Le texte de Gabriel Attal sur la justice des mineurs examiné à l'Assemblée ce mercredi

Le chef de file des députés Renaissance, Gabriel Attal, le 4 décembre 2024 à l'Assemblée nationale - Alain JOCARD / AFP
Comparution immédiate, sanction des parents, dérogations à l'excuse de minorité: l'examen d'un texte risqué de Gabriel Attal visant à durcir la justice des mineurs, soutenu par le gouvernement mais honni par la gauche, débute ce mercredi 12 février dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale.
Cette proposition de loi visant à "restaurer l'autorité" de la justice à l'égard des "mineurs délinquants" et de "leurs parents" reprend une série de mesures annoncées au printemps par Gabriel Attal, alors Premier ministre.
Le texte se veut une réponse aux violences urbaines de l'été 2023 - après la mort du jeune Nahel, tué par un policier à Nanterre - selon l'ex-chef du gouvernement qui, après être redevenu député, a décidé de le porter dans l'hémicycle.
"Je propose qu'on soit plus ferme dans la réponse pénale face à un certain nombre d'actes de délinquance, à des délits, à des crimes qui viennent des mineurs", a résumé Gabriel Attal mercredi matin sur RTL.
Des victoires pour la gauche en commission
Il bénéficie de l'appui de la coalition de François Bayrou, qui a manifesté son soutien au texte dans la foulée du meurtre d'Elias - un adolescent de 14 ans mortellement poignardé à Paris pour son téléphone portable le 24 janvier.
Mais son adoption est loin d'être assurée. La gauche est vent debout contre ce texte "directement inspiré par les idées de l'extrême droite", selon les mots du député socialiste Hervé Saulignac qui défendra au nom de son groupe une motion de rejet préalable.
Lors de l'examen en commission fin novembre, la gauche avait réussi à dénaturer le texte, en l'absence d'un grand nombre de députés du centre, de la droite et de l'extrême droite.
Gabriel Attal a déposé des amendements pour rétablir toutes les mesures supprimées, à commencer par la création d'une procédure de comparution immédiate pour les mineurs de 16 ans pour des faits graves.
Il entend également "inverser les choses" sur "l'excuse de minorité" qui permet d'atténuer les peines judiciaires, afin "qu'elle ne soit plus automatique à partir de 16 ans, pour des faits particulièrement graves".
Le RN "plutôt favorable"
Le texte, dont l'examen débutera à 21h30 et devrait se poursuivre jeudi matin, prévoit en outre de durcir les sanctions envers les parents de mineurs délinquants.
Une orientation qui convient au Rassemblement national. "On est plutôt favorable à tout cela", a reconnu son vice-président Sébastien Chenu sur TF1, jugeant que le texte "va dans le bon sens", même s'il est "encore peut-être pas suffisant". Le bloc central est en revanche partagé: si certains membres de l'aile droite se réjouissent de "propositions fortes et radicales", d'autres ne cachent pas leur malaise.
Comme le député macroniste Ludovic Mendes, qui déplore que le texte ne soit "pas complet" et "ne traite qu'une partie du problème", en l'absence notamment de mesures pour "protéger" les mineurs de l'exploitation des adultes, par exemple.
Un élu redoute "qu'il ne passe qu'avec l'appui de l'extrême droite", et une autre députée pense même qu'il "a peu de chance" d'être adopté.
Un test pour Attal
Plus largement, "dans la majorité, il n'y a pas un enthousiasme débordant", confie à l'AFP un député LR, déçu par "un texte mal ficelé" et qui "rate un peu l'objectif" alors que son camp "veut un signal fort" sur ce sujet de la délinquance des mineurs.
Des voix s'élèvent toutefois à droite pour battre le rappel, à l'instar de la présidente de la région Ile-de-France Valérie Pécresse : il "faut qu'on vote la proposition de loi Attal", "elle est importante", a-t-elle affirmé sur France 2.
Le dossier a aussi valeur de test pour l'ancien Premier ministre, dans le creux de la vague après des revers essuyés par son parti Renaissance lors de récentes élections, et des critiques nombreuses sur sa méthode employée comme chef du groupe.
Plusieurs élus macronistes interrogés par l'AFP lui reprochent de ne pas avoir réussi à insuffler le "dynamisme" nécessaire pour "mobiliser" les troupes ces derniers mois. En dehors de l'hémicycle, dans le monde judiciaire, le texte provoque une levée de bouclier.
Dans une tribune publiée par le Club de Mediapart, plus d'une dizaine de syndicats d'avocats, de la magistrature, et de la protection judiciaire, appellent à des rassemblements mercredi contre cette proposition de loi et "l'instrumentalisation de la justice pénale des mineurs à des fins sécuritaires".