Cigarette électronique: la défiance des experts envers le rapport alarmiste de l'OMS

Femme vapotant lors du salon Vapexpo de Bordeaux, le 13 mars 2014. - Nicolas Tucat - AFP
Le 26 août dernier, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) rendait un rapport alarmant sur la dangerosité de la cigarette électronique. Des conclusions critiquées aujourd'hui par deux experts reconnus, dans la revue Addiction.
Ainsi Ann McNeill, professeur du Centre national des addictions au King's College de Londres et le docteur Jacques Le Houezec, spécialiste français du tabagisme et co-auteur de l'article relancent le débat, affirmant que la e-cigarette pourrait sauver plus de 50.000 vies rien qu'au Royaume-Uni. Le clivage reste patent chez les tabacologues, entre ceux qui craignent de voir l'industrie du tabac reprendre la main grâce au vapotage et ceux qui y voient un puissant moyen de sevrage.
Un rapport "trompeur" de l'OMS?
Ann McNeill l'assure sans détour: "Nous avons été surpris par le ton négatif du rapport et avons trouvé qu'il était trompeur et ne reflétait pas de manière précise les données disponibles. Les e-cigarettes sont nouvelles et nous ne disposons certes pas encore de toutes les réponses quant à leur impact sur la santé à long terme. Mais ce que nous savons, c'est qu'elles sont beaucoup plus sûres que les cigarettes (traditionnelles, ndlr), qui tuent plus de six millions de personnes par an à travers le monde."
Les experts ne pensent pas que l'utilisation de l'e-cigarette chez les jeunes soit un problème. Il est très rare que des non-fumeurs s'y convertissent, expliquent-ils. L'argument d'une avancée en sous-marin de l'industrie du tabac est donc balayé par le docteur Jacques Le Houezec qui juge que "la révolution de l'e-cigarette est le fait des consommateurs". Selon lui, "l'utilisation de la cigarette électronique pourrait sauver des millions de vies au cours de ce siècle et avoir l'impact de santé publique le plus important dans l'histoire de l'usage du tabac".
Une nocivité qui resterait à démontrer?
L'autre critique formulée envers le rapport de l'OMS est, toujours selon les auteurs de l'article, se fonde sur une incapacité à "reconnaître que les e-cigarettes ne sont pas seulement moins dangereuses que le tabac, mais que les toxines qu'elles contiennent ne représentent qu'une fraction de ce qu'on trouve dans une cigarette classique".
Un éditorial publié dans le British Journal of General Practice par des experts de l'UCL (University College London) vient appuyer cette critique et dit, en substance, que le message de l'OMS devrait se fonder sur des faits et non sur des préjugés. Le professeur Robert West, auteur principal de cette publication, explique: "Je comprends parfaitement les préoccupations au sujet des risques potentiels de ce phénomène (du passage de l'e-cigarette vers le tabagisme classique), mais il est essentiel que les experts en santé publique opèrent une distinction entre opinion et preuve et restent le plus objectif possible."