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Trump, Poutine, l'Otan: Angela Merkel revient sur seize années à la tête de l'Allemagne

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Alors que l’Allemagne est plongée dans une crise politique, Angela Merkel publie ses mémoires intitulées Liberté. Confessions assumées sur seize années au pouvoir.

Elle assume. Dans ses mémoires, Angela Merkel, qui a passé 16 ans à la tête de la première économie européenne défend ses décisions et notamment son refus en 2008 d'accueillir l'Ukraine dans l'Otan.

"Nous aurions assisté à un conflit militaire encore plus tôt (...) Poutine ne serait pas resté les bras croisés", dit-elle.

Elle décrit un homme "toujours prêt à infliger des punitions".

Depuis le début de l’invasion russe, lancée quelques mois seulement après son départ, l’ex-chancelière a été accusée de complaisance à l'égard du président russe.

Après le massacre de Bucha, Volodymyr Zelensky avait invité Angela Merkel et Nicolas Sarkozy - qui s’était également opposé à une adhésion - à se rendre dans la ville pour constater l'impact de "14 ans de concessions à la Russie".

Durant ses années au pouvoir, l'Allemagne et ses grandes industries gourmandes en énergie sont devenues dépendantes de Moscou. Le pays a construit deux gazoducs directement reliés à la Russie mais Angela Merkel se défend. Elle avait deux priorités en tête à l’époque: les intérêts commerciaux de l'Allemagne et le maintien de relations pacifiques avec le Kremlin.

Trump "fasciné" par les autocrates

Donald Trump dans son livre. Et on sent bien qu’elle n’est plus soumise à un devoir de réserve. Le portrait n’est pas flatteur. Elle décrit un homme "fasciné" par les autocrates, agissant "sur un mode émotionnel" et qui abordait tout comme le promoteur immobilier qu’il était.

Elle revient sur leurs interactions et particulièrement leur première rencontre en 2017 à la Maison Blanche. Une rencontre qualifiée d’embarrassante à l’époque par le The New York Times. Donald Trump avait alors obstinément refusé de serrer une nouvelle fois la main de la chancelière alors même que les photographes insistaient. Concernant leurs discussions, elle se souvient:

"lI semblait que son principal objectif était de culpabiliser son interlocuteur. Et en même temps, j'avais l'impression qu'il voulait aussi que son interlocuteur l'apprécie", dit-elle.

Durant quatre ans, leurs relations ont été tendues, parfois même houleuses. "Pour lui, tous les pays étaient en concurrence. Il ne pensait pas que la prospérité de tous pouvait être accrue par la coopération".

A noter qu’elle révèle avoir souhaité "de tout son cœur" une victoire de Kamala Harris.

Confessions au Pape

Autre révélation, les relations étaient si difficiles avec Trump qu’elle a même fait appel au Pape. Peu de temps après leur rencontre, Trump l'a informée de son intention de se retirer de l'accord de Paris sur le climat. C’est là qu’elle a demandé conseil au pape François.

"Sans citer de noms, je lui ai demandé comment il gèrerait des opinions fondamentalement opposées au sein d'un groupe de personnalités importantes", explique-t-elle. Réponse du souverain pontif: "pliez, pliez, pliez, mais assurez-vous que cela ne se brise pas".

Angela Merkel qui, aujourd’hui à quelques conseils à donner aux dirigeants européens sur la manière de gérer leurs relations avec Donald Trump.

Dans un entretien accordé à la BBC, elle explique qu’"il est très important de connaître ses priorités, de les lui présenter clairement et de ne pas avoir peur".

L’ex-chancelière dit recevoir ces jours-ci des appels de dirigeants du monde entier lui demandant conseil. À la question, est-ce que le pouvoir et la politique vous manquent, elle répond sans tarder: "non, pas du tout".

Caroline Loyer