BFMTV
Politique

Avant la rentrée, branle-bas de combat dans la majorité

Des députés du groupe LREM à l'Assemblée.

Des députés du groupe LREM à l'Assemblée. - Martin BUREAU / AFP

Les têtes d'affiche de La République en marche remobilisent les députés de la majorité échaudés par une première session parlementaire tumultueuse.

"En avant, marche !" Dans L'Opinion, Bruno Bonnell, figure macroniste élu député du Rhône, adresse un message à ses coreligionnaires marcheurs: pas question de déserter. À la rentrée, il faudra monter au front dans l'hémicycle:

"Des députés, fatigués, m’ont expliqué qu’ils allaient démissionner. Les vacances vont faire du bien car nous n’avons pas signé un CDD de parlementaire et on ne démissionne pas de nos fonctions. Nous avons un mandat et, si on y renonce, il faut assumer de devenir en quelque sorte un 'défroqué'. Je suis favorable à un véritable serment du député, qui assure que l’on s’engage et que l’on ne trahira pas son honneur."

Crise existentielle

Le moine-soldat de La République en marche tente ainsi de serrer les rangs, à l'heure où la majorité, ébranlée par une session extraordinaire plus sportive que prévu, voile à peine ses doutes, ou les révèle malgré elle. En commission des lois, la présidente LREM Yaël Braun-Pivet, croyant son micro fermé, s'alarmait ainsi: "On a un groupe qui dort, qui ne sait pas monter au créneau, qui est vautré".

L'ancien patron d'Infogrames, fossoyeur de Najat Vallaud-Belkacem au législatives, impute une partie de ces difficultés au "sentiment d’imposture qui traverse la tête de certains de mes camarades", "accusés de n’avoir été élus uniquement parce qu’ils avaient leur tête à côté de celle d’Emmanuel Macron sur une affiche". L'acclimatation est difficile pour de nombreux députés venus de la "société civile":

"Ils cherchent une légitimité tant leurs codes sont bouleversés. 'Qu’est-ce que je fais là ?' est une phrase que j’entends régulièrement, alors qu’ils ont toute leur place de représentant de la Nation", confie Bruno Bonnell, toujours dans L'Opinion.

Punching-ball

Politiquement, cette période de rodage a fait du dégât. De fait, les novices du palais Bourbon ont multiplié les bourdes, y compris au Perchoir en tant que présidents de séances. Applaudissements à tort et à travers, erreurs de vote, passivité pendant les débats... les parlementaires LREM ont servi de punching-ball à leurs collègues de l'opposition.

Une ambiance qui fait dire à François Ruffin, député insoumis invité ce mercredi sur RMC, que l'Assemblée, "c'est du flan". "Le Parlement est un bureau d'enregistrement des désirs du président, avec des députés qui votent en cadence", tance le fondateur du journal Fakir.

Bruno Bonnell reconnaît lui-aussi les difficultés du groupe majoritaire, mais reste optimiste:

"Disons-le tout net : pour le moment, La République en marche manque de clarté. La clarification va prendre au moins quelques mois mais la chrysalide va devenir un superbe papillon."

Tirs dans le dos

Si les députés "du rang" ne sont pas exempts de tout reproche, les regards se sont naturellement tournés vers l'encadrement du groupe. Dans la presse, les détracteurs anonymes de Richard Ferrand ont fait siffler les oreillers du président de groupe. On a pu lire, dans Le Figaro, quelques-unes des amabilités distillées par ses collègues anonymes:

"Son autorité n'est pas reconnue", "c'est un très mauvais président de groupe", "de l'extérieur, on a l'impression d'un groupe caporalisé, alors qu'à l'intérieur, il ne tient rien".

Claire O'Petit, jamais avare en déclarations fracassantes, estimait mardi sur RMC que le député du Finistère "n'avait absolument pas été à la hauteur" lors des attributions de poste à l'Assemblée.

L'éphémère ministre de la Cohésion des territoires, qui assure ne pas vouloir être le "surveillant général" du groupe, n'a pas été le plus présent dans l'hémicycle pendant les débats houleux sur la loi de moralisation. Au point que l'exécutif a dû intervenir pour restructurer la majorité.

Chien de berger

Message reçu cinq sur cinq par Bruno Bonnel, qui se charge de porter la bonne parole. Comme le secrétaire d'Etat chargé des Relations avec le Parlement Christophe Castaner, qui a prié les députés de "réviser" pendant l'été, l'élu du Rhône compte sur une majorité en ordre de bataille à la rentrée:

"L’opposition a mangé son pain blanc. À la rentrée, on ne va plus se faire balader. Au départ, je me disais naïvement que nous avions la majorité, donc il était inutile de bouger car à la fin nous gagnerions toujours."

"La torpeur, c’est le danger mortel de La République en marche", prévient le macroniste. "Nous allons donc beaucoup plus nous engager sur des propositions de loi ou des amendements (...)." Faire émerger plus de cadres, dans l'hémicycle ou sur les plateaux de télévision, semble être l'une des urgences de La République en marche. La rentrée bouillante qui attend les députés devrait être l'occasion d'éprouver les marcheurs en quête de galons. 

Louis Nadau