Blessé grave à Tolbiac: un témoin revient sur son témoignage

L'évacuation de la fac de Tolbiac a eu lieu vendredi. - Christophe Simon - AFP
"La première chose qu'on a vu, c'était quoi? Un gars, devant les grilles, avec la tête complètement explosée, une flaque de sang énorme." Quelques heures après l'évacuation par les CRS de l'université parisienne de Tolbiac, la rumeur enfle: un étudiant a été grièvement blessé après avoir chuté. Cinq jours après les prétendus faits, démentis à plusieurs reprises par les autorités, et alors que l'information circule toujours, cette dernière s'essouffle encore un peu. Leïla, l'une des témoins, qui se confiait alors dans Le Média, pure player proche de la France insoumise, pour relater cette scène, revient aujourd'hui pour Libération sur ses dires.
"Je ne suis pas un témoin visuel. Les témoins ne veulent pas parler aux médias, c'est pourquoi nous relatons les faits", explique-t-elle au quotidien, tout en maintenant qu'il y bel et bien eu un blessé grave ce jour-là.
Démentis des autorités
Leïla n'a pas été la seule à rapporter ces faits de violences policières. Quelques heures après l'évacuation des étudiants mobilisés contre la réforme de l'université, L'hebdomadaire Marianne publie le témoignage de Jaspal De Oliveira Gill, présidente de l'Unef à Paris 1 Panthéon-Sorbonne qui parle d'un jeune "dans le coma". Mais rapidement, la jeune femme explique au Parisien qu'elle s'est "mal exprimée", j'ai dit 'a priori dans le coma' mais je n'ai aucune confirmation pour l'instant". Le journal en ligne Reporterre diffuse plusieurs témoignages expliquant qu'un étudiant a été blessé en tentant de s'enfuir.
Rapidement, la préfecture de police de Paris va publier un communiqué pour démentir ces allégations. "Aucun blessé n'a été recensé sur cette opération", précise-t-elle avant de détailler qu'à "6h11, un jeune homme a été conduit par la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris à l'hôpital de la Pitié Salpêtrière pour une douleur au coude" mais que "l'intéressé a quitté l'établissement de lui-même à 7h30". Même version du côté de l'AP-HP qui n'a pas hésité à utiliser le terme de "fake news" et assure qu'aucun étudiant dans un état grave a été conduit dans l'un de ses services.
"Rumeur ou mensonge d'Etat?"
La rumeur a toutefois persisté. Le syndicat Sud Santé a publié un communiqué faisant état d'une source hospitalière qui parle qu'"un patient a été proposé à la grande garde de neurochirurgie mais refusé parce que ne relevant pas de la chirurgie et transféré dans un autre établissement". "Rumeur ou mensonge d'Etat?", s'interroge le syndicat qui depuis a rétropédalé. "Peu après, on a eu le démenti de SUD Santé (disant n'avoir aucune confirmation d'une hospitalisation, NDLR) et on l'a publié à la suite", rappelle à Libération Hervé Kempf, le rédacteur en chef de Reporterre.
Le journal en ligne a lui aussi fait machine arrière en revenant sur les témoignages mis en ligne. Impossible de retrouver les fameux témoins de l'accident, d'autres les décrivant comme mythomane. Reste que Reporterre tente toujours d'instiller le doute en estimant que la seule solution qui couperait court à cette rumeur serait que les autorités diffusent les images d'une caméra de vidéosurveillance installé sur les lieux de l'accident. Reste surtout que certains, et notamment chez la France insoumise, ces revirements de témoins n'ont pas eu lieu et dénoncent les méthodes journalistiques.