Bataclan: il est 23h48, "j'ai l'impression que les terroristes reviennent à la réalité"

La reconstitution de l'assaut du Bataclan - BFMTV
Entre 23h27 vendredi 13 novembre et 00h18, l'heure de l'assaut mené contre les terroristes retranchés dans un couloir du Bataclan, Pascal, le chef négociateur de la Brigade de recherche et d'intervention (BRI) s'est entretenu par téléphone à cinq reprises avec eux. Selon les premiers éléments de l'enquête, il s'agit d'Omar Ismaïl Mostefai, 29 ans, de Samy Amimour, 28 ans ou bien de leur troisième complice, non encore identifié. "Celui que j'ai en ligne parle un français sans accent, comme s'il venait de province", explique Pascal à L'Obs.
Omar Ismaïl Mostefai qui a séjourné à Chartres à près de 100 kilomètres de Paris pourrait être l'interlocuteur. Grâce à un détail, le négociateur, qui avait déjà été en première ligne contre Amedy Coulibaly en janvier, est en tout cas persuadé qu'ils ont séjourné en Syrie.
"Ils (les terroristes, ndlr) n'ont qu'une idée en tête, c'est se barrer"
En effet, ils se présentent comme des "soldats du califat", pas comme membre de "l'Etat islamique" qui est un terme utilisé par les medias occidentaux.
"Ils répétaient les mêmes phrases en boucle. Nous sommes les soldats du califat. Tout ça est de la faute d'Hollande. Vous attaquez nos femmes et nos enfants en Syrie. On se défend en attaquant les femmes et les enfants de France", se souvient-il.
"A ce moment-là, ils (les terroristes, ndlr) n'ont qu'une idée en tête, c'est se barrer, explique Georges Salinas, le numéro 2 de la BRI à l'hebdomadaire. Est-ce pour s'échapper? Pour continuer leur carnage ailleurs?" Au téléphone, Pascal demande à ce que les femmes et les enfants soient libérés pendant que ces collègues sécurisent tant bien que mal les parties accessibles de la salle de spectacle. "On verra, on verra" répond le terroriste. Chacun de son côté, il s'agit de gagner du temps pour s'organiser.
"J'ai l'impression qu'ils commencent à revenir à la réalité"
Il décrit ensuite ses interlocuteurs comme "très énervés, très speed et confus" mais "au troisième appel, ils ne menacent plus d'égorger tout le monde, de jeter les otages par la fenêtre. J'ai l'impression qu'ils commencent à revenir à la réalité." Il est 23h48. Mais, si "ma mission principale est en général d'obtenir la reddition des preneurs d'otages, poursuit Pascal qui a vu le massacre perpétré dans la fosse de la salle de concert avant ces échanges. Cet objectif n'était pas atteignable vendredi soir. On l'a su très vite".
Son analyse se confirme quand deux colonnes de la BRI, soutenues par le Raid, investissent le couloir en U où sont cachés les deux terroristes encore vivants avec une vingtaine d'otages. Le troisième homme du commando, resté au rez-de-chaussée, a été abattu par un policier de la Bac. Devant les forces d'intervention, le bouclier Ramses qui pèse 80 kilos est criblé de balles.
Des otages parviennent pourtant à se glisser en dessous alors qu'une balle fait exploser un côté de la ceinture portée par un terroriste. L'autre côté sera déminée plus tard, après que le second assaillant a lui aussi sauté. Pendant plus d'une heure, la tension reste à son comble: il faut libérer mais surtout contrôler les centaines d'otages cachées dans les moindres recoins du Bataclan.