Un dispositif expérimental de déradicalisation testé en secret depuis un an

Nicole Belloubet, la ministre de la Justice, indique qu'il y a 500 détenus radicalisés en France - AFP
"Nous avons autour de 500 détenus très radicalisés et 1.500 personnes en voie de radicalisation. Donc il faut agir", a résumé la ministre de la Justice alors qu'est dévoilé cette semaine l'expérimentation d'un dispositif de déradicalisation. Testé depuis un an, ce programme, intitulé Rive pour "Recherche et intervention sur les violences extrémistes", regroupe 14 personnes, huit hommes et six femmes. 50 personnes, à terme, devraient être suivies.
Décision de justice
Le 28 juillet dernier, l'unique centre de déradicalisation en France avait fermé ses portes, moins d'un an après son ouverture. Avec ce nouveau dispositif, lancé en décembre 2016, et qui reste à "évaluer dans le temps", le suivi se fait en milieu ouvert pendant un an, au minimum. Les participants sont choisis à la demande d'un juge pour des personnes déjà condamnées ou en attente de leur jugement pour une infraction en lien avec du terrorisme ou pour un signalement d'une radicalisation violente.
Dix des personnes suivies par Rive sont condamnées ou poursuivies pour association de malfaiteurs à visée terroriste, avec des profils extrêmement divers qui vont d'un individu de retour de Syrie à une personne poursuivie pour apologie du terrorisme. L'un est assigné à résidence, l'autre sous bracelet électronique.
"Ces personnes ne sont pas rassemblées en un lieu unique", détaille à LCI, Nicole Belloubet, la ministre de la Justice. "Elles sont, dans un certain nombre de cas, placées sous bracelet électronique, donc hébergées dans différents endroits de la région parisienne."
Accompagnement personnalisé
Le programme Rive veut donc être le contre-exemple des solutions déjà expérimentées avec le regroupement des personnes radicalisées entre elles. "Il n'y a pas d’approche idéologique mais pragmatique", confirme François Molins, le procureur de la République de Paris, ce vendredi matin sur France Info. "Il concerne des gens qui attendent qu'on leur tende la main et que l’on peut récupérer." Avec le dispositif, le suivi est individuel et réalisé par une équipe d'éducateurs, un psychologue, un référent religieux ou un psychiatre. A raison d'au moins six heures par semaine les premiers mois, des entretiens et une aide à la réinsertion sont menés. Un lien avec la famille est également établi avec la famille.
"L'objectif", a expliqué Samantha Enderlin, directrice de Rive, "c'est le désengagement de la violence extrémiste. Pour cela, nous favorisons le mentorat, la mise en place d'une relation de confiance dans une prise en charge sur mesure, en complément de l'action des services de probation et d'insertion (Spip)".
L'accent est ainsi porté sur l'autonomie et sur la réinsertion. Ainsi, l'accompagnement dans sa globalité est personnalisé. L'un des participants a participé à une journée de bénévolat pour favoriser l'estime de soi, un autre a eu le droit à une visite programmée à Verdun, jusqu'au carré des musulmans, pour entrer dans l'histoire collective. Un autre encore a bénéficié d'un entretien avec un spécialiste de l'islam.
"Ce suivi constitue à la fois une garantie de sécurité et une volonté de réinsertion. C'est cela qui est indispensable", insiste la garde des Sceaux, qui ne se montre pas favorable au regroupement des personnes radicalisées. Dans un moi, un "plan national" de lutte contre la radicalisation doit être annoncé par le gouvernement.