Le baromètre des éditorialistes - "Macron a eu le bon réflexe"

Emmanuel Macron lors de sa visite aux salariés de Whirlpool mercredi 26 avril 2017 à Amiens. - Eric FEFERBERG / AFP
C'est une journée qui restera dans les mémoires de cette campagne présidentielle. Marine Le Pen a tendu un piège à Emmanuel Macron en se rendant à l'improviste auprès des salariés grévistes de l'usine Whirlpool d'Amiens, au moment même où le candidat rencontrait les syndicats à la Chambre de commerce.
Un événement inattendu qui a obligé Emmanuel Macron à faire de même. Il s'est rendu auprès des salariés en milieu d'après-midi, et a été accueilli par des sifflets, dans un contexte de tension et de confusion. Malgré cette arrivée en fanfare, le candidat d'En Marche! est parvenu à établir un dialogue avec les salariés, et s'est entretenu un peu plus d'une heure avec eux. Le piège s'est-il refermé sur Emmanuel Macron, ou a-t-il su retourner la situation? Que retiendra-t-on de cette journée? Les éditorialistes de BFMTV livrent leur analyse.
> Camille Langlade: "Emmanuel Macron a retourné la situation à son avantage"
"Le piège s’est refermé dans un premier temps sur Emmanuel Macron, puisqu’il a été contraint de proposer d’autres images, au contact des salariés. On ne retiendra que ce décalage entre un Emmanuel Macron enfermé dans une salle et Marine Le Pen au contact des salariés. Et puis ces images de fumée, de huées, de sifflets.
N’oublions pas que Marine Le Pen elle aussi a été accueillie avec des sifflets à Rungis à la fin de sa visite au rayon fruits, et que cela a été moins relayé parce que l’actualité n’était pas là à ce moment-là.
Il a réussi, sans doute, à retourner la situation à son avantage, en prenant le temps. Parce que pendant plus d’une heure, il a fait preuve de pédagogie, il a écouté les salariés, il a voulu dialoguer avec eux et il a essayé de se placer sur le fond du programme, de démonter les propositions de Marine Le Pen."
> Christophe Barbier: "Il peut y avoir un effet mobilisateur dans cette journée"
"Emmanuel Macron est pleinement dans la campagne et un peu grâce à Marine Le Pen. Il faut qu’il monte d’un cran, il ne peut pas se contenter d’attendre tranquillement le vote anti-Le Pen. Emmanuel Macron n’a pas à mobiliser, à récupérer l’électorat de Marine Le Pen, il sait bien que ces ouvriers déclassés ont voté et voteront Marine Le Pen. Il sait bien aussi qu’une partie de l’électorat de Jean-Luc Mélenchon va être tenté par le vote frontiste.
Ce que doit tenter Emmanuel Macron, c’est mobiliser son électorat, mais aussi une partie de l’électorat de Benoît Hamon et une partie de celui de François Fillon qui pourrait avoir peur d’une France dirigée par Marine Le Pen.
Or ces images-là, quand on voit Marine Le Pen venir dire aux salariés ‘avec moi on nationalisera’, ’avec moi il y aura des avantages sociaux’, ça peut faire peur à une certaine France libérale, qui n’avait pas envie de voter pour l’ancien collaborateur de François Hollande, mais qui va peut-être y aller quand même pour éviter tout risque. Il peut y avoir dans cette journée mitigée un effet mobilisateur de l’électorat de François Fillon et de Benoît Hamon pour venir à la rescousse du candidat Macron".
> Thierry Arnaud: "Emmanuel Macron a eu le bon réflexe"
"Cette journée marque une rupture par rapport à ce que l’on percevait de sa volonté de mener cette campagne de l’entre-deux tours. On avait l’impression qu’il y avait plutôt une envie de protéger le candidat, se disant grosso modo ‘il est favori, s’il ne se passe pas de catastrophe d’ici le 7 mai on va gagner cette élection et donc l'objectif est de créer un emploi du temps pour Emmanuel Macron dans des conditions qui ne l’exposent pas à une catastrophe’.
La catastrophe n’est pas passée très loin. Lorsqu’il arrive sur le site, que l’accueil est houleux, et qu’il succède à Marine Le Pen avec ses images qui sont très favorables, c’est un moment où la campagne peut basculer. Et là, il a le bon réflexe.
C’est compliqué, hostile, tendu, mais il choisit de rester et d’aller à la confrontation. Cette journée a été très intéressante parce qu’elle a montré un moment important dans la campagne sur la forme puis sur le fond aussi. On est au cœur du sujet qui mobilise : le rapport à la mondialisation, l’ouverture ou la fermeture du pays, le rapport à l’Europe. On a vu les arguments des uns et des autres. On était au cœur du sujet."