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Féminicides: la France est-elle plus touchée que ses voisins européens?

Des personnes dénonçant les féminicides en France le 19 octobre 2019 à Paris. (photo d'illustration)

Des personnes dénonçant les féminicides en France le 19 octobre 2019 à Paris. (photo d'illustration) - DOMINIQUE FAGET / AFP

Cette année, plus de 115 femmes ont déjà été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint dans l'Hexagone.

C'était une mobilisation historique. Près de 49.000 personnes ont manifesté, ce samedi à Paris, pour dénoncer les violences faites aux femmes, d'après un décompte indépendant réalisé par le cabinet Occurrence pour un collectif de médias dont BFMTV. Une manière pour le collectif #NousToutes de dénoncer les féminicides recensés depuis le début de l'année.

Déjà plus de 115 meurtres de femmes par leur conjoint ou ex-conjoint ont été comptabilisés par diverses institutions, qui ne parviennent cependant pas à se mettre d'accord sur un chiffre précis pour le moment, comme l'illustre l'infographie ci-dessous.

Pressé de toute part d'agir pour faire baisser ces chiffres, le gouvernement a lancé début septembre un "Grenelle des violences conjugales", promettant des mesures "concrètes" qu'il annoncera lundi 25 novembre, et que BFMTV vous dévoile en partie ce samedi.

La France moins touchée que l'Allemagne, mais plus que l'Espagne ou l'Italie

En attendant ces mesures, la France reste le deuxième pays européen le plus concerné par les féminicides, avec 108 meurtres en 2017, derrière l'Allemagne, où l'on en recensait 153 cette même année, si on se fie aux chiffres d'Eurostat. 

Ces chiffres doivent cependant être nuancés, car tous les pays n'ont pas le même nombre d'habitants. Si on regarde les même statistiques mais en prenant en compte la population féminine de chaque état, le classement devient complètement différent.

Davantage de féminicides dans l'est de l'Europe

La Roumanie et la Hongrie passent largement en tête, avec plus de 5 homicides volontaires par million d'habitantes commis par des partenaires intimes. Mais le taux le plus élevé concerne la Finlande (6 meurtres par million d'habitante) avec un chiffre deux fois supérieur à celui de la France, qui reste toutefois mal classée. 

Même en prenant en compte la population de chaque pays, certains Etats comparables à la France semblent donc être davantage concernés par les féminicides que d'autres, comme l'Allemagne.

Une situation qui se comprend avant tout par la législation de chaque état, nous expliquait en septembre Anne-Cécile Mailfert, présidente de la Fondation des femmes. Plus la loi est stricte envers les auteurs de violences contre les femmes, plus on constate des évolutions: "en Allemagne par exemple, les lois sur le viol sont terribles, beaucoup de cas n'aboutissent pas", déplorait-elle. 

Le contre-exemple de l'Espagne

Tout le contraire de l'Espagne, où la législation a permis de sauver plus de vies qu'ailleurs. Selon France 24, le nombre de féminicides y a été considérablement réduit, passant de 76 meurtres en 2008 à 47 en 2018.

En France, si le nombre de féminicides est plus faible aujourd'hui qu'il y a dix ans, la baisse est néanmoins beaucoup moins forte qu'en Espagne, comme l'illustre la courbe ci-dessous, qui se base sur les chiffres du Ministère de l'intérieur.

L'amélioration en Espagne est due à plusieurs facteurs, comme la création de tribunaux spécialisés, la généralisation des ordonnances de protection, le développement du bracelet électronique pour les conjoints violents, la mise en place de 10.000 téléphones spéciaux permettant de se faire aider en urgence. Dans l'Hexagone, seul 3000 appareils de ce type existent.

Pour Anne-Cécile Mailfert, c'est bien la preuve que seules "des décisions politiques peuvent améliorer les choses". Selon Marlène Schiappa, certaines des mesures qui seront annoncées lundi prendront effet "dès le 25 novembre". D'autres devront faire l'objet d'une loi, dont elle a souhaité que le texte soit voté "avant la fin de l'année", soit d'ici un mois.

Louis Tanca avec AFP