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Présidentielle

Le baromètre des éditorialistes - Marine Le Pen a enfilé "le costume de chef de l'opposition"

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Les deux finalistes à l'élection présidentielle se sont livrés mercredi soir à un duel sans concession. Au terme d'un débat tendu et brutal, Emmanuel Macron est apparu comme le candidat le plus convaincant, selon un sondage Elabe pour BFMTV.

Un seul mot revient au terme du débat de 2h20 qui a opposé Marine Le Pen à Emmanuel Macron: tension. Mercredi soir, les deux finalistes à l'élection présidentielle ne se sont pas épargnés et se sont livrés à un duel brutal à coup d'attaques, parfois personnelles. A ce jeu, c'est le candidat d'En Marche! qui est apparu comme le plus convaincant pour 63% des téléspectateurs, selon un sondage Elabe pour BFMTV

Pour les éditorialistes de BFMTV, Emmanuel Macron, apparaissant plus calme, a incarné la posture présidentielle face à une Marine Le Pen se présentant comme le chef de l'opposition.

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> Christophe Barbier: "Pas beaucoup de moments pour dérouler quelque chose de construit"

"Sur le fond, on n’a pas eu beaucoup de moments où ils ont pu dérouler quelque chose de construit. A certains moments, un peu plus: sur les dossiers économiques, avec plutôt un avantage pour Emmanuel Macron; sur l’Europe, Marine Le Pen a réussi à dérouler quelle était sa stratégie de reconfiguration, mais sur l’Euro, Emmanuel Macron a repris la main. Si vous attendiez des idées pour vous faire votre avis, vous n’avez pas été servi. En revanche, si vous étiez en attente d’une incarnation de ‘présidentialité’, vous avez eu d’un côté quelqu’un qui a choisi l’agressivité, le dénigrement, qui s’est comporté comme une première opposante. De l’autre, un Emmanuel Macron qui a bien veillé à ne pas s’énerver et à revenir en permanence à l’idée que la fonction présidentielle, la présidence de la République, ça s’incarne par du calme et une certaine forme de tempérance et de raisonnement."

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> Laurent Neumann: "C’était étouffant, irrespirable, mais très utile"

"On n’avait jamais vu un débat d’une telle violence. J’ai essayé de me souvenir des débats lors de la présidentielle américaine. On disait déjà qu’ils étaient hors normes. Mais ça n’atteignait pas le niveau de ce que l’on a vécu mercredi soir. C’était étouffant, irrespirable, et en même, c’était sans doute très utile. Au bout de 2h20, les deux candidats, et singulièrement Marine Le Pen, sont apparus dans leur vérité crue, dans leur vérité nue, pour ce qu’ils sont, pour les idées qu’ils défendent. Ils ont présenté deux projets de société totalement différents, ils ont deux rapports au pouvoir totalement différents, ils ont deux manières de débattre démocratiquement radicalement différentes. Ma grande surprise c’est que, dans ce débat d’entre-deux-tours, Marine Le Pen aurait dû chercher à rassembler. C’est la première fois qu’elle avait accès à 10/15/20 millions de téléspectateurs. Elle a passé 2h20 à ne parler qu’à ses militants, qu’à ses adhérents, qu’à ses électeurs. Au fond, elle a confondu les mots que l’on prononce sur une estrade et ceux que l’on prononce dans un duel de ce genre. Comme si au fond, elle avait choisi de ne pas être dans la posture de la future présidente de la République mais dans le costume de la future cheffe de l’opposition."

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> Eric Brunet: "Un débat assez révélateur d’une forme d’archaïsme de la pensée française"

"Ce n’était pas un débat ennuyeux. Il y a eu dans l’histoire des débats barbants mais là, ce n'était pas le cas. Pour le reste, on peut dire que c’était en dessous de la ceinture. C’était un débat assez révélateur d’une forme d’archaïsme de la pensée française. Nous sommes quand même la 5e ou la 6e puissance du monde, en fonction des classements. Ce n’était pas franchement à la hauteur. Un observateur étranger, qui aurait vu ces passes d’arme, se serait interrogé sur ce qu’est devenu le pays des Lumières. On était dans la caricature idéologique avec d’un côté un candidat qui était le produit de l’oligarchie, le candidat des riches. Emmanuel Macron n’est qu’un réformateur tempéré, comme il y en a dans toutes les démocraties européennes, mais, l’espace d’un instant, il est devenu une espèce de candidat de l’oligarchie. On n’était pas loin, d’une certaine façon, du discours des années 30. Pardon d’aller dans ce territoire-là, mais nous avons eu, hier, le sentiment qu’il était vraiment la pire chose, le produit de la financiarisation mondialisée. De l’autre côté, on avait un Front national, qui a émergé dans les années 80 sur la maîtrise des flux migratoires, qui est une idée valide, qu’on peut entendre, mais qui a repris, encore une fois je parle de l'archaïsme des idées françaises, le programme communiste de Georges Marchais. On n’était pas loin du parti communiste des années 70 et 80. Un observateur international, qui regarderait la vie politique de la 6e puissance du monde, se serait un peu gratté la tête en se disant ‘où sommes-nous? Ce pays, la France prend des distances inquiétantes avec le monde réel'."

J.C.