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Police-Justice

Qu'est-ce que le pôle "crimes de guerre" saisi dans l'affaire Ahmed H., cadre présumé de Daesh?

Des membres des forces de sécurité irakiennes inspectent un charnier contenant les restes de militaires tués par Daesh lors du massacre de Tikrit en 2014, auquel Ahmed H. est soupçonné d'avoir participé.

Des membres des forces de sécurité irakiennes inspectent un charnier contenant les restes de militaires tués par Daesh lors du massacre de Tikrit en 2014, auquel Ahmed H. est soupçonné d'avoir participé. - Ahmad al-Rubaye - AFP

Cette section spécifique du tribunal de grande instance de Paris a été créée en 2012, d'abord pour juger les auteurs présumés d'exactions au Rwanda. Pour la première fois en novembre dernier, elle a été saisie conjointement avec les juges antiterroristes.

C'est une première en France. En novembre dernier, une information judiciaire a été confiée à la fois à des juges antiterroristes et au pôle "crimes contre l'humanité, crimes et délits de guerre" du parquet de Paris.

Il s'agissait dans un premier temps d'enquêter sur Ahmed H., un homme de 33 ans soupçonné d'être un cadre de Daesh et d'avoir participé à un massacre de soldats en Irak en 2014. Sa mise en examen, entre autres pour "assassinats en relation avec une entreprise terroriste" et "crimes de guerre", a été révélée ce jeudi.

La création du pôle "Crimes contre l'humanité - Crimes et délits de guerre" par le tribunal de grande instance (TGI) de Paris remonte à 2012, sur une impulsion du ministre des Affaires étrangères (de 2007 à 2010) Bernard Kouchner. L'objectif est de "lutter contre l'impunité face aux crimes les plus graves", notamment de "ceux qui souhaiteraient se réfugier sur le territoire français", expliquait en 2013 Aurélia Devos, la procureure à la tête du pôle.

Un pôle créé pour les procès du Rwanda

La priorité est d'abord de juger les auteurs présumés de crimes de masse au Rwanda réfugiés en France. Le premier procès est d'ailleurs celui de Pascal Simbikangwa, un ancien officier condamné à 25 ans de prison pour complicité de crimes contre l'humanité et pour avoir participé au génocide des Tutsis en 1994.

"L'objectif politique qui a présidé à la création du pôle était d’écluser les dossiers rwandais bloqués dans différents tribunaux. Puis il a fallu éviter de faire un pôle spécialisé sur le Rwanda pour le pérenniser après le règlement de ces dossiers", analysait en août 2017 dans les colonnes de Libération Clémence Bectarte, avocate auprès de la Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH). Le quotidien précisait à l'époque que sur 45 dossiers ouverts, 27 concernaient les exactions au Rwanda.

Depuis, la section s'est penchée sur des cas de torture au Tchad, des exactions dans l'Irak de Saddam Hussein, la vente d'outils de surveillance à la Syrie ou au régime Kadhafi, ou encore la disparition du vice-président de l'Assemblée nationale cambodgienne à la prise de pouvoir des Khmers rouges.

Le pôle est soutenu par l'action de l'Office central de lutte contre les crimes contre l'humanité (OCLCH), qui réunit gendarmes, policiers et agents du ministère des Armées ou de toute autre administration dotés d'une "expertise dans la lutte contre les crimes internationaux les plus graves".

Comme la section du tribunal, l'OCLCH agit au nom de la compétence universelle, qui permet à la France de poursuivre les auteurs présumés sous certaines conditions - de présence sur le territoire et de résidence habituelle notamment -.

Liv Audigane