Delphine Batho n'accepte pas le tournant de la rigueur

Delphine Batho dans la salle de conférence de presse de l'Assemblée nationale - -
Elle avait promis de "tout" dire sur son "limogeage". L'ex-ministre de l'Ecologie Delphine Batho s'est exprimée pendant presque une heure, ce jeudi après-midi depuis l'Assemblée nationale, pour revenir sur sa démission le mardi 2 juillet après avoir qualifié le budget 2014 de "mauvais". François Hollande et Jean-Marc Ayrault lui ont reproché d'avoir manqué au "principe majeur de solidarité gouvernementale".
Delphine Batho est arrivée d'un pas décidé dans la salle de conférence de presse de l'Assemblée nationale. Les photographes présents se sont longuement approchés d'elle puis le calme est revenu dans la pièce.
Le visage tendu, elle a souhaité faire une déclaration en revenant sur son parcours, de ses débuts de militante de SOS racisme à son rôle de porte-parole de François Hollande, puis députée et ministre.
> "Je n'ai jamais commis aucune bourde"
"Je n'ai jamais été prise en défaut de loyauté. Je n'ai jamais commis la moindre bourde ou couacs. Je n'ai jamais commis une erreur ou une faute. Je n'ai jamais commis aucune bourde. Je n'ai pas défailli", a-t-elle martelé faisant référence à ses différents engagements.
Elle a aussi assuré qu'"en aucun cas" elle n'avait "manqué à la solidarité gouvernementale". Selon elle, "ce n'est pas une faute qu'on sanctionne mais une résistance qu'on voulait soumettre".
> Ayrault arbitre les budgets "sans discussion directe"
Elle a, ensuite, mis en cause jeudi Jean-Marc Ayrault qui, a-t-elle affirmé, arbitre désormais les budgets "sans discussion directe avec les ministres concernés".
"Quelque chose a changé, mes demandes budgétaires sont remontées à l'arbitrage du Premier ministre qui procède aux arbitrages sans discussion directe avec les ministres concernés", a-t-elle accusé.
La réponse n'a pas tardé à venir, quelques minutes après la conférence de presse. Bernard Cazeneuve, ministre délégué au Budget, a assuré que Delphine Batho n'avait pas demandé de "réunion d'arbitrage".
> Un tournant "qui prépare la marche au pouvoir de l'extrême droite"
Le budget 2014 "marque un tournant par rapport à la volonté de mener à bien la transition écologique. Je n'ai pas accepté cela en silence", a aussi déclaré Delphine Batho, qui a revendiqué un statut de "lanceuse d'alerte".
"Ce que je n'accepte pas, ce n'est pas de faire des compromis, c'est le tournant de la rigueur qui ne dit pas son nom et qui prépare la marche au pouvoir de l'extrême droite dans notre pays", a déclaré l'ex-ministre PS.
> Le gouvernement a cédé à "certaines forces économiques"
L'ex-ministre de l'Écologie Delphine Batho a accusé le gouvernement d'avoir cédé à "certaines forces économiques", liées notamment au gaz de schiste et au nucléaire". Selon elle, elles "voulaient sa tête", citant nommément le patron de Vallourec.
"Certaines puissances économiques n'acceptaient pas le niveau d'ambition que je fixais pour la transition énergétique", notamment sur la question du gaz de schiste et la réduction de la part du nucléaire en France, a-t-elle déclaré.
"Ces forces ne se sont pas cachées de vouloir ma tête, mais si le gouvernement avait été solidaire, elles n'y seraient pas parvenues", a-t-elle ajouté.
> Mise en cause du patron de Vallourec
Delphine Batho a également mis en cause le patron de l'entreprise de tubes en acier Vallourec, Philippe Crouzet, époux de Sylvie Hubac, directrice de cabinet du président François Hollande.
"Est-il normal que le patron de l'entreprise Vallourec directement intéressé par l'exploitation des gaz de schiste ait pu annoncer ma marginalisation des semaines à l'avance devant des responsables de son entreprise aux Etats-Unis?" a-t-elle demandé.
Après une heure, Delphine Batho a mis fin aux questions des journalistes. L'avenir nous dira si son acte marque la fin d'une carrière ou l'aube d'une naissance politique. A seulement 40 ans, elle a prévenu: "je n'ai pas de projet précis mais je suis une militante. Je continue le combat".
>> Retrouvez Delphine Batho dans Bourdin Direct, ce vendredi à 8h35, sur BFMTV et BFMTV.com. L'ex-ministre de l'Ecologie répondra aux questions de Jean-Jacques Bourdin.