Francis Heaulme, "le routard du crime", à nouveau devant la justice

En 1995, Francis Heaulme est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour complicité de viol et meurtre de Laurence Guillaume. - Franck Fife - AFP
"Montigny c'est pas moi." Cette phrase prononcée par Francis Heaulme lors de son premier procès pour les meurtres de Cyril Beining et Alexandre Beckrich devrait résonner encore dans les couloirs de la cour d'appel de Versailles. Dernier épilogue d'une affaire judiciaire de plus de trente ans, le procès en appel du "routard du crime", âgé de 59 ans, s'ouvre ce mardi.
Symbole de l'erreur judiciaire
En septembre 1986, les corps de deux enfants sont retrouvés à Montigny-lès-Metz, bourgade située à l'ouest de la Moselle. Les crânes de Cyril Beining et Alexandre Beckrich ont été fracassés à coups de pierres, à proximité d'une voie ferrée. Des témoignages d'anonymes accusent un jeune du village, un certain Patrick Dils. Convoqué au commissariat, il avoue les meurtres, après 30 heures de garde à vue: «Quand je frappais les têtes, cela faisait le bruit d'un melon que l'on écrase». Inculpé l'année suivante, il se rétracte. Mais la machine judiciaire s'emballe et le jeune apprenti cuisinier est condamné en 1989 à la réclusion criminelle à perpétuité.
En 1997, tandis que son avocate se bat pour le libérer, l'affaire connaît un tournant: un gendarme Breton qui enquête sur les crimes d'un certain Francis Heaulme établi que le criminel était dans la région de Montigny-lès-Metz au moment du drame. Une présence suffisante pour installer le doute. Cinq ans plus tard, Patrick Dils est acquitté, après avoir passé plus de 15 ans en prison.
Absence de preuve matérielle
Mais les déboires de la justice ne s'arrêtent pas là. Un premier procès qui devait se tenir est annulé, en raison de révélations impliquant un autre suspect. Il faut attendre 2017 pour que Francis Heaulme soit finalement jugé. Les Assises de Metz condamnent le criminel, déjà incarcéré pour le meurtre de huit autres victimes, à la perpétuité pour les assassinats des deux enfants. Mais en l'absence de preuve matérielle et d'aveux de l'accusé, le dossier est bien maigre. La défense fait appel.
Un doute également présent du côté des parties civiles. La famille de Cyril Beckrich a déclaré ne pas croire en la culpabilité de Francis Heaulme:
"On n'attend rien de ce procès. On a des impressions, des intuitions [mais] on ne soutiendra pas l'accusation parce qu'une partie civile ne peut se contenter d'une intime conviction", assure leur avocat, Maître Dominique Rondu.
Le procès doit se dérouler sur deux semaines. Plus de 80 témoins vont être entendus. Le verdict est attendu le 21 décembre.