Affaire Sophie Le Tan: le suspect déjà jugé pour la disparition d'une autre jeune femme

Le suspect principal dans la disparition d'une étudiante de 20 ans à Strasbourg avait été acquitté en 2001 dans une autre affaire très semblable. Françoise Hohmann s'était volatilisée en septembre 1987 après avoir croisé la route de Jean-Marc Reiser. Son corps n'a jamais été retrouvé.

Ce sont deux histoires étrangement similaires qui ont pour point commun Jean-Marc Reiser. Le principal suspect dans l'affaire de la disparition de Sophie Le Tan, une étudiante de 20 ans, à Strasbourg, l'homme aujourd'hui âgé de 58 ans a été mis en cause dans un dossier similaire il y a plus de 30 ans. Jugé en 2001 pour la disparition d'une jeune femme de 23 ans, là encore à Strasbourg, Jean-Marc Reiser avait été acquitté par la cour d'assises du Bas-Rhin au bénéfice du doute.

Comme Sophie Le Tan, Françoise Hohmann était une jeune femme menue, pas très grande. Représentante en aspirateur, la jeune femme de 23 ans a croisé la route de Jean-Marc Reiser en septembre 1987. Le jour de sa disparition, Françoise Hohmann fait sa tournée dans le quartier de Hautepierre, à l'ouest de Strasbourg. Comme à chaque fois dans son métier, elle procède de la même manière. Elle monte dans une première tour, se rend au dernier étage, puis, en redescendant, frappe aux portes de chaque résidant pour leur proposer ses produits.

Reiser, le dernier à avoir vu la victime

Après avoir visité deux tours, Françoise Hohmann se rend dans un troisième immeuble. Là encore, elle monte tout en haut, sonne à quelques étages avant de frapper à celle de Jean-Marc Reiser. L'enquête a démontré que les voisins du dessus ont bien été sollicité par la jeune femme, les habitants du dessous n'ont jamais croisé sa route. "Le cas échéant, la dernière visite de Françoise était donc à Jean-Marc Reiser", rappelle Me Valérie Gletty, l'ancienne avocate de la famille de la victime à l'époque, expliquant que le suspect a reconnu avoir ouvert la porte à la représentante avant de lui dire qu'il n'était pas intéressé.

Si les soupçons se portent naturellement sur Reiser, la voiture de Françoise Hohmann est elle retrouvée à quelques kilomètres du domicile du suspect près de la gare de Strasbourg. Un élément qui aurait pu laisser penser que la jeune femme, lasse de son travail, avait décidé de reprendre sa voiture et aurait fait une mauvaise rencontre. Un élément intrigue pourtant: le siège conducteur de son véhicule a été reculé au maximum. La représentante, de petite taille, aurait donc eu des difficultés à conduire. Mais Reiser a un alibi solide: sa compagne assure avoir passé la journée et la nuit avec lui.

"Le fantôme de Françoise"

En l'absence de corps, elle va rebondir à l'aune de deux éléments. L'ex-maitresse de Jean-Marc Reiser va revenir sur son témoignage et assure avoir été forcée de mentir par son compagnon. "Quand on a un faux alibi, on a forcément quelque chose à cacher", estime Me Gletty. Par ailleurs, l'homme va être impliqué dans deux affaires de viol, commis en 1995 et 1996. Dans son véhicule, les enquêteurs découvriront un produit anesthésiant, une corde et une pelle. "C'est comme ça qu'il s'est retrouvé aux assises", poursuit l'avocate.

Le procès pour la disparition de Françoise Hohmann a lieu en 2001 devant la cour d'assises du Bas-Rhin. S'il demeure des soupçons, la justice ne dispose pas d'éléments matériels et concrets pour condamner l'accusé, à une époque où les techniques poussées de la police scientifique en sont à leurs balbutiements. Jean-Marc Reiser est acquitté au bénéfice du doute. "A l'aune de ce que l'on vient de découvrir, on se dit qu'on a affaire à quelqu'un qui est peut-être un tueur", reconnait l'ancienne avocate de la famille Hohmann.

"Si un jour il est jugé, le fantôme de Françoise Hohmann planera", conclut Me Valérie Gletty.

Justine Chevalier