Face aux critiques, Radio J annule l'interview de M. Le Pen

Marine Le Pen, lors du congrès du Front national à Tours - -
De nombreuses organisations juives s'étaient élevées contre la tribune ainsi offerte à Marine Le Pen par Radio J, un important média de la communauté juive qui n'avait jamais voulu inviter son père en raison des propos antisémites de ce dernier.
Frédéric Haziza, chef du service politique, a justifié le revirement de Radio J par l'ampleur des protestations. "Cette invitation prenait des proportions trop importantes, ce n'était plus tenable, on a été obligé d'annuler", a-t-il dit à Reuters. "Je ne comptais pas donner une tribune à Marine Le Pen, je voulais faire mon travail de journaliste, cela se termine comme ça", a-t-il ajouté.
Marine Le Pen a dénoncé les "méthodes fascistes, anti-républicaines et anti-démocratiques" des organisations juives qui ont réclamé l'annulation de sa participation au Forum politique de la radio. "Un certain nombre de personnes n'avaient pas envie que je dise la réalité, à savoir que le Front national n'est ni antisémite, ni raciste, ni xénophobe. Nos compatriotes juifs n'ont rien à craindre du Front national, bien au contraire", a-t-elle dit sur i>Télé.
Le FN avait auparavant annoncé sa décision d'engager des poursuites contre les organisations juives "qui profèrent des accusations graves, injurieuses et diffamatoires" à l'encontre de sa présidente.
"Plus dangereuse et plus habile que son père"
Frédéric Haziza avait justifié la venue de Marine Le Pen à Radio J par le fait qu'elle avait à ses yeux "remis en cause tout l'héritage négationniste du Front national et de son père". Début février, dans l'hebdomadaire Le Point, Marine Le Pen a en effet affirmé que ce qui s'est "passé" dans les camps nazis "est le summum de la barbarie". Le journaliste avait également insisté sur le fait que les questions posées à Marine Le Pen seraient "sans complaisance". "A partir du moment où elle désavouait les déclarations de son père, je pensais qu'il était possible de l'interviewer", a-t-il dit mercredi.
La nouvelle chef de file du FN voyait pour sa part dans cette invitation le signe que ses efforts pour "dédiaboliser" le parti et se démarquer des positions de son père Jean-Marie Le Pen sur la Shoah avaient porté leurs fruits. Marine Le Pen cherche depuis des années à se rapprocher de la communauté juive, ce qui lui a récemment valu des critiques parmi ses opposants au sein du parti d'extrême droite.
Mais dès l'annonce de l'invitation de la présidente du FN, mardi, les protestations n'avaient cessé de monter dans la communauté juive de France. Le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif), Richard Prasquier, avait ainsi jugé cette initiative "irresponsable". "Cela ne sert à rien, car elle est bien plus dangereuse et plus habile que son père", avait-il dit au site d'information European Jewish press (EJP). Le Bureau national de vigilance contre l'antisémitisme assurait avoir reçu "de très nombreuses réclamations de membres de la communauté juive choqués de l'invitation". "Marine Le Pen n'a pas réellement donné de signe de changement et il y a des gens derrière elle qui sont des négationnistes, des révisionnistes, des antisémites notoires", déclarait son président, Sammy Ghozlan, dans un communiqué. L'Union des étudiants juifs de France (UEJF) regrettait également une invitation "dangereuse et malvenue".