L'affaire Benalla tourne au "désastre" pour l'Elysée

Alexandre Benalla, accusé de violences contre un individu le 1er-mai 2018 - Capture BFMTV
Crise gouvernementale... et couac communicationnel. Toute la journée de jeudi, le président de la République a éludé les questions concernant Alexandre Benalla, ce chargé de mission de l'Élysée au coeur d'un scandale sans précédent depuis le début de son mandat. À peine le président aura-t-il répondu que "la République est inaltérable". Un silence qui trahit la gravité de cette affaire, le malaise de l'exécutif... et une stratégie difficile à mettre en place.
Mercredi soir, Le Monde diffuse une vidéo dans laquelle ce collaborateur du président apparaît en train de frapper un manifestant le jour du 1er mai. Il porte un casque de police, bien qu'il n'appartienne pas aux forces de l'ordre. Surtout, il ne devait être présent qu'en tant qu'observateur. Enfin, son comportement n'aura été sanctionné que par 15 jours de suspension et une rétrogradation, qui ne l'a pas empêché depuis de participer à des événements majeurs.
"(Emmanuel Macron) aurait viré ce conseiller dès les premières heures du jour, on aurait une crise qui serait moins grave", estime ainsi Benjamin Morel, docteur en science politique à l'ENS, sur BFMTV. "On voit qu’actuellement, cette crise gangrène le pouvoir".
Car il a fallu attendre près de 36 heures pour qu'une décision officielle soit prise concernant Alexandre Benalla, l'Elysée indiquant alors qu'elle engageait une procédure de licenciement à l'encontre du chargé de mission.
Déclaration exceptionnelle du porte-parole
Guillaume Tabard, rédacteur en chef et éditorialiste politique au Figaro, souligne que le très rare porte-parole de la présidence de la République française, Bruno Roger-Petit, est sorti du silence pour l'occasion. "Choisir ce jour-là pour sortir de ce rôle, c’est l’aveu d’une dramatisation et donc d’une panique qui est assez incroyable", estime-t-il. Et de revenir sur le contenu de ce message, dans lequel le porte-parole affirme que la sanction infligée à Alexandre Benalla est "la plus grave jamais prononcée contre un chargé de mission travaillant à l’Élysée":
"Faire de ce qui est clairement une erreur en terme de sanction le symbole de la fermeté de l’Élysée, c’est dramatique", déclare le journaliste. Quant à la méthode employée, celle d'un enregistrement sans journaliste: "Je crois que même du temps de Léonid Brejnev on ne communiquait pas de cette manière-là."
Versions désaccordées
Les membres du gouvernement, de leur côté, ont parfois offert un "décalage de version" que souligne Guillaume Tabard:
"Bruno Roger-Petit parle d'une autorisation donnée à Alexandre Benalla de se rendre à la manifestation. Ensuite, la Garde des Sceaux quasiment à la même heure au Sénat dit qu'il s'y est rendu sans autorisation. Dans l'après-midi, elle corrige sa version: sans autorisation de participer, mais il avait autorisation d'assister."
Une expression imprécise qui "ajoute au trouble, plutôt qu'(elle ne le) règle".
"Un désastre en termes de relations de presse"
Comment, alors, la présidence aurait-elle pu réagir? "Dès le départ dans ce type de crise, il faut admettre les faits, surtout quand ils sont connus et qu’ils sont reconnus par les intéressés", assure Philippe Moreau-Chevrolet, communicant et président de MCBG Conseil:
"Il faut prendre des sanctions immédiatement quand ça n’a pas été fait avant, ce qui est le cas, et il faut simplement dire 'La justice va suivre son cours, on libère ce monsieur de ses obligations vis-à-vis de nous'."
Une réaction à l'opposé de celle du gouvernement, qui en fait selon le communicant "Un contre-exemple de ce qu’il faut faire, un désastre en terme de relations de presse ou d’image."
De possibles séquelles?
Et même après l'évincement d'Alexandre Benalla, cette crise pourrait laisser des traces électorales, comme le souligne Philippe Moreau-Chevrolet: