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Brésil

Prison imminente pour Lula, l'ancien président brésilien condamné pour corruption

Luiz Inacio Lula da Silva le 24 avril 2017

Luiz Inacio Lula da Silva le 24 avril 2017 - Evaristo Sa-AFP

L'arrestation de celui qui était donné en tête des intentions de vote pour la présidentielle d'octobre est imminente. L'ancien président brésilien doit purger une peine de douze ans de prison.

L'ex-président brésilien Lula, mythe vivant de la gauche, pourrait se retrouver prochainement derrière les barreaux après le rejet ce jeudi par la Cour suprême d'une demande d'habeas corpus pour lui éviter la prison avant l'épuisement de tous les recours possibles.

Selon de nombreux juristes, il ne devrait pas se retrouver derrière les barreaux avant la semaine prochaine, la date de mardi étant annoncée comme la plus probable.

Un gigantesque scandale de corruption

Une décision loin d'être unanime: la demande a été rejetée par six voix contre cinq, à l'issue de débats qui se sont étendus onze heures durant, à six mois d'une élection présidentielle pour laquelle il était donné favori.

Bien que très serré, ce résultat est une victoire éclatante pour les procureurs de l'opération "lavage-express", enquête tentaculaire qui a mis au jour un gigantesque scandale de corruption impliquant des hommes politiques de tous bords.

Ancien ouvrier parvenu au sommet de l'État, Luiz Inacio Lula da Silva, 72 ans, une des personnalités politiques les plus charismatiques de ce début de siècle en Amérique Latine, pourrait être incarcéré dans les prochains jours. L'icône de gauche devra purger une peine de douze ans et un mois de prison pour avoir reçu un luxueux appartement en bord de mer de la part d'une entreprise de bâtiment en échange de faveurs dans l'obtention de marchés publics.

Il invoque l'absence de preuves

L'ex-président (2003-2010) nie farouchement, invoquant l'absence de preuves et dénonçant un complot visant à l'empêcher de briguer un troisième mandat, huit ans après avoir quitté le pouvoir avec un taux de popularité record.

"Je veux juste que la Cour suprême rende justice. Je ne veux aucun bénéfice personnel et qu'elle indique quel crime j'ai commis", avait déclaré Lula lundi à Rio de Janeiro.

"Toute décision judiciaire est importante, mais certaines ont une plus grande répercussion que d'autres", avait déclaré la présidente de la plus haute juridiction du Brésil, Carmen Lucia, au début de cette audience très attendue. C'est elle qui a prononcé l'ultime vote qui a entériné le rejet de la demande de Lula, quand le résultat partiel était de cinq voix partout.

Une peine de prison peut être purgée dès condamnation

Mais le coup fatal a été porté par la juge Rosa Weber, dont le vote était annoncé comme celui qui ferait pencher la balance, sa position étant présentée comme la plus indécise. Quatrième à voter, elle s'est finalement prononcée contre l'habeas corpus, après avoir maintenu le suspense pendant près d'une heure avec un argumentaire très technique.

Lula a suivi l'audience dans la ville où il réside, Sao Bernardo do Campo, près de Sao Paulo, plus précisément au siège du syndicat des métallurgistes, qu'il a dirigé dans les années 70, où plusieurs dizaines de ses partisans se sont rendus dès le matin.

Une décision de la Cour suprême datant de 2016 stipule que toute peine de prison peut commencer à être purgée dès la condamnation en seconde instance, ce qui est le cas pour Lula, dont le premier recours a été rejeté par une cour d'appel fin janvier.

La prise de position du chef de l'armée

Mais un jugement favorable en ce qui concerne la demande d'habeas corpus aurait pu changer la donne et faire jurisprudence, permettant en théorie à tous les condamnés de rester en liberté jusqu'à l'épuisement de tous les recours. Si les partisans de Lula mettent en avant la présomption d'innocence, ses opposants réclament son incarcération avec véhémence.

Le général Eduardo Villas-Boas, chef de l'armée brésilienne, avait publié mardi soir sur Twitter un message dans lequel il indique que les militaires "partagent le sentiment des Brésiliens qui répudient toute impunité". Même si elle ne fait pas référence explicite à Lula, cette publication laisse entendre une rare prise de position de l'armée dans un pays qui vivait encore sous le joug de la dictature militaire (1964-1985) il y a une trentaine d'années.

Amnesty International a considéré que la déclaration du général était "un grave affront à l'indépendance des pouvoirs et une menace envers l'État démocratique".

C.H.A. avec AFP