Soumission chimique: le "coup de gueule" de Sandrine Josso contre la lenteur du gouvernement

La députée française Sandrine Josso au palais de justice de Paris, le 6 novembre 2024. - GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP
"Est-ce que c'est compliqué de prendre un crayon et de signer un décret?" Cinq mois après la promulgation de la loi, le 28 février 2025, sur le financement de la Sécurité sociale (PLFSS), la députée Les Démocrates de Loire-Atlantique Sandrine Josso, affiche son agacement: l'un des amendements sur la prise en charge, à titre expérimental, des victimes de soumission chimique attend toujours de faire l'objet d'un décret.
Ce décret devait être pris "au plus tard le 1er juillet 2025", selon la loi. Or, ce dernier est toujours "en attente d'application", d'après le site de l'Assemblée nationale.
"Ça, ce n'est pas normal et au nom des victimes, je me battrai jusqu'au bout. C'est mon coup de gueule", lance-t-elle auprès de BFMTV.com.
Actuellement, les victimes qui viennent dénoncer des faits de soumission chimique (c'est-à-dire le fait d'administrer des substances psychoactives à une personne à son insu ou sous la menace) doivent d'abord porter plainte avant que les autorités ne puissent procéder à des prélèvements d'urine et de sang et ainsi vérifier si des substances ont bien été administrées.
Or, "c'est souvent quand on a les résultats que l'on va porter plainte", souligne la députée, qui estime que ce processus n'encourage pas les victimes à déposer des plaintes.
Un décret toujours pas signé
C'est tout l'objet du fameux amendement, voté à l'unanimité: faire en sorte que ces prélèvements soient pris en charge par la Sécurité sociale, avant même que la victime n'ait à porter plainte. Ainsi, ce dispositif qui doit être expérimenté pendant trois ans et dans trois régions de France, notamment dans les Pays de la Loire et dans des territoires d'Outre-Mer, se heurte au mur de l'exécutif.
Le décret, qui devait être signé "au plus tard le 1er juillet 2025", ne l'a toujours pas été. "On est quasiment au mois d'août, le décret n'est toujours pas signé. Est-ce normal? C'est un contre-la-montre pour l'application de ce que j'ai demandé", pointe Sandrine Josso.
"C'est monsieur le président de la République qui signe ces décrets. On n'est pas non plus en pénurie d'encre pour signer quelque chose, jusqu'à preuve du contraire", ironise encore la députée.
Contacté ce mercredi, le ministère de la Santé indique que "le décret est prêt". "Il est actuellement étudié par la CNIL dont l'avis est nécessaire. Il fera l'objet de concertations et sa publication aura lieu à l'automne", poursuit la même source, déclarant n'avoir pas plus de visibilité.
"Des millions de victimes en France"
Alors Premier ministre, en novembre 2024, Michel Barnier avait déjà promis un plan de lutte contre les violences faites aux femmes, avec un volet concernant la soumission chimique. Il proposait notamment d'expérimenter le remboursement de kits de détection de substances nuisibles. Huit mois plus tard, alors que son successeur François Bayrou a admis que "le combat" de Gisèle Pelicot "nous oblige tous et doit être poursuivi", ce plan se fait encore attendre.
En novembre 2023, Sandrine Josso a elle-même porté plainte contre le sénateur Joël Guerriau, qu'elle accuse de l'avoir droguée à son insu lors d'une soirée chez lui. Ce dernier doit être jugé en janvier 2026.
Après les faits, la députée a décidé de témoigner publiquement et a fait de la lutte contre la soumission chimique et ses auteurs son cheval de bataille, recueillant de nombreux témoignages de victimes et pilotant une mission parlementaire sur le sujet. "Heureusement que je suis dessus et que je ne lâche rien. Parce qu'à tout moment, il y a autre chose de plus important à traiter, alors que les victimes d'agressions sexuelles et de soumissions chimiques sont des millions en France", conclut Sandrine Josso.