Pourquoi les chutes de neige sont si difficiles à prévoir avec précision

La Tour Eiffel sous la neige, le 7 février 2018. - Thomas SAMSON / AFP
Que vous soyez resté bloqué sur la route ou que vous en ayez profité pour alimenter votre compte Instagram, impossible d’y échapper: l’Île-de-France est recouverte par la neige. Le phénomène avait bien été prévu par Météo France depuis plus de 48h. Mais chez les prévisionnistes, les épisodes neigeux en plaine et leur intensité sont toujours un moment délicat. Beaucoup plus que quand il s’agit de prévoir la pluie ou la force du vent.
Concrètement, les flocons se mettent à tomber quand une perturbation se forme avec deux masses d’air en conflit: l’une douce et humide, l’autre froide. Le facteur clé quand il s’agit de prédire les chutes de neige, c’est la température. En plaine, la neige se forme lorsque le thermomètre tourne autour de 0°. "Aujourd’hui on fait des prévisions de température à 2° près. Dans le cas de la neige, ça se joue à peu de choses près, mais ça change tout", remarque Frédéric Nathan, prévisionniste chez Météo France.
"Les modèles météos ne sont pas suffisamment fins pour prévoir des phénomènes sur un microclimat de quelques kilomètres"
Une fois que la certitude d’une chute de neige est établit, il reste encore à déterminer si celle-ci tiendra au sol. "Il y a des moments où on est sûr, par exemple quand on sait que les sols sont déjà froids. Mardi, en début d’après-midi, il y avait déjà 5cm à Roissy quand il n’y avait qu’un centimètre au Parc Montsouris. Il a fallu que la neige tombe de façon plus intense et que les sols se refroidissent", reprend Frédéric Nathan.
Voilà l’autre difficulté, quand il s’agit des zones urbaines, et donc de l’Île-de-France: "La différence entre Paris et la lointaine banlieue peu urbanisée est parfois très importante, explique Guillaume Séchet, météorologue qui collabore à BFMTV et qui a fondé le site meteo-villes.com. Les modèles météos ne sont pas suffisamment fins pour prévoir des phénomènes sur un microclimat de quelques kilomètres". Moralité? "Sur le détail d’une ville comme Paris il faut énormément d’éléments de calculs pour prévoir la différence avec le reste de la région".
"Il est fréquent qu’il neige en haut de la Tour Eiffel et qu’il pleuve en dessous"
Entre Paris et sa banlieue plus ou moins proche, la différence de l’épaisseur de la couche de neige peut en effet atteindre 5 à 10cm. Cette fois, c’est l’altitude qui joue. "Il y a une différence avec la vallée de la Seine qui est à 30m d’altitude et le plateau de Saint-Quentin-en-Yvelines ou le massif de de l’Hautil, près de Pontoise, qui sont à 150m, poursuit Guillaume Séchet. Les Parisiens ne le savent pas, mais il est même fréquent qu’il neige en haut de la Tour Eiffel et qu’il pleuve en dessous. J’ai déjà vu des gros morceaux de neige tomber sur le Champ de Mars. Les touristes se demandaient ce que c’était parce qu’il ne neigeait absolument pas à Paris".
Chez Météo France, on prévoit un nouvel épisode neigeux vendredi – moins prononcé que celui de mardi - sur l’Île-de-France. Et en un sens, c’est presque une bonne nouvelle. "Les modèles sont de plus en plus fiables et précis, assure Frédéric Nathan. Mais il faut beaucoup de cas pour les améliorer. Et comme il ne neige plus beaucoup en Île-de-France, ça reste difficile. La tempête de 1999, on l’avait très mal vue, alors qu’aujourd’hui on les prévoit beaucoup mieux".