"Que justice soit faite aux Syriens": Bachar al-Assad visé par un mandat d'arrêt français

Photo du président syrien Bachar al-Assad assistant à une réunion internationale à Ryad, fournie par l'agence de presse saoudienne SPA, le 11 novembre 2023 - AFP
"L'aboutissement d'un long combat pour la justice": le président syrien déchu Bachar al-Assad, réfugié en Russie, est visé par un nouveau mandat d'arrêt pour complicité de crime de guerre émis par des juges français, pour le bombardement d'une zone d'habitations civiles imputé au régime à Deraa en 2017.
Il s'agit du deuxième mandat d'arrêt émis par des juges français, du pôle crimes contre l'humanité du tribunal judiciaire de Paris, visant l'ancien dictateur, renversé début décembre 2024 par la coalition rebelle dominée par le groupe islamiste Hayat Tahrir al-Sham (HTS).
Six dignitaires de l'armée syrienne visés par des mandats d'arrêt
"Un mandat d’arrêt a été émis par la justice française contre Bachar el-Assad : les crimes du régime, dont j’ai pu mesurer l’horreur à la prison de Sednaya, ne doivent pas rester impunis", a écrit sur X Jean-Noël Barrot, le ministre des Affaires étrangères.
Ce mandat a été mis au terme d'investigations établissant que Salah Abou Nabout, un ressortissant franco-syrien âgé de 59 ans, ancien professeur de français, est décédé le 7 juin 2017 à la suite du bombardement de son domicile à Deraa par des hélicoptères de l'armée syrienne.
Six hauts dignitaires de l'armée syrienne sont déjà visés par des mandats d'arrêt pour complicité de crime de guerre, dans le cadre de cette information judiciaire ouverte en 2018.
"Cette affaire représente l'aboutissement d'un long combat pour la justice, à laquelle moi et ma famille avons cru dès le départ", a déclaré dans un communiqué Omar Abou Nabout, fils franco-syrien de la victime.
Il espère qu'"un procès aura lieu et que les auteurs seront arrêtés et jugés, où qu'ils se trouvent". En novembre 2023, un premier mandat d'arrêt a été émis contre Bachar al-Assad pour les attaques chimiques imputées à son régime le 5 août à Adra et Douma (450 blessés) et le 21 août 2013 dans la Ghouta orientale, où plus de mille personnes, selon les renseignements américains, ont été tuées par du gaz sarin.
Tout en considérant "vraisemblable" la participation de Bachar al-Assad à ces attaques, le ministère public conteste au nom de l'immunité personnelle le bien fondé juridique de ce mandat, validé en appel, émis alors que Bachar al-Assad était encore chef de l'État.
La Cour de cassation doit examiner le pourvoi du parquet général de la cour d'appel de Paris le 26 mars. Au total, la justice française a émis 14 mandats d'arrêt contre de hauts dignitaires syriens.
Le procureur de la Cour pénale internationale à Damas
Parmi les personnes visées figurent trois hommes condamnés par défaut à Paris à la réclusion criminelle à perpétuité en mai 2024, pour avoir joué un rôle, du fait de leur place dans la chaîne hiérarchique, dans la disparition forcée et la mort de deux citoyens franco-syriens, Mazzen Dabbagh et de son fils Patrick, arrêtés en 2013.
"Ces avancées doivent maintenant bénéficier aux Syriens, qui sont les plus à même de concevoir le processus de justice transitionnelle en Syrie qu'ils appellent de leurs voeux depuis tant d'années", a réagi dans le communiqué Clémence Bectarte, avocate d'Omar Abou Nabout et du Centre syrien pour les médias et la liberté d'expression (SCM), parties civiles.
Le 17 janvier, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a rencontré à Damas le nouveau dirigeant syrien, Ahmad al-Chareh, afin d'examiner comment soutenir les efforts des nouvelles autorités en vue de rendre justice pour les crimes présumés commis sous l'ère Assad.
Déclenché en 2011 après la répression sanglante de manifestations antigouvernementales, le conflit en Syrie a fait plus d'un demi-million de morts et morcelé le pays.