsieur Fillon dérape", a affirmé le ministre.
David Assouline, porte-parole du PS, a à son tour mis en garde contre les propos de François Fillon: "Attention à ne pas banaliser ce que vient de déclarer François Fillon. C'est grave et c'est peut-être la dernière digue qui subsistait entre la droite républicaine et le FN qui tombe".
Gêne à l'UMP
Si l'indignation du PS est prévisible, les réactions au sein de l'UMP sont elles plus mesurées - voire gênées. Jean-François Copé a affirmé ainsi dimanche soir sur BFMTV "ne pas savoir" ce qu'a entendu François Fillon par cette déclaration. Quant à Alain Juppé, il a rappelé qu'il n'est "pas question d'alliance avec le FN, dont tout nous sépare (...)" ni de faire "un coup de pouce au PS [...]". "S'il y a un réel danger, je ne mets pas l'extrême droite et le PS sur le même plan", a-t-il expliqué.
Henri Guaino, lui, a botté en touche et a préféré conseiller à ses pairs d'éviter de donner des consignes de vote aux électeurs: "De toute façon, ils n'écoutent pas, mais il y a une forme de mépris à indiquer aux gens ce qu'il est bon voter ou de ne pas voter".
François Fillon se voit ainsi isolé au sein de son parti. Sa déclaration était-elle une erreur? Pour le politologue Thomas Guénolé, auteur de Nicolas Sarkozy, chronique d'un retour impossible?, cela ne fait aucun doute. "C'est une erreur stratégique. François Fillon franchit une ligne, et se retrouve ainsi encore plus 'lepénisé' que Jean-François Copé et la droite sécuritaire. Mais Copé, lui, rejette l'alliance avec le FN: comme Sarkozy, ce qui l'intéresse, c'est d'attirer les électeurs du FN." Avec cette déclaration, Fillon fait donc "une énorme maladresse", selon Thomas Guénolé.
A l'UDI, on voit ça "au cas par cas"
Sa position semble pourtant trouver des échos. Jean-Louis Borloo, président de l'UDI, a ainsi reconnu lundi matin sur France Inter qu'il étudierait la question "au cas par cas", tout en affirmant que "les souvenirs que nous avons des villes gérées par le Front national ne nous font pas penser à de l'ouverture d'esprit". Mais le président de l’UDI souligne que "les élections municipales sont "moins politisées que les autres", et laisse donc, contrairement aux cantonales de 2011, la porte ouverte à un éventuel soutien de son parti au candidat du FN.
L'invit de 8h20 par franceinter
Pourtant, au Modem la position est claire: "nous n’avons rien à faire avec le Front national", explique à BFMTV.com Marc Fesneau, secrétaire général du MoDem. Si le parti de François Bayrou est prêt à des alliances avec la droite – cela se fait déjà à Bordeaux avec Alain Juppé – "c'est sur la base de valeurs communes", soutient Marc Fesneau. "Or, nous n’en partageons pas avec le FN".
"De toute façon, il faut faire attention avec les consignes de vote", reprend le secrétaire général du MoDem, "car elles sont rarement efficaces. Plutôt que d’en parler comme ça, faisons plutôt en sorte d’éviter d’en arriver à ce genre de duels."