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En Bretagne, les anciens "gilets jaunes" scrutent avec intérêt le mouvement du 10 septembre

Un homme porte un gilet jaune floqué du slogan "Boire du lait, c'est bon, ne pas le payer, c'est con" lors d'une manifestation d'agriculteurs à Rennes, en Bretagne, le 25 janvier 2024. (Illustration)

Un homme porte un gilet jaune floqué du slogan "Boire du lait, c'est bon, ne pas le payer, c'est con" lors d'une manifestation d'agriculteurs à Rennes, en Bretagne, le 25 janvier 2024. (Illustration) - DAMIEN MEYER © 2019 AFP

Alors que le pays se prépare à un éventuel blocage et des manifestations partout en France ce mercredi 10 septembre, certaines anciennes figures bretonnes des "gilets jaunes" observent le mouvement "Bloquons tout" avec attention.

Entre attentisme et espoir du retour d'une révolte populaire, d'anciens "gilets jaunes" confient vouloir suivre avec attention la journée du 10 septembre "Bloquons tout", dont ils perçoivent plusieurs similitudes avec leur mouvement.

Ancien "gilet jaune" actif dans le Morbihan, Joseph (prénom d'emprunt en raison des "risques"), voit deux points communs évidents entre les deux mouvements: "le pouvoir d'achat" et la volonté "de dégager le gouvernement actuel".

Des appels à "bloquer" le pays le 10 septembre, lancés sur les réseaux sociaux, prévoient des mobilisations partout en France, faisant entrevoir un retour d'un épisode similaire aux manifestations des "gilets jaunes" qui avaient secoué le pays de 2018 à 2019.

Chloé Tessier, militante "gilet jaune" en Normandie à Blainville, estime que la situation financière pèse sur une grande partie de la population.

"On le voit à la pompe: on est content quand le litre d'essence est à 1,50 euro. Avant, pour 50 euros, on avait un caddie à Lidl, maintenant c'est un sac de courses. Pour les gens, c'est toujours la débrouille, avec l'inflation qui est présente et les salaires qui n'ont pas augmenté", relève cette ancienne habituée des ronds-points.

"Tout payer en liquide"

Autre similitude avec 2019 selon Jérôme Rodrigues, figure du mouvement éborgné lors d'une manifestation en janvier 2019 à Paris, la volonté de dégagisme de la classe politique au pouvoir.

"Le gouvernement, son Premier ministre et l'ensemble des gens qui nous dirigent aujourd'hui dans ce pays veulent nous faire porter la responsabilité de leur incompétence", critique Jérôme Rodrigues qui estime que "la colère est là depuis très longtemps".

Pour Jacline Mouraud, à l'origine de la vidéo virale postée en octobre 2018 sur Facebook qui avait dénoncé "la traque aux automobilistes" et avait ainsi initié le mouvement des "GJ", "les gens n'en peuvent plus de cette classe politique" qui vit "sur le dos de la bête depuis 40, 50 ou 60 ans".

"Il va bien falloir que ça change", assure celle qui est aide à domicile dans le Morbihan, qui prévoit ce mercredi 10 septembre "de pavoiser son balcon" et de "tout payer en liquide".

"Petite étincelle"

Reste que certains s'interrogent sur le déroulement du 10 septembre et les modalités d'action. "Ca part un peu dans tous les sens: à la base, ça devait être un arrêt de la consommation, retirer son argent, ne pas consommer dans les grandes multinationales et maintenant on parle de blocage ou même de sabotage", s'étonne Joseph.

Si Ludivine Hilairet, 28 ans, ancienne du mouvement à Caen, juge que le 10 septembre s'apparente à un "gilet jaune bis", elle remarque que le mouvement est "cette fois-ci plus large" avec "des syndicats qui sont un peu dans le 'game'", avec des préavis de grève, "ce qui n'était pas le cas avec les GJ".

À Saint-Malo, Monique, qui ne veut pas dévoiler son patronyme car sa participation au "mouvement des ronds-points" lui avait "attiré énormément de problèmes", se sent "solidaire" tout en regrettant la "récupération" par La France insoumise (LFI) du mouvement du 10 septembre, à l'origine "apolitique" selon elle.

Certaines figures des "gilets jaunes" caressent l'espoir d'une "Saison 2" de la contestation sociale, en forme de revanche.

"Je sais qu'il y a beaucoup de gilets jaunes qui sont à l'oeuvre dans ce mouvement" du 10 septembre. Car "on ne va pas se mentir, il y a quand même une certaine frustration de ne pas avoir réussi ce qu'on avait commencé il y a sept ans", estime Jérôme Rodrigues.

Chloé Tessier a apprécié de découvrir les appels au blocage sur les réseaux sociaux. "J'étais contente que ça reprenne car il y a eu une petite étincelle avec les agriculteurs, avec la loi retraite mais ça n'a pas pris. Là, ça peut être incroyable, un début d'insurrection...Comme quelque chose qui ne prend pas".

L.P. avec AFP