Cop21: le saccage du mémorial aux victimes des attentats suscite l'indignation

Les bougies en hommage aux victimes des attentats ont été utilisées comme projectiles par des manifestants violents dimanche. - Joël Saget - AFP
En quelques minutes, les bougies installées en mémoire des victimes des attentats ont été balayées place de la République. "C'est une profanation, c'est indécent": sur la place parisienne, mémorial improvisé depuis les attentats de Paris, des militants radicaux n'ont pas hésité à se servir d'objets déposés en hommage aux victimes pour les jeter sur la police à la veille de la Cop2121. "Cette statue, c'est la tombe des victimes des attentats", s'étrangle Bertrand Boulet, membre de l'association "17 plus jamais", qui a entretenu le mémorial de fleurs, petits mots et bougies déposés au pied de la statue après les attentats de janvier et à nouveau après ceux du 13 novembre.
Alors que de nombreux manifestants pacifistes sont encore sur la place de la République, un face à face tendu ponctué d'échauffourées a démarré en début d'après-midi entre les forces de l'ordre et deux à trois cents manifestants, des "petits groupes violents", selon le préfet de police. Ils se sont réunis malgré l'interdiction de manifester parmi d'autres se réclamant, dans le calme, d'un mouvement "antiCOP21".
Un "monument" entretenu toutes les semaines
Encagoulés et pour certains vêtus de noir, ils ont jeté des projectiles et bouteilles en verre sur les CRS qui ont répliqué à coups de gaz lacrymogènes et de grenades assourdissantes. Une scène qui s'est reproduite à plusieurs reprises. La place a été bouclée par les CRS. Des pots de fleurs, des bris de verre et des bougies, qui ornaient la statue de la République, jonchaient le sol au pied des forces de l'ordre. Des pavés et des marteaux ont également été lancés contre les policiers, selon la préfecture de police.
Bertrand Boulet en a "mal au coeur". "On s'échine à entretenir le monument toutes les semaines, c'est le monument de tous les Français", déplore-t-il. Des incidents "indignes", a dénoncé le Premier ministre Manuel Valls, appelant au respect de "la mémoire des victimes". François Hollande a regretté les actions d'"éléments perturbateurs qui n'ont rien à voir d'ailleurs avec les défenseurs de l'environnement".
En début de soirée, une partie de la place a été rouverte à la circulation, des Parisiens revenaient se recueillir devant le mémorial. Une centaine de personnes, visage découvert, restaient encerclées par les CRS dans un coin de la place, selon des journalistes de l'AFP.
Drapeaux arc-en-ciel contre projectiles
Serena, 18 ans, cherche désespérément la bougie "marron à paillettes" déposée il y a quelques jours pour une amie qui a perdu un proche lors des attentats. "C'est désolant, c'est censé être un lieu de recueillement".
Pour éviter les dégâts et empêcher les plus virulents de se servir, des manifestants pacifiques ont formé une chaîne humaine autour de la statue. Drapeaux arc-en-ciel à la main, certains demandent aux groupes violents de cesser de jeter des projectiles. "Choisis ton camp", répond, hargneux, un manifestant. "Toi tu manifestes comme t'en as envie, moi je manifeste comme ça", rétorque un autre, hué alors qu'il cassait une poubelle.
"De quel droit peut-on ainsi cracher sur les morts, cracher sur leur mémoire ?", dit Laurène, une manifestante de 19 ans. "Cette semaine, j'ai vu un père venu exprès des États-Unis pour déposer une bougie pour sa fille tuée au Bataclan", raconte cette étudiante. Sac poubelle à la main, Nouria, qui vient trois fois par semaine nettoyer le mémorial, répare déjà les dégâts en remplaçant les fleurs et les bougies disparues ou brisées. "Ces gens n'ont aucun respect pour les morts", déplore cette quinquagénaire, qui a "essayé de les en empêcher", en vain.
En début de soirée, 208 personnes avaient été interpellées, a indiqué Bernard Cazeneuve. 174 personnes ont également été placées en gardes à vue. Les débordements en marge de sommets internationaux sur le climat sont peu fréquents, contrairement à d'autres rencontres internationales comme les G8 ou réunions de l'OMC. En 2009 toutefois, environ 300 manifestants membres des "Blacks Blocs" (militants issus de la mouvance anarchiste) selon la police avaient provoqué des incidents dans le centre-ville de Copenhague.