Covid-19: faudra-t-il une troisième dose de vaccin pour tous? Ce qu'en pensent les médecins

Un public désigné avant un rappel généralisé? En annonçant mardi soir la prise en compte de la dose de rappel pour le pass sanitaire chez les plus de 65 ans, Emmanuel Macron fait un premier pas vers une troisième dose de vaccin pour tous les Français contre le Covid-19.
"Six mois après le vaccin, l'immunité diminue et donc le risque de développer une forme grave réaugmente", a justifié le chef de l'État.
Un rappel "plus large" évoqué par l'exécutif
Autre annonce présidentielle: le lancement en décembre d'une campagne de rappel pour les 50-64 ans. De là à rendre obligatoire cette troisième dose pour le pass sanitaire des Français dans cette tranche d'âge, il n'y a qu'un pas, que l'exécutif n'a pas encore franchi.
Olivier Véran, sur le plateau de TF1 ce mercredi soir, a en effet expliqué que la question de l'intégration dans le pass sanitaire de la dose de rappel pour les 50-64 ans "viendra plus tard, en fonction notamment des conditions épidémiques".
"Je ne tranche pas encore le sujet mais c'est une question légitime", a-t-il ajouté.
"Dans quelques mois, peut-être que nous devrons faire un rappel plus large. Pour les populations les plus jeunes, nous n'avons pas encore de retour sur leur protection (plusieurs mois après deux injections)", a d'ailleurs avancé ce mercredi le ministre de la Santé devant les sénateurs.
"Ça me paraît tout à fait cohérent"
La baisse de l'efficacité vaccinale avec le temps a pourtant déjà été établie par plusieurs études scientifiques. Une immunité amoindrie qui est loin de ne concerner que le personnes âgées et les personnes fragiles.
"Ce qui serait important, c'est d'avoir un geste fort envers la troisième dose, on est nombreux à attendre l'extension de la troisième dose au-delà des catégories à risque", a soutenu Karine Lacombe mardi matin sur France Inter, soulignant que la troisième était aussi généralisée "pour tous les soignants".
"C'est ce qu'on fait depuis toujours avec la grippe", relève sur BFMTV Gilbert Deray. Le chef du service de néphrologie à la Pitié-Salpêtrière juge qu'il n'y a "rien de très étonnant" à ce que le rappel soit en définitive ouvert à tous les Français: "ça me paraît tout à fait cohérent".
"La priorité, ce sont les personnes fragiles"
Philippe Amouyel est quant à lui moins catégorique. L'épidémiologiste et professeur de santé publique au CHU de Lille ne voit pas une généralisation de la dose de rappel comme essentielle, du moins "pas maintenant". "Il faut avoir un certain nombre de priorités: vacciner ceux qui ne sont pas vaccinés et en particulier les plus fragiles et les plus âgés", défend Philippe Amouyel sur notre antenne.
Pour Éric Caumes, la troisième piqûre pour tous n'est, dans l'immédiat, pas nécessaire. "Plus nous attendons, moins ce sera indispensable, car plus les personnes auront rencontré le virus", a estimé sur LCI le chef des maladies infectieuses à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, "il faut prioriser, et la priorité, ce sont les personnes fragiles."
Christophe Rapp, infectiologue à l'hôpital américain de Paris, ne s'interroge non pas sur l'efficacité mais sur l'utilité de cette nouvelle injection, notamment chez les plus jeunes. "On a certainement plus de six mois" d'immunité "mais on n'a peut-être pas un an", explique le consultant santé BFMTV, avançant l'idée d'un rappel vaccinal progressivement ouvert selon les tranches d'âges.
"La question centrale aujourd’hui ne porte pas sur la sécurité de cette dose de rappel mais sur son intérêt et sur le meilleur moment pour l’administrer. À quel moment en a-t-on vraiment besoin en dessous de 65 ans", évoque Odile Launay, infectiologue à l'hôpital Cochin dans les colonnes du Parisien. "Les Français de plus de 18 ans n’ont eu accès à la vaccination qu’à la fin du mois de mai 2021. Il faut donc attendre la fin du mois de décembre, c’est-à-dire six mois après la seconde injection, pour se poser la question de la dose de rappel."
Une question de semaines?
Alors qu'Olivier Véran a mis en garde ce mercredi soir face à "ce qui ressemble clairement au début d'une 5ème vague", Odile Launay estime qu'une éventuelle aggravation de la situation sanitaire pourrait motiver le gouvernement à ouvrir cette dose de rappel à l'ensemble de la population, comme ce fut le cas cet été en Israël. "Il est fort probable que dans les semaines qui viennent, ce rappel soit élargi à l’ensemble de la population", évoque-t-elle.
Pour le Pr Benjamin Davido, infectiologue à l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches (Hauts-de-Seine), "il va falloir amorcer un calendrier très clair dès janvier pour l'ensemble de la population comme on l'avait fait en mars dernier où on avait un calendrier qui s'étalait sur plusieurs mois par tranches d'âge".
Dans l'attente d'une possible ouverture généralisée à la dose de rappel, Dominique Costagliola alerte quant à elle contre tout relâchement des gestes barrières, alors que le phénomène a déjà été constaté ces derniers mois.
"C'est très important d'inciter la population à avoir cette troisième dose, mais il est aussi important de recourir aux outils mis à notre disposition: le port du masque, l'hygiène des mains, l'aération...", a développé sur BFMTV l'épidémiologiste et directrice de recherches à l'Inserm. "C'est en combinant tout ça qu'on arrivera à passer une saison entière avec un minimum de risques."