Nicolas Bedos raconte la fin de vie de Guy Bedos dans un texte en faveur de l'euthanasie

Nicolas Bedos en avril 2015. - Thomas Samson - AFP
En juin dernier, Nicolas Bedos adressait une lettre ouverte poignante à son père, Guy Bedos, mort quelques jours plus tôt à l'âge de 85 ans. Dans un nouveau témoignage publié ce mercredi par L'Obs, le réalisateur raconte comment il a aidé l'humoriste à mourir. Une prise de parole qui intervient alors qu'une proposition de loi sur l'euthanasie fait l'objet d'un débat de société.
Nicolas Bedos revient d'abord sur la souffrance que son père a subie au cours de ses derniers mois, victime d'une maladie "cousine d'Alzheimer":
"Avril 2020. Il a du mal à respirer. Il ne mange plus depuis des semaines, la maladie, le confinement, la confusion, relate-t-il. Ma mère, à bout de nerfs et de vigilance, est extirpée de son demi-sommeil par des cris. Tant bien que mal, elle le soulève, le rassure, le borde. Elle déteste le ramasser. Elle déteste le voir détester qu’elle le ramasse, supporter ce regard où se mélangent toujours la détresse et l’orgueil (...) Elle n’en peut plus d’être bouleversée. Il n’en peut plus de ne pas comprendre. Des mois que ça dure."
La famille décide de ne pas l'hospitaliser car, "en pleine épidémie", ce serait "l'envoyer au diable": "Il est donc décidé que (notre) père mourra dans sa chambre, pas loin de nous, près de sa femme et de ses chats."
Défenseur du droit à mourir dans la dignité
Guy Bedos militait auprès de l'Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité. Son fils lui demande s'il souhaite partir: "Il me répond par un silence, balancé droit dans les yeux. Nous en sommes réduits à traduire ce qu'il ne dit plus", raconte Nicolas Bedos. La famille décide de contacter un médecin que connaissait l'humoriste, surnommé le "docteur T.", qui ne répond pas.
"Un médecin me maile une ordonnance de Rivotril, un antiépileptique couramment utilisé dans ces cas-là", raconte Nicolas Bedos. "Je me revois sur mon scooter, me rendant à la pharmacie pour acheter la mort de l’homme que j’aime le plus au monde.”
Finalement, le médicament ne sera pas utilisé. Le docteur T. se manifeste mais juge d'abord Guy Bedos "trop lucide" pour réaliser une intervention. "La nuit suivante sera la dernière. Longue. Bouleversante. Le lendemain, le flacon (de Rivotril) est plein. Mon père n'en a pas eu besoin pour offrir à son médecin l'état somnolent apparemment nécessaire à une intervention - qui eut lieu vers 17 heures."
Débat clivant
Nicolas Bedos pointe du doigt "les limites de la loi actuelle", qui "laisse nos soignants dans un flou d’interprétation qui les plonge eux-mêmes dans des dilemmes éthiques"; "Ce n’est pas le chagrin qu’il s’agit de livrer ici, c’est la question du choix, c’est la violence des épreuves imposées, en plus du reste, par la loi", écrit-il.
Une proposition de loi du député Olivier Falorni (groupe Libertés et Territoires) a été examinée à l'Assemblée nationale le 8 avril. Mais en raison d'une vive levée de boucliers de nombreux députés, qui avaient déposé quelque 3000 amendements, les travaux n'ont pas dépassé l'article premier. Vendredi dernier, environ 300 députés de tous bords, soit plus de la moitié de l'Assemblée nationale, ont demandé au Premier ministre d'inscrire cette proposition de loi à l'ordre du jour.