Coronavirus: à Marseille, les médecins de l'AP-HM "ne veulent pas avoir à choisir" les malades

L'hôpital de la Timone, à Marseille. - BORIS HORVAT / AFP
Alors que ce lundi marque le début de la fermeture, pour au moins 15 jours, des restaurants et bars à Marseille, la situation sanitaire se dégrade peu à peu dans la cité phocéenne et sa région. Dans une tribune publiée ce jour dans La Provence, 19 chefs de services de l'AP-HM (Assistance publique - Hôpitaux de Marseille) alertent sur les difficultés que rencontrent les établissements de santé locaux, et leur personnel, avec la multiplication des contaminations et des réanimations.
Moins de lits pour les patients hors-Covid
En guise de préambule, ces derniers rapportent "une augmentation lente mais continue des hospitalisations conventionnelles et des admissions en réanimation au sein des Hôpitaux Universitaires de Marseille" liées au Covid-19, dont un tiers concerne des patients âgés de 40 à 65 ans.
A l'heure actuelle, la situation se tend, et "plus de 40% des lits de réanimation de l’AP-HM sont occupés par des patients COVID." De fait, ces derniers ne sont logiquement plus disponibles pour d'autres patients atteints d'affections graves "telles que des polytraumatismes, des cancers ou des greffes."
"La tension sur les lits de réanimation nous a déjà contraints à des reports d’interventions chirurgicales et de nouvelles déprogrammations de patients non-Covid sont déjà prévues la semaine prochaine", ajoutent les signataires.
La réplique au professeur Raoult
En outre, cette tribune est également l'occasion pour ses auteurs, parmi lesquels des chefs de services de réanimation et des unités Covid, de tempérer les propos du professeur Didier Raoult qui avait accusé ses collègues marseillais d'être trop "alarmistes" et de "porter une responsabilité dans les mesures déraisonnables prises, contre la ville, par le ministre de la Santé."
Pour ces derniers, le rôle d'un CHU "n’est pas d’être 'alarmiste' ni de commenter" mais de "soigner les patients." Selon les signataires, "les cas les plus graves ont été hospitalisés dans les différents services de réanimation de l’AP-HM dont le niveau d’occupation dépasse la côte d’alerte". L'IHU Méditerranée Infection du professeur Raoult, qui accueille 75 lits du Pôle des Maladies Infectueuses de l'AP-HM, ne traîte pour sa part "qu'une partie des malades dont l'état ne nécessite pas des prises en charge plus lourdes."
"En outre il a été, comme lors de la première vague, rapidement dépassé dans ses capacités d'hospitalisation conventionnelle", apprend-on.
Ne pas choisir les malades
En guise de conclusion, les 19 signataires de cette tribune, qui se défendent de tout parti-pris politique, restent conscients "des conséquences terribles" qui accompagnent cette crise sanitaire, en particulier au niveau économique. "Les politiques décident et nous prenons en charge les patients", peut-on lire.
Pour autant, la tribune appelle à anticiper, "car demain les équipes soignantes ne veulent pas avoir à choisir quel malade ira ou non en réanimation." Une situation qui inquiète fortement les signataires puisque à l'heure actuelle, "nous ne trouvons pas les effectifs médicaux et paramédicaux à embaucher pour augmenter notre capacité globale d'hospitalisation".