BFMTV
Europe

Le chef du renseignement allemand met en garde contre la "guerre hybride" menée par la Russie contre l'Otan

Bruno Kahl, le patron des services d'espionnage et contre-espionnage allemands (BND), le 8 février 2019 (photo d'illustration)

Bruno Kahl, le patron des services d'espionnage et contre-espionnage allemands (BND), le 8 février 2019 (photo d'illustration) - John MACDOUGALL / AFP

Le président du Service fédéral de renseignement allemand estime que les "actes de sabotage" russes pourraient pousser l'Otan à invoquer l'article 5 de l'alliance transatlantique.

Les actes de sabotage de la Russie contre des cibles occidentales pourraient à terme inciter l'Otan à envisager d'invoquer l'article 5 de la clause de défense mutuelle de l'alliance, a déclaré ce mercredi 27 novembre le chef du service de renseignement extérieur allemand, dans des propos rapportés par Reuters.

Lors d'un événement du think-thank DGAP à Berlin, Bruno Kahl a dit s'attendre à ce que Moscou intensifie encore cette "guerre hybride".

"Le recours massif à des mesures hybrides par la Russie augmente le risque que l'Otan envisage à terme d’invoquer sa clause de défense mutuelle de l'article 5", a-t-il affirmé.

Cet article stipule qu'une attaque contre un membre déclenche une riposte de l'Alliance. Il introduit le principe de défense collective et affirme qu'une attaque contre un pays membre est une attaque contre tous les pays membres. Cet article sert surtout de force dissuasive contre toute potentielle agression, notamment car plusieurs membres de l'Otan sont dotés de l'arme nucléaire.

Multiplications des accusations

Le secrétaire général de l'organisation, Mark Rutte, a averti au début du mois que Moscou menait "une campagne de plus en plus intense d'attaques hybrides" contre des cibles occidentales, et a déclaré que la ligne de front de la guerre menée par la Russie en Ukraine s'était étendue à la région de la Baltique et à toute l'Europe, rapporte Euronews.

Il y a quelques jours, des câbles de communication ont été endommagés en mer Baltique. Dans une déclaration commune, les ministres des Affaires étrangères de six pays européens, dont la France, ont accusé la Russie de mener une "escalade des activités hybrides contre l’Otan et les pays de l'UE".

En juillet, CNN avait rapporté que les États-Unis et l'Allemagne avaient déjoué un projet d'assassinat attribué à la Russie contre le patron d'un groupe industriel qui fournit de l'armement à l'Ukraine. Des accusations rejetées par Moscou.

En marge d'un sommet de l'Otan en juillet, la première ministre danoise avait également déclaré que la Russie "nous (les nations européennes) attaquait tous les jours" avec des tactiques de guerre hybride.

"Je pense que nous devons prendre cela beaucoup plus au sérieux... nous sommes simplement trop polis", avait-t-elle déclaré, selon Euronews.

Tester l'unité de l'Otan

Le chef du service de renseignement extérieur allemand a également affirmé que l'armée russe serait probablement capable d'attaquer l'OTAN d'ici la fin de la décennie, mais que si elle devait frapper un ou plusieurs membres, elle ne le ferait pas pour s'emparer d'un territoire: les dirigeants russes viseraient plutôt l'échec de l'Otan en tant qu'alliance défensive.

En faisant de telles déclarations, Bruno Kahl veut provoquer une prise de conscience. En effet, les services allemands doutent du respect par les États-Unis de l'obligation d'assistance prévue à l'article 5. "Pour l'instant, il n'y a pas encore d'indications sur des intentions de guerre concrètes de la Russie. Mais si de telles opinions prennent le dessus à Moscou, le risque d'une confrontation militaire va augmenter", estime Bruno Kahl dans des propos rapportés par Les Échos.

Pour lui, "la Russie va tester les lignes rouges de l'Occident", après avoir constaté sa relative solidité au début de la guerre en Ukraine.

Salomé Robles