Le vrai projet de Fillon : un abri jusqu’en 2017

Hervé Gattegno - -
Le come back de François Fillon est un retour médiatique ; pour le retour politique, il faudra attendre. Pour l’instant, on voit plus de fumée que d’étincelles ! Tout le monde a compris qu’il ne sera pas candidat aux municipales, mais il ne l’a pas encore dit clairement. Il ne tient pas non plus à disputer le match retour contre Jean-François Copé pour la présidence de l’UMP en septembre – alors qu’il a réclamé à corps et à cris un 2d vote… Rien de tout cela n’est clair, sauf que François Fillon ne pense plus qu’à la présidentielle et qu’il veut y arriver intact. Il n’a pas réussi à conquérir son parti, il veut jouer sa partie.
Ça signifie qu’il s’éloignerait de l’UMP ? Est-ce une attitude possible pour un leader de l’opposition ?
C’est une stratégie par défaut : après la défaite de Sarkozy, Fillon a pensé qu’il était le seul vrai présidentiable à droite et avant l’élection interne à l’UMP, il était sûr d’écraser Copé. Les 2 fois, il s’est trompé. Résultat : il ne peut ni occuper le terrain, ni se poser en recours – les 2 rôles sont dévolus à Copé et à Sarkozy. Donc il veut combiner l’omniprésence d’un opposant de 1er plan et la distance d’un futur candidat. L’équation n’est pas évidente mais elle correspond à son tempérament: elle lui permet d’éviter la bagarre. S’il prend de la hauteur, c’est surtout pour ne pas salir ses bas de pantalon. Son livre s’appelait « La France peut supporter la vérité » ; sa vérité à lui, c’est qu’il ne supporte pas le combat.
C’est une image qui lui colle à la peau, mais n'a-t-il pas révélé un autre tempérament dans son duel face à Jean-François Copé ?
Il a montré de l’opiniâtreté, pas de la hardiesse. Fillon n’a jamais été un chef de guerre ; tout le monde le sait à l’UMP, y compris ses propres lieutenants, qui l’ont beaucoup poussé dans la bataille interne – jusqu’à jouer les pousse-au-crime, comme François Baroin et Laurent Wauquiez… En fait, il ne s’est lancé dans cette campagne que parce qu’il était sûr de la gagner. Et comme il a très peur de perdre les suivantes, il ne veut plus se présenter nulle part… sauf à l’Elysée. De ce point de vue, il s’inscrit moins dans la lignée de Chirac et de Sarkozy que dans celle de Balladur et de Villepin. A droite, ce sont toujours les combattants qui se sont imposés. Fillon, lui, n’a rien d’un officier de cavalier – ou alors, pour faire cavalier seul…
Dimanche sur TF1, il a juré qu’il était prêt à soutenir « celui qui, à l’UMP, serait le mieux à même de soutenir son projet de redressement ». Vous le croyez sincère ?
Totalement… puisqu’il est convaincu que ce sera lui ! Son calcul, c’est de multiplier les manœuvres dissuasives pour que Jean-François Copé ne soit jamais en mesure de s’imposer et que Nicolas Sarkozy n’ait jamais envie de revenir. La limite de l’exercice, c’est que pour rassembler les Français, comme il le prétend, il faut d’abord rassembler son camp. Ce n’est pas en désertant les champs de bataille qu’il y parviendra. Ce n’est pas un sniper dont l’UMP a besoin, mais un leader.
Ecoutez ici le Parti Pris d'Hervé Gattegno de ce mardi 26 février.