39 morts, aides acheminées, risque d'épidémie... Mayotte connaît un Noël difficile après le cyclone Chido

Les jours passent, les débris sont toujours entassés et les denrées alimentaires rationnées. Près de deux semaines après le passage du cyclone Chido à Mayotte, les Mahorais peinent à se reconstruire, malgré le déploiement des secours sur le territoire.
Le cyclone le plus dévastateur qu'ait connu Mayotte depuis 90 ans a causé le 14 décembre des dommages colossaux dans le département le plus pauvre de France, où les secours sont depuis à pied d'oeuvre pour venir en aide aux habitants.
Ce mercredi 25 décembre, le Premier ministre François Bayrou a tenu, en visio-conférence depuis Pau, une réunion consacrée à Mayotte, et notamment à la question du logement et de la reconstruction, avec quelques ministres dont le nouveau titulaire du portefeuille de l'Outre-mer Manuel Valls, a indiqué Matignon.
Le chef du gouvernement a insisté sur l'urgence de "présenter des solutions concrètes le plus vite possible".
"La solidarité ne peut pas être seulement dans les mots, il faut qu'elle soit dans la réalité", a affirmé le Premier ministre.
• 39 morts et plus de 4.000 blessés
Le bilan humain s'élève désormais à 39 morts, selon un nouveau décompte publié ce mardi par le préfet de Mayotte dans un communiqué. Le nombre de blessés recensés s'établit par ailleurs à 4.136 blessés légers et 124 blessés graves, selon le ministère de l'Intérieur. Les dégâts engendrés par les vents violents de l'ouragan compliquent le travail de déblayage dans les quartiers précaires, majoritairement détruits.
"Par conséquent, cette difficulté nous conduit à être extrêmement prudents sur le nombre de victimes", a déclaré à BFMTV François-Xavier Bieuville, préfet de Mayotte.
"Il n'y a aucun point du territoire auquel nous n'accédons pas et auquel nous n'apportons pas de protection", a-t-il ajouté. Au total, 34 opérations ont été menées ces derniers jours pour rechercher les personnes disparues dans une quinzaine de secteurs identifiés, selon le ministère de l'Intérieur, qui précise que "des drones sont également engagés sur ces opérations".
• 630.000 litres d'eau et plusieurs tonnes de nourritures acheminés
Au lendemain du passage du cyclone, un pont aérien a été mis en place entre Mayotte, La Réunion et l'Hexagone, permettant la livraison de plus de 100 tonnes de matériel par jour dans l'archipel de l'océan Indien.
Du 15 au 24 décembre, 72 vols ont été effectués afin de transporter les renforts, du matériel, de la nourriture et de l'eau. 65 tonnes de nourriture ont été distribuées à la population jusqu'ici. Au total, 630.000 litres d'eau et 65 tonnes de nourriture ont déjà été livrés à Mayotte, selon les autorités.
À Mtsahara, village côtier à la pointe nord de l'archipel, près duquel s'est engouffré l'oeil du cyclone, la première distribution de nourriture a eu lieu mercredi matin. Après une longue file d'attente, les habitants sont repartis avec quelques boîtes de conserve, du sucre, de la farine et deux bouteilles d'eau minérale.
"Il n'y en aura pas pour tout le monde", a prévenu Anli Mari Moussa, agent municipal, qui supervise la distribution. "On reçoit trop peu de nourriture. Et pour les déchets, les débris, c'est pareil, on se débrouille tout seuls", a-t-il expliqué à l'AFP.
D'après la préfecture, "la distribution de l'eau, des denrées alimentaires et matériels de première nécessité à toute la population monte en puissance" et "toutes les communes ont été livrées une ou plusieurs fois" au 24 décembre.
• Électricité, réseau mobile, stations Starlink
Alors que le réseau téléphonique de l'archipel est complètement détruit, le préfet de Mayotte a indiqué à BFMTV que les autorités ont équipé les communes mahoraises de stations Starlink, le satellite fournisseur d’accès à Internet de la société SpaceX d’Elon Musk, pour aider à rétablir les communications.
Selon le ministère de l'Intérieur, 63% de la population était couverte par le réseau mobile mardi 24 décembre et 37% ont désormais accès à l'électricité, soit environ 20.000 foyers.
• Plus 3.900 agents des forces de l'ordre déployés
Plus de 3.900 membres (dont 1.500 en renfort) de la sécurité civile, de la police, de la gendarmerie et des armées sont engagés à Mayotte, ont précisé les autorités ce mercredi.
Sur le terrain cependant, "on a beaucoup, beaucoup de mal à avoir des aides", constatait Saïd Salim, responsable départemental de l'action sociale de Mayotte, lors d'une réunion lundi entre élus et membres de l'Union nationale des centres communaux d'action sociale. Lui décèle dans la situation un "effet de communication pour dire 'on maîtrise'". "Mais sur le terrain, il y a un écart."
• Environ 100 personnes accueillis chaque jour à l'hôpital de campagne
Installé dans un stade dans l'est de Mamoudzou, un hôpital de campagne équipé d'une maternité et de deux blocs opératoires a ouvert ses portes tôt mardi matin, conçu pour pouvoir recevoir 100 personnes par jour en consultation et assurer 30 hospitalisations.
L'hôpital de Mamoudzou, le seul de l'archipel de Mayotte, a été en partie détruit par les intempéries, notamment dans les services de réanimation, d'urgences et la maternité. Bien qu'il continue à accueillir les patients, il est actuellement saturé.
Une clinique mobile est également déployée par "Médecin sans frontière" qui parcourt l'archipel pour apporter des soins dans les zones les plus reculées comme les bidonvilles. "On a beaucoup de traumatologies et de plaies qui ne sont pas forcément prises en charge au bon moment ou pas du tout", a expliqué Mehdi, médecin de l'ONG, à BFMTV.
• Un risque d'épidémie
Dans les rues de l'archipel dévasté, les déchets s'accumulent et les risques sanitaires inquiètent. À Mayotte, département le plus pauvre de France, l'habitat est majoritairement précaire et les conditions sanitaires déjà mauvaises au quotidien pour de nombreux habitants, avant même le passage du cyclone.
"Il faudra une veille sanitaire très forte avec la détection de possibles maladies contagieuses émergentes venant de la consommation d'eau polluée ou d'aliments avariés", avait-elle déclaré l'ancienne ministre de la Santé, Geneviève Darrieussecq, à BFMTV, le 16 décembre.
Parmi les maladies redoutées, le choléra inquiète particulièrement les autorités, la maladie se propageant via la consommation d'eau ou d'aliments souillés et pouvant provoquer des diarrhées aiguës, voire entraîner la mort par déshydratation. L'archipel avait cette année été victime d'une épidémie, qui avait fait au moins 5 morts entre mars et juillet, mais elle avait disparu depuis l'été.
Une nouvelle réunion consacrée à Mayotte est prévue ce jeudi 26 décembre en fin de matinée à Matignon. François Bayrou a récemment indiqué qu'il entendait se rendre à Mayotte rapidement après la formation de son gouvernement, dont la composition a été annoncée lundi soir.
De son côté, le ministre des Outre-mer Manuel Valls a confirmé ce mercredi qu'il se rendrait sur l'île "avec le Premier ministre le plus vite possible". La ministre du Travail et de la santé, Catherine Vautrin a, quant à elle, indiqué BFMTV que Mayotte "fera partie de (ses) tous premiers déplacements".