Les forces de l'ordre gagnées par le vote Front national

Certaines mesures défendues par Marine Le Pen séduisent les forces de l'ordre. - Joel Saget - AFP
Le syndicat majoritaire chez les policiers, Alliance Police nationale, a appelé à voter contre Marine Le Pen. Et pourtant, la candidate du Front national semble avoir conquis l'électorat des forces de l'ordre. Selon une étude Ifop, parue en mars dernier, 44% des policiers et gendarmes se prononçaient en faveur de cette tentation bleue marine. Un chiffre nettement supérieur à la moyenne nationale qui s'élevait alors à 26%. Au premier tour, Marine Le Pen a recueilli, au niveau national, 21,3% des voix. Pour dimanche prochain, elle est créditée de 41% selon un dernier sondage Elabe pour BFMTV.
Parmi ses soutiens, la candidate du Front national peut compter, semble-t-il, sur les forces de l'ordre, et notamment les gendarmes qui votent bien plus pour la représentante FN que les autres citoyens. Pour preuve, les résultats du premier tour dans les bureaux de vote où ces derniers se rendent pour voter, c'est-à-dire ceux qui se trouvent proche d'une caserne. Dans le bureau 46 du 13e arrondissement de Paris, situé à proximité de la caserne qui accueille les membres de la Garde républicaine et leur famille, Marine Le Pen a engrangé 16,52% des voix. Soit plus de 2,5 fois plus qu'au niveau de l'arrondissement (6,48%).
Le constat est le même à Nanterre, dans les Hauts-de-Seine: au bureau de vote où se rendent les hommes du 1er Régiment d'infanterie, la candidate FN a recueilli 35,16% des voix. Au niveau de la ville, elle obtient 10,43%. A Versailles Satory, où logent plus de 1.500 gendarmes et notamment le GIGN, Marine Le Pen a enregistré 35,67% dans le bureau 11 et 48,27% au bureau 10 (additionné au score de Nicolas Dupont-Aignan - 7,68% - elle obtient même la majorité absolue). Au niveau de la ville, elle a recueilli... 9,80%. La situation s'observe ailleurs qu'en région parisienne.
Sentiment de peur
A Toulouse, c'est au bureau situé à proximité de la caserne de gendarmerie que la représentante FN a fait son plus gros score (23,82% contre 9,41% au niveau de la ville). A Mont-Saint-Aignan, où réside un escadron de gendarmerie mobile, Marine Le Pen a recueilli 17,09% des suffrages contre 8,29% en moyenne dans cette commune de l'agglomération de Rouen, en Seine-Maritime. Dans le Loiret, à Orléans, la situation se répète: dans les bureaux situés à proximité de la caserne, dans laquelle loge un escadron de gendarmerie mobile, les scores de la candidate FN sont nettement supérieurs à la moyenne: 16% pour le bureau 38, 23,7% pour le numéro 39 contre seulement 12%.
Interrogé avant le premier tour, les gendarmes déclaraient à 51% vouloir voter pour Marine Le Pen, selon une enquête Ifop. Dans le même temps, les militaires exprimaient à 54% la peur qu'ils ressentent désormais lors de leurs interventions. Depuis quelques mois, les agressions contre les forces de l'ordre se multiplient, et notamment contre les policiers. Apparaissant désormais clairement comme des cibles pour les jihadistes, policiers, gendarmes ou militaires font part de leur mal-être particulièrement visible lors des dernières manifestations. "La violence monte crescendo", assure Stéphane, CRS à Paris, blessé lors de la manifestation parisienne du 1er mai.
"Le vécu quotidien et professionnel de ces électeurs les incite à avoir une vision de la société relativement en phase avec ce que défend et ce que raconte Marine Le Pen, analyse Jérôme Fourquet, directeur du pôle opinions à l'Ifop. On est sur des populations qui sont au contact quotidien des délinquants, des incivilités, de l’insécurité."
Un discours FN qui fait écho
Face à ce sentiment et ces conditions de travail, la candidate du Front national ne cesse d'afficher son soutien aux forces de l'ordre qui avait déjà voté à plus de 50% pour le FN lors des élections régionales. Lors de la campagne présidentielle, elle a multiplié les déplacements pour les rencontrer. Le 7 février, elle se rendait dans trois commissariats de l'Essonne, celui de Savigny-sur-Orge, Athis-Mons et Juvisy-sur-Orge. Un déplacement qui ne doit rien au hasard alors qu'en octobre deux policiers étaient grièvement blessés dans l'attaque de leur véhicule aux cocktails Molotov. Elle avait alors déclaré refuser de voir une "bavure" dans l'interpellation violente, quelques jours plus tôt, de Théo, à Aulnay-sous-Bois, qui accuse des policiers de viol.
"Mon principe de base c’est, d’abord, je soutiens les forces de police et de gendarmerie, voilà. Sauf démonstration par la justice qu’ils ont commis un délit ou un crime", déclarait-elle alors.
Détaillant son programme, Marine Le Pen ne cesse de répéter son exigence de tolérance zéro à l'égard des délinquants. "Nous allons en finir avec l'impunité des délinquants, les zones de non-droit, les trafics de drogue", arguait-elle lors de la présentation de son programme en février dernier. Elle promet, si elle est élue, de réarmer "massivement" les forces de l'ordre, de recruter 15.000 policiers et gendarmes, d'expulser les personnes fichées S étrangères ou encore rétablir les frontières. Des mesures qui trouvent un écho chez les policiers.
"On nous propose une certaine sécurité dans notre travail, confiait à BFMTV Sarah, une policière en région parisienne. Elle nous montre une certaine considération à l’égard des forces de l’ordre de part la multitude ses vidéos, de ses interventions, aux solutions qu’elle peut mettre en œuvre si elle est élue."